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L'ascenseur social est-il en panne ?

Triste constat : les inégalités sociales s'accroissent au XXIe siècle.
L’ascenseur social est-il en panne ?

Triste constat : les inégalités sociales s’accroissent au XXIe siècle. Le fait que les bénéfices de la croissance économique n'aient pas été équitablement distribués et que la crise économique n'ait fait que creuser le fossé entre riches et pauvres est une vision largement partagée, appuyée par les statistiques.

Inégalités et discriminations

Une inégalité sociale est le résultat d'une distribution inégale des ressources sociales rares et valorisées au sein d’une société, ressources incluant toutes les possibilités d'actions humaines : politique, économique, culturelle, sociale, sexuelle, etc. Et depuis le rapport 2022 du Laboratoire sur les inégalités mondiales (Paris School of Economics), le thème des inégalités a été également associé à la crise climatique. Les 10 % les plus riches de la planète ont pesé à eux seuls pour près de la moitié de toutes les émissions de dioxyde de carbone enregistrées en 2019 (47,6 %). La « question sociale », celle des inégalités économiques et sociales ainsi que celle de la pauvreté, est apparue avec la Révolution industrielle. Avant le XXIe siècle, les inégalités n’étaient pas entre riches et pauvres, mais surtout entre les classes moyennes et les minorités qui n’y avaient pas accès. On parlait davantage de discriminations. Depuis une dizaine d’années, la question des inégalités économiques a fait son grand retour. Avec les crises, la mondialisation et les politiques de luttes contre les discriminations, la question du capital est redevenue centrale. Les données montrent que l’écart se creuse entre les plus riches, et les autres, au détriment des classes populaires et moyennes. Pour de nombreux économistes, le vrai problème des inégalités réside surtout dans la reproduction sociale et les inégalités à la naissance.

Mobilité sociale en berne

Un autre aspect de la question des inégalités est celui de la mobilité sociale. Les enfants nés en bas de la distribution des revenus ont peu de chances de s’élever et d’améliorer leur statut professionnel par rapport à leurs parents et aux générations qui précèdent. À l'autre extrémité, il existe aussi un « plafond adhérent », parce que l'inégalité implique aussi que ceux qui sont en haut de l'échelle y restent pour longtemps. D’après un rapport de l’OCDE, en France, l’opinion selon laquelle la fortune et les avantages des parents jouent un rôle majeur dans le destin des individus est très répandue. Le pessimisme est aussi partagé quant à la situation financière, qui ne serait pas près de s’améliorer. En France, 35 % des personnes dont le père a de faibles revenus d’activités se retrouvent dans la même situation une fois adultes. Seulement 15 % d’entre eux parviennent à atteindre le groupe des revenus d’activités les plus élevés. Il semble qu’en France, le statut socio-économique se transmette d’une génération à l’autre. Compte tenu de la mobilité des revenus d’une génération à l’autre ainsi que du niveau d’inégalités des revenus en France, il faudrait six générations pour que les enfants nés dans une famille au bas de la répartition des revenus atteignent le revenu moyen.

Inégalités cumulatives

À l’échelle territoriale, les inégalités constituent aussi une fracture sociale. Ainsi, la société corse est très inégalitaire. Malgré un taux de pauvreté important (19,6 % de la population), la Corse fait partie des régions de province où la proportion de très hauts revenus est élevée : 1 % de la population fiscale. C’est une conséquence directe de la structure économique de l’île : beaucoup de personnes sans et une part importante de retraités et de fonctionnaires. En outre, l’aisance financière des personnes les plus riches découle d'activités non salariées. Malgré les revenus de transfert, la France présente de grandes inégalités de revenu. Idem pour le patrimoine : les 10 % les plus fortunés détiennent près de la moitié du patrimoine selon l’Insee (données 2018). Les inégalités sociales sont aussi fortes, que cela soit les écarts de salaires entre hommes-femmes, cadres-ouvriers, diplômés-non diplômés, malgré les lois sur la parité, l’égalité des chances, etc. Les inégalités constituent un système dans lequel les facteurs se combinent. Le milieu de naissance d’un enfant influe toujours sur le reste de sa destinée sociale et de sa réussite scolaire. Les valeurs méritocratiques sur lesquelles se fondent nos sociétés démocratiques n’ont donc pas fait leurs preuves. La fracture sociale est vive en France.

Maria Mariana
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