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<< D'autres chemins pour apprendre >> un film de Carole Grigy qui sera diffuser bientôt sur Via Stella

Des jeunes d’une classe de CAP-vente du Lycée professionnel Jean Nicoli à Bastia découvrent ces trésors que sont les livres anciens. Ils font la connaissance du Fab Lab de l’Université de Corse.

« D’autres chemins pour apprendre »
Un film de Carole Grigy


Des jeunes d’une classe de CAP-vente du Lycée professionnel Jean Nicoli à Bastia découvrent ces trésors que sont les livres anciens. Ils font la connaissance du Fab Lab de l’Université de Corse. Ils voyagent en Toscane sur les traces des Etrusques. Ils s’initient aux parfums dont raffolaient les premiers Toscans. La réalisatrice Carole Grigy les suit au fil de leur stimulant parcours culturel.


« D’autres chemins pour apprendre » nous dévoile l’itinéraire peu ordinaire de jeunes d’un lycée « pro » aux côtés de Linda Piazza, responsable de la Bibliothèque Patrimoniale bastiaise et créatrice de la Classe Patrimoine du Lycée Jean Nicoli. Ces lycéens en marge de la réussite scolaire traditionnelle se révèlent étonnants par leur ouverture d’esprit et leur soif d’apprendre au contact d’ouvrages pluriséculaires souvent riches de merveilles que sont leurs gravures ou leurs planches aquarellées. Sur les conseils de la bibliothécaire ils nettoient avec délicatesse certains de ces livres qui ont souffert des outrages du temps. Ils pénètrent alors dans un autre monde et manient allègrement les pinceaux qui vont restituer leur beauté à ces pages d’autrefois. Ils sont attentifs. Désireux de connaitre. Admiratifs devant des illustrations rares ou sophistiquées. Très vite ils oublient toute timidité et font corps avec leur mission.

Le film de Carole Grigy leur emboîte le pas à Corte où l’imprimante 3 D leur donnent l’occasion de voir la fabrication de dés pour le jeu de l’oie qu’ils ont imaginé. Il les accompagne en Toscane où ils visitent l’impressionnante nécropole de Banditaccia, puis lors de la réalisation d’un vase étrusque sous la direction d’un potier. Avec Jean Castela, professeur d’histoire, spécialiste de l’antique civilisation d’Etrurie et fin connaisseur de l’héritage qu’elle a laissé à Aleria, ils s’émerveillent devant un rhyton et de petites poteries à parfum dont raffolaient les Etrusques. De retour de leur périple italien des hommes de l’art de la maison Givaudan, célèbre pour ses fragrances, leur enseignent comment élaborer des parfums au plus près des goûts des Etrusques en sélectionnant des ingrédients à base d’iris, de sauge, de bouleau, de cédrat, de rose et d’encens. Les maîtres de la maison Givaudan vont créer pour cette Classe Patrimoine une exclusivité subtile et odorante dont un exemplaire sera remis au maire de Bastia.

Le documentaire nous montre aussi des instants plus intimes de la vie des lycéens quand ils jouent au baby-foot, quand ils fêtent un anniversaire, quand certains d’entre se confient avec une grande pudeur sur leurs difficultés familiales.

En alliant enthousiasme, allant, ingéniosité la bibliothécaire, leur professeure de commerce, la documentaliste amènent ces jeunes à surmonter leurs handicaps sociaux, à avoir confiance en eux, à être plus forts. Pour ce trio d’éducatrices ces élèves d’un lycée « pro » méritent « de travailler dans l’excellence et ont droit à l’exceptionnel ». Voilà qui devrait être la devise de l’Education nationale !...

Michèle Acquaviva-Pache

« D’autre chemins pour apprendre » doit être diffuser bientôt sur Via Stella. Il a été projeté en avant-première au Festival Cine Donne.ENTRETIEN AVEC CAROLE GRIGY

Comment avez-vous découvert la Classe Patrimoine du Lycée professionnel Jean Nicoli ?
Par hasard !... En 2018 j’étais en repérages à Bastia pour mon documentaire sur Jean François Marras, « Voix d’or ». Ce ténor corse a la particularité d’avoir débuté dans le chant lyrique à 18 ans et de poursuivre depuis une très belle carrière. Sur la place du théâtre, je remarque une indication, celle de la Bibliothèque patrimoniale. J’y vais. Je rencontre la responsable, Linda Piazza, qui me parle de la Classe Patrimoine qu’elle a fondé et anime avec Mathilde Mattei, professeure de commerce à Jen Nicoli et Anne-Solène Gourdon, documentaliste de l’établissement. Leur propos à toutes les trois : rendre vivant le livre ancien.

Qu’est-ce qui vous a surtout séduit dans cette Classe Patrimoine ?
La détermination enthousiaste du trio d’animatrices qui sortait ces jeunes d’un lycée professionnel de leur contexte social et réussissait à révéler leurs talents en faisant mentir le système français basé sur la méritocratie qui exclut trop d’élèves. Or, ces jeunes ne sont pas moins intelligents que d’autres. Ils ont tout bonnement du mal à s’accommoder d’un enseignement académique.

Avez-vous longuement discuté avec Linda Piazza ?
J’ai pris le temps de la rencontrer, de créer du lien, de la connaître. J’ai enquêté sur son initiative innovante. J’ai été frappé par ces jeunes qui ont le sens du collectif et du savoir être.

Comment l’idée de votre documentaire a -t-elle été accueillie par les jeunes ?
Je me suis présentée à eux. Je leur ai fait visionner mes films précédents. Ils ont beaucoup apprécié, « Voix d’Or ». Bref, ils m’ont fait confiance et ont été très généreux… Dans tous les cas de figures je ne peux jamais filmer des gens contre leur gré.

Cette Classe Patrimoine quelle est-elle ?
Elle comprend plus de garçons que de filles. Les lycéens préparent un CAP-vente en deux ans. Ensuite ils peuvent aller en seconde et passer un bac « pro » s’ils ont le niveau. En eux j’ai senti qu’ils voulaient choisir leur vie plutôt que de la subir, qu’ils aimaient travailler et être autonome.

Face à la caméra vous parvenez à ce que certains de ces jeunes soulèvent un coin duvoile sur leurs difficultés familiales. Etait-ce évident ?
C’est la magie du documentaire… Pour happer ces moments je les construis en amont en passant du temps avec mes interlocuteurs. Mais sur l’instant je fonctionne à l’instinct.

Comment êtes-vous devenue réalisatrice de documentaires ?
A 14 ans j’ai voulu faire du cinéma. Je me passionne depuis toujours pour les films et les livres. A la suite de mes études supérieures j’ai fait une école du 7 è art. Après ma formation j’ai réalisé des films institutionnels et eu la chance de rencontrer, Stephan Moszkowiez, mon mentor. J’ai été son assistante, mon énergie vient de lui… Sur mes documentaires je me charge de l’image et je prends un ingénieur son, en l’occurrence, Marc Wattrelot, qui vit à Bastia.

Quels thèmes aimez-vous traiter ?
Les sujets de société inattendus. Je ne suis jamais dans le jugement. Je laisse du temps à mes interlocuteurs pour qu’ils s’expriment. S’ils se livrent c’est en toute liberté.

Selon vous quelle est la fonction du documentaire ?
Témoigner d’une rencontre singulière. « D’autres chemins pour apprendre » raconte une belle histoire et prouve qu’on n’est pas enchaîné à un déterminisme social… Le possible existe !

Que préparez-vous actuellement ?
Je viens de déposer au CNC (Centre National du Cinéma) le dossier d’un long-métrage, « Farrah, l’Egyptienne ». C’est la mezzo-soprano Farrah El Dibany qui me l’a inspiré. Elle fait une carrière lyrique internationale et chante aussi le répertoire des divas du Moyen Orient. Dans mon scénario tous les faits son vrais… mais c’est fictionné. J’aborde à travers ce film l’histoire commune de l’Egypte et de la France en me référant bien sûr à la campagne de Napoléon dans cette région du monde. Sur ce point Linda Piazza va me fournir des archives.

Principale difficulté du documentaire ?
Les difficultés sont toujours liées au budget. Pour « D’autres chemins pour apprendre » j’ai eu le soutien de la CdC et de la ville de Bastia… Heureusement !

Existe-t-il à vos yeux de sujets tabou ?
Je ne tournerai pas de portraits de Jacques Vergès, de Klaus Barbie ou de filmsur les massacres du Rwanda. Je préfère les sujets lumineux, porteurs d’espoir. Il faut dans mes documentaires qu’il y ait une étincelle de joie.

La fiction ne donne-t-elle pas plus de liberté que le documentaire ?
Le documentaire est l’école de la fiction. Pour tourner une fiction on dirige une équipe beaucoup plus lourde. Il ne fait pas se laisser écraser par elle.

Propos recueillis par M.A-P









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