• Le doyen de la presse Européenne

Barcelone : Ada Colau a fait barrage aux indépendantistes

L'espagnolisme et le sentiment de classe ont prévalu

Barcelone : Ada Colau a fait barrage aux indépendantistes


Ada Colau et ses partisans ont offert la municipalité au Partido Socialista Obrero Español. L’espagnolisme et le sentiment de classe ont prévalu.


27 mai dernier, résultat du scrutin municipal à Barcelone : après deux mandats successifs, Ada Colau, la maire sortante qui conduit la liste Barcelona en Comú soutenue par le parti Podemos se réclamant de la gauche radicale, est battue. Sa liste ne dispose que de 9 conseillers municipaux. Elle est devancée par deux autres listes : celle de Xavier Trias (centriste soutenu par Junts per Catalunya, le parti du centre-droit indépendantiste auquel appartient Carles Puigdemont, ancien président de la Generalitat de Catalunya, en exil après avoir proclamé l’indépendance de la Catalogne le 27 octobre 2017) ; celle de Jaume Collboni (Partit dels Socialistes de Catalunya, version locale du Partido Socialista Obrero Español). Ces dernières ont respectivement obtenu 11 et 10 conseillers municipaux.
Xavier Trias est en position d’être élu maire. Il détient en principe trois atouts. Il est assuré de l’appoint de 5 conseillers municipaux issus de la liste d’Ernest Maragall (Esquerra Republicana de Catalunya, principal parti de la gauche indépendantiste). Il peut espérer la neutralité d’Ada Colau qui, comme Podemos, a toujours affirmé être favorable au droit de la Catalogne à l’autodétermination et ne devrait guère être encline à favoriser Jaume Collboni qui ayant été son premier adjoint, s’est positionné comme étant « l'unique alternative à Colau et à l'indépendantiste ».
Enfin, l'indépendance de la Catalogne n'ayant pas été au cœur des débats de la campagne électorale (Junts per Catalunya et Esquerra Republicana de Catalunya ont soigneusement évité d’évoquer le sujet) et étant classé au centre, il est en situation d’incarner l’aspiration de nombreux Barcelonais à l’apaisement, à la concorde et au retour au premier plan des enjeux économiques.


Explication lunaire et odieuse



17 juin dernier : mairie de Barcelone, réunion du conseil municipal. A l’ordre du jour : l’élection du maire. A l’issue des opérations de vote : Jaume Collboni élu, Xavier Trias battu ! Que s’est-il passé ? Réponse : les 9 conseillers municipaux Barcelona en Comú ont joint leurs votes à ceux des 10 conseillers municipaux Partido Socialista Obrero Español. Jaume Collboni a ainsi obtenu 19 voix alors que Xavier Trias n’en a recueilli que 16. Cerise sur le gâteau pour le vainqueur, les 2 conseillers municipaux Partido Popular (droite espagnole libérale-conservatrice) ont eux aussi voté en sa faveur. Ce qui lui a apporté la majorité absolue (21 voix sur 41). Ada Colau et ses partisans ont expliqué leur choix. Dans un communiqué, ils ont déclaré avoir voulu « éviter un gouvernement Junts qui étendrait un tapis rouge pour les lobbies et les secteurs favorables aux politiques d’extrême droite ».
Cette explication peut être qualifiée de lunaire car, étant maire sortante et sa liste étant principalement issue de la gauche radicale Podemos favorable au droit de la Catalogne à l’autodétermination, Ada Colau a permis le succès d’un premier-adjoint l’ayant lâchée en rase campagne, ayant donné foi aux accusations de wokisme et d’intégrisme écologiste lancées contre sa personne et étant farouchement opposé au droit à l’autodétermination de la Catalogne.
Cette explication peut être qualifiée d’odieuse car Ada Colau et ses partisans ont accusé Xavier Trias de collusion avec l’extrême droite alors que l’indépendantisme catalan a subi la répression franquiste durant quatre décennies, et est une des cibles principales du parti Vox, force montante de l’extrême-droite espagnole. Comprenne qui pourra diront les plus indulgents. Le réalisme impose davantage de considérer qu’au sein de Barcelona en Comú, qui doit beaucoup de ses suffrages à l’immigration intérieure originaire des provinces pauvres du sud de l’Espagne et venue trouver un emploi dans la riche cité catalane, l’espagnolisme et le sentiment de classe ont bousculé la ligne politique de la maison mère Podemos.


Alexandra Serena
Partager :