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L'émergence des nouveaux courants musicaux en corse

Avec le numérique, les plate formes de streaming, les réseaux sociaux, les artistes insulaires ont la possibilité de s'auto produire......

L'émergence des nouveaux courants musicaux en Corse


Ces vingt dernières années, l'influence de la mondialisation, des échanges culturels, et la mue de l'industrie musicale ont permis l'émergence de nouveaux courants musicaux en Corse. Avec le numérique, les plate formes de streaming, et les réseaux sociaux, les artistes insulaires ont la possibilité de s'auto-produire et de distribuer leur musique de façon indépendante. Ils expérimentent de nouveaux sons, en préservant ou non l'héritage musical corse. Chacun entend défendre « sa » Corse en créant de la musique au niveau local.
Nous avons voulu en savoir plus sur les acteurs de ces nouvelles musiques insulaires, sur la création et les difficultés qui se posent à eux.


Promotion des cultures urbaines


La promotion de la culture urbaine est portée en premier lieu par les établissements scolaires insulaires qui l'ont intégré de manière éducative et créative pour encourager la diversité artistique, l'expression personnelle et le respect des différences au travers d'une participation dynamique des élèves a des ateliers d'apprentissages urbains tels que l'écriture, la peinture, la danse, ou la musique.
La promotion des cultures urbaines est aussi portée par les Municipalités dans le cadre de politiques de la ville et d'inclusion des quartiers populaires. Enfin, les associations comme le Mouvement pour la Culture Urbaine en Corse jouent un rôle essentiel.
Philippe Romantini
, son président, œuvre pour créer des événements artistiques où chacun peut s’exprimer, du débutant au confirmé, avec pour but principal de partager et d'éveiller des passions, le tout dans le respect et la discipline.
Le rappeur de Lupinu, Nalla, est un des membres les plus actifs. Il vient de sortir son troisième album et en a donné la primeur à Kscolta, la plateforme de téléchargement Corse. Un combo audacieux dont les tenants et les aboutissants se trouvent au niveau local.
Le MCUC a établi aussi une collaboration avec Le RéZo , un réseau de repérage, de soutien, d'aide à la professionnalisation et à la diffusion en Corse et hors de Corse des créateurs de
Musiques Actuelles résidant sur l'île.
Le MCUC
, par ses projets artistiques collaboratifs permet à cette jeunesse corse, jusque là isolée, de faire vivre sa création

Cad3t,
ce bastiais de 19 ans, pompier volontaire, fièrement attaché à sa ville et à la Corse, y a fait ses armes.
Depuis petit il se passionne pour l'écriture et le rap. Il envisage sa musique dans la modernité de son temps. Il considère qu'il y a un public pour le rap en Corse si il est respectueux. Il ne chante pas en Corse car cela ne s'y prête pas.Il finalise sa mixtape (maquette) dans le studio La Fabbrica quartier du marché à Bastia.

Le studio a été crée par Lucas, un de ses amis d'enfance, ingénieur du son expérimenté, après un passage sur le continent quasi obligé pour se former, la filière étant quasi absente en corse.
Il est vrai que le mastering nécessite une expertise technique pour obtenir un son professionnel, dernière étape du processus d'enregistrement d'une production musicale avant sa sortie.

Il n'empêche que le rap commercial trouve son public en Corse

La multiplication de gros événements des stars du rap en Corse n'échappe à personne.
Le chanteur star Soprano a réuni plus de 5 000 personnes au stade de Borgo, l'été dernier. 60 techniciens insulaires se sont activés aux commandes de Michel Marti, gérant de la société Key-Prod organisatrice du concert. Une aubaine pour la ville et pour l'emploi local.

À Calvi, le marseillais Jul a provoqué l'effervescence de toute la ville avec des fans venus des quatre coins de l'île. Là aussi une aubaine pour le commerce local. Les paillotes et les discothèques s'arrachent tout l'été ces stars de la musique urbaine pour attirer une jeunesse de plus en plus nombreuse.Peu importe les préoccupations identitaires habituellement si présentes, pourvu que le commerce tourne, c'est la trêve estivale !

Le paradoxe de la musique électronique en Corse


Loin des idées reçues, la musique électronique est présente en Corse depuis les années 1990.Les établissements mythiques insulaires précurseurs ont su très tôt capter les fêtards du monde entier en recevant les plus grands DJ, et la magie de l'électro opère toujours sur les plages.
Le festival Calv
i on the rocks fondé en 2003 a été une véritable locomotive de promotion des musiques électroniques en Corse. Il a suscité des vocations locales.
20 ans après, un autre festival électro a vu le jour à Saint Florent, Soluna, autour de DJ's de renommée internationale, il propose un environnement sécurisé, chic et écoresponsable.

Là aussi, l'organisation de ce type d'événements majeurs, avec de nombreux prestataires et techniciens insulaires, représente une véritable aubaine pour l'emploi et l'économie.
Cependant, dans ce domaine où la nuit brille, il y a peu d'élus, et nombre de travailleurs pauvres au statut précaire multiplient les heures pour de faibles cachets.

Certains ont choisi de créer en dehors de tout circuit commercial comme le pionnier ajaccien Emmanuel Denis.Ce compositeur de symphonies électroniques travaille dans son Home-studio avec ses synthétiseurs, il a un regard sage sur l'évolution des nouveaux courants musicaux en Corse et il est conscient de la difficulté : « C'est surtout une question de réseaux » nous confie-t-il, lui qui multiplie les appels à projet auprès des collectivités et qui voit beaucoup d'artistes extérieurs à la Corse retenus. On lui a même conseillé de partir sur le continent pour réussir avant de revenir. Nul n'est prophète en son pays !
A y regarder de plus près, certaines municipalités ont accru ces dernières années leur offre de programmation électronique.

A Bastia, le festival d'arts sonores Zone Libre a vu le jour il y a 6 ans. Il propose des découvertes sonores mélangeant des thèmes très conceptuels et élitistes, dans différents lieux de la cité. Peu d'artistes insulaires présents, faible écho populaire, et un vrai décalage avec la réalité sociale. Bastia cherche son équilibre.
Pour autant la ville opère une politique volontariste, par le biais des musiques émergentes, de prise en considération de l'inclusion et des différences ; si difficile à faire accepter pour ceux qui y voient une déviance wokiste.

Cet été, un concert entièrement dédiée à la musique électronique a été organisé aux jardins de l'annonciade, avec le légendaire DJ et producteur, Etienne de Crécy. Un air de liberté pour la génération alpha émergente qui a ses habitudes dans ce parc et ne se retrouve pas dans les traditions.

Tout cela nous montre l'importance des nouveaux courants musicaux sur l'économie insulaire et l'attrait touristique qu'ils représentent, l'orientation de certains appels d'offres et budgets publics, mais cela nous montre aussi le fossé entre les acteurs locaux, artistes, producteurs, ingé-sons, qui vivent leur passion sans financement, quasi envers et contre tous.Comme si la Corse ne savait pas reconnaître les valeurs des siens, enfin dans certains salons.
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