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Corse : le tourisme en vrac

Les professionnels corses de l'hôtellerie s'inquiètent de la saison estivale à venir

Corse : le tourisme en vrac



Les professionnels corses de l’hôtellerie s’inquiètent de la saison estivale à venir. Un peu comme chaque année d’ailleurs, tellement leur complainte est récurrente avec des invariants comme la concurrence des meublés, le manque de personnel. Et voilà que l’Agence du Tourisme annonce ne pas vouloir faire de campagne pour les mois de juillet et d’août et moins encore pour les sites remarquables provoquant une nouvelle levée de boucliers des hôteliers.

Une saison noire ?


Karina Goffi, nouvelle présidente l’UMIH Corsica (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) le clame et le proclame : la saison s’annonce noire avec quelques exagérations « La classe politique passe son temps à s’opposer au tourisme. On devrait appliquer une politique tarifaire d’entrée sur l’île, comme c’est le cas aux Baléares par exemple. Ils n’ont rien et nous avons un diamant, pourtant, les touristes vont là-bas ». Puis elle se plaint de la carence de l’emploi comme si pour le coup, le politique pouvait pallier ce type de problème.
Hier l’état était responsable de tout. Aujourd’hui, c’est la CdC. Et enfin, le petit couplet de fin sur les locations meublées avec le refrain habituel sur les taxes, les femmes de ménage non déclarées etc. À bien étudier les chiffres, il est tout à fait possible que la saison soit moins bonne que la précédente qui, il faut tout de même le rappeler n’avait pas été si mauvaise que ça. Car si on en croit l’INSEE « en Corse, d’avril à septembre 2022, les hébergements collectifs de tourisme enregistrent 10,1 millions de nuitées soit une hausse de 0,8 % de la fréquentation touristique par rapport à la saison 2019. L’avant-saison et le mois de septembre profitent largement aux établissements de plein air. Ainsi, le nombre de nuitées progresse de 4,4 % dans les campings où la clientèle étrangère est notamment plus présente qu’en 2019. La fréquentation est très fluctuante d’un mois sur l’autre dans les Autres Hébergements collectifs de Tourisme (AHCT), mais elle approche son niveau de 2019 sur la saison (- 0,4 %). Le niveau de présence de la clientèle étrangère affecte toutefois la fréquentation des hôtels. Malgré un cœur de saison satisfaisant, le nombre de nuitées hôtelières ne retrouve pas son niveau d’avant-crise (- 3,5 %). »

Des facteurs négatifs

Nuançant les propos de Karine Goffi, il y a eu l’année dernière des perdants — les hôteliers de moyen de gamme — et de grands gagnants, les campings. L’INSEE note qu’avec 4,4 millions de nuitées passées dans les hébergements insulaires de plein air au cours de la période (avril à septembre 2022), la fréquentation touristique a progressé de 4,4 % par rapport à 2019. Elle suit en cela une tendance métropolitaine en nette hausse (+ 7,5 %). Sur l’île, ce type d’hébergement enregistre ainsi 184 000 nuitées de plus qu’en 2019. Comme au niveau national, il est le premier mode d’hébergement marchand choisi par la clientèle saisonnière. En 2022, les campings représentent 43 % des nuitées passées dans les hébergements collectifs de tourisme en Corse, soit 1,5 point de plus qu’en 2019.
La crise hôtelière ne doit donc pas son possible déclin ou alors très marginalement à la présence de meublés, mais plutôt à d’autres facteurs. Le premier est que les hôtels s’adressent à une clientèle de la moyenne bourgeoisie dont le budget a été fortement impacté par la crise sanitaire et plus encore par l’inflation. Le deuxième est que le prix des transports routiers, maritimes et aériens a considérablement augmenté au point de valoir en une certaine période le double de ce qu’il était l’année dernière. Passer des vacances en Corse est devenu un luxe. Premier impact : les nuitées en hôtel ont baissé de près de 15 % (60 % pour la plus petite catégorie) alors que les campings 4 étoiles et plus ont augmenté de 19,6 tandis que les non classés ont baissé d’un tiers.
Cela signifie qu’il y a un type de touristes qui ne viennent plus en Corse et un déport de clientèle vers les campings. Tout aussi intéressant : l’avant saison (avril à juin 2022), cette période où tout est moins cher — s’avère déterminante dans la progression du nombre de nuitées passées dans les campings. En effet, l’afflux de la clientèle se fait principalement sur cette période (+ 32,5 % en avril, + 29,7 % en mai, + 19,2 % en juin).

Une attitude cohérente de l’ATC


L’ATC ne joue pas contre le tourisme, mais s’efforce de répondre aux attentes d’une population aux réactions contrastées. Autant les professionnels attentent le chaland avec impatience autant la masse touristique dérange des locaux qui, sur les lieux à haute fréquentation, regrette le calme automnal. Il y a de plus la sauvegarde environnementale qui est un objectif fondamental. Bref le tourisme en Corse donne le sentiment de n’obéir à aucune feuille de route susceptible de servir l’ensemble. Chacun voit midi à sa porte et cherche à tirer le profit maximum en un minimum de temps. Cependant, la crise que nous avons entamée promet de continuer et donc les difficultés de s’amonceler.

GXC
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