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Droite corse : Laurent Marcangeli à la barre

Le centre de gravité de la droite corse se situe désormais de toute évidence à Ajaccio et le premier magistrat de la Ville impériale est bien son leader naturel.
Le 15 mars dernier, après l’annonce des résultats du premier tour des élections municipales, la droite corse pouvait globalement afficher de la satisfaction, et ce bien qu’ayant subi deux déconvenues. Le maire sortant de Brando, Dominique Ricci, avait été battu par son adjoint Patrick Sanguinetti qui, certes lui-aussi classé à droite, avait bénéficié du soutien actif de Femu a Corsica. Le maire sortant de Biguglia, Sauveur Gandolfi-Scheit, avait été devancé par Jean-Baptiste Giabiconi qui avait été investi par Femu a Corsica. Perdre la commune incluant Erbalunga, site touristique internationalement connu, et être dépossédé d’une des plus importantes communes de Corse, n’étaient certes pas choses anodines. Mais la droite pouvait opposer les succès bien plus que consolatifs de ses principales figures aussi bien dans le nord que dans le sud. En Haute-Corse, Anne-Marie Natali l’avait emporté sans opposition dans sa bonne ville de Borgo. Avec l’assentiment à peine voilé de Femu a Corsica, le maire sortant Joseph Galetti avait étrillé à Lucciana une liste nationaliste soutenue par le Partitu di a Nazione Corsa. Michel Rossi avait facilement conservé Ville di Pietrabugno, jadis fief de Jean Baggioni. Xavier Poli s’était imposé à Corte aux dépens de Vanina Borromei, conseillère exécutive Partitu di a Nazione Corsa, et avait ainsi pris le relai de Tony Sindali. Se situant à égale distance de la droite et de La République En Marche, et ayant à nouveau intégré des responsables du Partitu di a Nazione Corsa à sa liste, Francis Giudici avait consolidé ses positions à Ghisonaccia en distançant la liste Femu a Corsica. Ange Santini, Jean Toma et Claudy Olmeta étaient respectivement sortis vainqueurs à Calvi, Sari-Solenzara et Saint-Florent, le dernier nommé ayant défait la liste Juliette Ponzevera, conseillère Femu a Corsica à l’Assemblée de Corse. Dans le sud, Valérie Bozzi, Xavier Lacombe, Henri Antona, François Colonna, François Garidacci et François Mosconi étaient respectivement sortis vainqueurs à Grosseto-Prugna, Peri, Coti-Chjavari, Vico, Cargèse, Conca. Enfin, la droite avait remporté le succès majeur du premier tour en triomphant à Ajaccio, Laurent Marcangeli a avait balayé les trois listes nationalistes et achevé ce qui restait de la gauche. Dans le sud, George Mela à Porto-Vecchio face au conseiller exécutif Jean-Christophe Angelini (Partitu di a Nazione Corsa), dans le nord, Ange Fraticelli à Aleria et Jean-Joseph Allegrini-Simonetti à L’Ile-Rousse, étaient certes trois sortants en difficulté. Mais à cette source de contrariété pouvaient être opposés la quasi certitude de conserver Sartène, de bonnes chances de garder Figari et Zonza (discorde dans les rangs nationalistes) et surtout de contribuer à une défaite cuisante de Femu a Corsica à Bastia. En effet, alors que le maire sortant Femu a Corsica Pierre Savelli avait obtenu 30,43% des suffrages et risquait lui aussi de pâtir des divisions au sein du nationalisme, Jean-Martin Mondoloni était en mesure d’apporter 9 % des suffrages à une éventuelle addition de ceux des trois listes de centre-gauche (Jean-Sébastien de Casalta, Jean Zuccarelli, Julien Morganti) qui aurait à elle seule représenté 46,28%.

Ajaccio au centre du jeu

Bien entendu, sur tous les fronts, il fallait tenir compte de la forte abstention. Mais il n’était pas interdit de penser qu’elle avait affectée tous les camps. Durant le confinement puis la campagne du second tour, la droite avait d'ailleurs de bonnes raisons d’envisager l’avenir avec confiance. D’abord parce que la discorde ou la concurrence non maîtrisée avaient manifestement nui à la famille nationaliste. Ensuite parce que ni la gauche (sauf à Bastia), ni les rares partisans d’Emmanuel Macron n’apparaissaient en mesure d’incarner l'alternance ou même l'opposition au nationalisme. Enfin et surtout parce que des horizons plus que prometteurs s’ouvraient à Laurent Marcangeli. En effet, outre s’être imposé à tous ses adversaires, le maire sortant de la Ville impériale avait au fil du temps fait place nette dans son propre camp. Il avait écarté du jeu la vieille droite qu’agitait Pierre-Jean Luciani (ancien président du Conseil départemental de Corse-du-Sud), la droite d’appareil que représentait Marcel Francisci (ancien président de la fédération de Corse-du-Sud des Républicains) et les frondeurs qui s’agitaient au sein de l’équipe municipale ajaccienne sortante. Laurent Marcangeli avait désormais quasiment les mains libres pour, s’il le souhaitait, envisager de se frotter à Gilles Simeoni en mars 2021 à l’occasion du scrutin devant renouveler l’Assemblée de Corse. Les résultats du second tour des élections municipales ont a priori pu tempérer l'optimisme de la droite. Les candidats qu’elle soutenait ont conservé Sartène (aisémen) et Aleria (de justesse) mais ont été mis en échec sur tous les autres fronts. A l’Ile Rousse, la sans étiquette Angèle Bastiani qui bénéficiait du soutien du conseiller exécutif nationaliste non encarté Lionel Mortini, a défait Jean-Joseph Allegrini-Simonetti. A Figari et Zonza, Hervé Pacini et George Fani (candidat Femu a Corsica au premier tour !) ont respectivement été battus par Jean Giuseppi et Nicolas Cucchi qui avaient le soutien de Corsica Libera et du Partitu di a Nazione Corsa. A Bastia, Jean-Martin Mondoloni a fait naufrage avec la liste de centre gauche. Enfin, à Porto-Vecchio, George Mela a été balayé par la vague Jean-Christophe Angelini. Cet été, pour la droite, les choses sont claires. Elle ne suscite guère d’enthousiasme à son profit au sein de l’électorat. Ses succès ont essentiellement été rendus possibles par l’ancrage de notables vieillissants. Mais à quelque chose malheur est bon ! Après les cuisantes défaites de George Mela à Porto-Vecchio et Jean-Martin Mondoloni à Bastia, et la victoire de Laurent Marcangeli à Ajaccio, le centre de gravité de la droite corse se situe désormais de toute évidence à Ajaccio et le premier magistrat de la Ville impériale est bien son leader naturel. La droite a donc, en définitive, perdu les élections municipales mais gagné un chef.
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