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Le réel et le ressenti en matière d'insécurité

Une notion d 'ensauvagement de la société..........

Le réel et le ressenti en matière d’insécurité



Le 1er septembre dernier, au micro d’Europe 1, le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, récemment relaxé, réfutait la notion d’ensauvagement de la société expliquant que celle-ci développait « le sentiment d’insécurité », qui est « pire que l’insécurité ». « L’insécurité, il faut la combattre, le sentiment d’insécurité, c’est plus difficile, car c’est de l’ordre du fantasme ». Il n’en reste pas moins qu’en matière de sécurité comme pour le froid le « ressenti » est un facteur essentiel de la vie politique.


Le nombre de crimes et délits, rapporté à la population française, a très fortement augmenté entre la deuxième moitié des années 1960 et le milieu des années 1980. Entre 1964 et 1984, le taux de criminalité passe en effet de 13,54 pour mille à 67,14 pour mille. Depuis, il n’a guère évolué restant aux alentours de 60 à 70 pour mille. Néanmoins, ces chiffres d’ensemble doivent être étudiés dans le détail pour déterminer les véritables mutations qui peuvent ou non corroborer l’idée d’un fantasme. Il y a tout d’abord, des évolutions structurelles de la délinquance avec une diminution de la part des vols dans la criminalité globale, mais une augmentation de la part des atteintes aux personnes, notamment chez les mineurs délinquants. Cette augmentation a été particulièrement marquée ces dernières années, tant en ce qui concerne les homicides et tentatives d’homicides que les coups et blessures volontaires à cause du trafic de drogue.

La diminution de la confiance en la justice


Fantasme ou pas, les sondages d’opinion démontrent une baisse de la confiance de la population dans l’appareil judiciaire bien que la population carcérale n’ait jamais été aussi nombreuse atteignant le chiffre historique de 73 000 personnes incarcérées. Mais plus les condamnations sont nombreuses moins il est possible de procéder à des emprisonnements d’où un sentiment faux de laxisme. La vérité est que les moyens mis au service de la répression et de la justice sont insuffisants au regard de la rigueur judiciaire. D’où le risque d’une augmentation de l’autodéfense et de la création de milices.

Fantasme ou réalité


Les chiffres nous démontrent que depuis le début du XXe siècle, l’insécurité a énormément baissé alors que le sentiment d’insécurité ne cesse d’augmenter. Il est vraisemblable que l’hyper médiatisation des faits divers, leur interprétation contradictoire selon les tendances politiques, le sentiment d’abandon de certains secteurs sociologiques parmi les plus défavorisés, accentue cette idée d’insécurité envahissante. Car désormais les citoyens n’attendent plus seulement une réponse répressive, mais également une réponse morale et cohérente. Les Français ont le sentiment que les magistrats font preuve de grande clémence à l’égard de délinquants endurcis et que la police est maltraitée. Ils ont l’impression que « la culture de l’excuse » est très présente dans les médias, mais aussi au niveau de l’État et notamment parmi ceux dont la mission est de combattre le crime.

Le ressenti fait le miel du Rassemblement national


Dupont-Moretti a eu une réflexion de nanti. Car ce qui guide la politique, qu’il le veuille ou non, ce sont les passions et non la raison. Le ressenti a évidemment beaucoup plus d’importance que le réel qui n’existe pas concrètement. La personne qui subit dans une cité la tyrannie de dealers n’a évidemment pas la même perception de la réalité que le grand bourgeois du XVIe arrondissement. Et c’est la négation de cette réalité-là, qualifiée de « ressenti » qui fait le miel du Rassemblement national. Et que ce parti y mélange la religion, l’ethnicisme le mélange devient détonnant. Il est incontestable que dans les banlieues, un certain nombre de jeunes issus de l’immigration (mais pas que) ont trouvé dans la marginalisation délinquante une façon de se définir. Et quand cette marginalisation permet de vivre et de s’imposer, cela crée inévitablement une délinquance au quotidien. Il n’y a aucun doute que la délinquance qui brasse des milliards dans l’anonymat est infiniment plus puissante que les bandes de quartiers quand bien même elles seraient à la tête d’un important trafic de drogue. Mais c’est cette petite et moyenne délinquance qui pourrit la vie des millions de personnes et qui les exaspère tout en leur laissant le goût amer de l’impuissance. Et traiter cela d’un revers de la main en parlant de « fantasme » est non seulement faux, mais en plus irresponsable.

GXC
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