Le sursaut corse de Nicolas Battini
Un livre qui a du soufflle
Le sursaut corse de Nicolas Battini
Est-il encore possible par les temps qui courent de vanter les qualités d’un ouvrage tout en s’en déclarant en grand désaccord avec l’exposé ? C’est pourtant ce que j’ai ressenti en lisant l’ouvrage de Nicolas Battini, le fondateur de la Mossa Palatina ;
Un livre qui a du souffle
Nicolas Battini a une pensée qu’on peut classer à l’extrême droite de l’échiquier politique si tant est que de telles cases ont encore un sens. Autrefois, l’antisémitisme de la plupart des antisionistes aurait trouvé leurs harmoniques avec Jeune Nation des frères Sidos, nostalgiques d’une Algérie française et de l’antisémitisme pétainiste. Aujourd’hui les cartes sont brouillées. La gauche et l’extrême gauche vilipendent l’identitarisme blanc, mais célèbrent celui des populations autochtones des dominions français. Battini cite l’écrivain Maurice Barrès, l’homme de la terre et des morts. Edwy Plenel, le fondateur de Mediapart, grand pourfendeur de l’extrême droite, écrit le 18 mai 2024, un billet intitulé : « En Kanaky, la terre est le sang des morts » tiré du titre d’un livre de l’anthropologue Jean Guiart. Les deux réflexions se ressemblent étrangement. Mais ce qui semble être une évidence pour les uns est un blasphème pour les autres. Et c’est justement ce thème, celui de l’identité que Nicolas Battini aborde avec une franchise rafraîchissante, car au moins à partir de son écrit, on sait de quoi on peut débattre. Et il affirme son propos avec un souffle qui rend le livre appétissant.
Le parcours d’une vie
Nicolas Battini raconte son parcours, l’acte militant qui l’a conduit à subir six années de prison. Il décrit ce temps carcéral et sa rencontre avec le djihadisme qui l’a conduit à changer de vision sur la société. Dès lors, dit-il, le principal danger a été non plus l’État français, mais le risque de grand remplacement et d’instauration de la charia. J’avoue ne pas avoir été convaincu par la démonstration moi qui continue d’être un enfant de l’apôtre Paul, lui qui écrivait dans Galates 3-28 : « Il n’y a plus ni Juif ni païen, il n’y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n’y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » Mais j’estime que chacun a le droit d’avoir son opinion en fonction de son vécu, de ses peurs, de ses espérances et qu’il est indigne de vouloir faire taire une personne au prétexte que son opinion est contraire à la mienne. Il faut souligner que Battini réfute toute idée racialiste et met à l’honneur son grand-père, un Berbère arabisé qui combattit les nazis, prit un prénom français et adopta la religion catholique. Pour lui, la question est celle de la civilisation et il rejoint l’idée fondamentale de Samuel Huttington exposée dans Le Choc des Civilisations à savoir la décadence de l’Occident face à un monde désormais multipolaire dans lequel le monde musulman cherche à prendre une place perdue autrefois. Selon lui, c’est même la raison de sa démission de Femu. Il dresse des portraits sans pitié de Gilles Simeoni et de Jean-Baptiste Acquaviva pour qui il a travaillé et raconte la rupture quand Femu a accusé l’État d’être le responsable de l’assassinat de Colonna alors que pour lui, c’est Elong Abé et donc le djihadisme qui était à désigner. Battini décrit précisément son parcours judiciaire et fait un sort à la rumeur qui l’accuse d’avoir donné ses compagnons, démontrant que ce sont ses accusateurs qui ont cherché à tout prix à s’en sortir au mieux. Il donne des noms. J’ajouterai à titre personnel que j’ai vérifié ses dires. Ils sont parfaitement conformes à la réalité.
L’identité à l’honneur
Mais le sujet de Battini est l’identité corse. Il condamne l’idée de communauté de destin sans parvenir à convaincre. Mais il est cohérent. Maurassien en diable, il affirme que les deux piliers de l’identité sont la terre et la foi. Maurassien, mais aussi gramciste, il place la superstructure, la culture, le psychisme au-dessus de l’économie bien qu’il s’affirme libéral. Alors que dire ? L’écriture est belle et fluide. Il manque néanmoins une dimension réellement spirituelle et planétaire à sa pensée. Je ne pense pas qu’il faille confondre la spiritualité, c’est-à-dire la foi en une transcendance et la religion qui peut n’être que culturelle. Le deuxième reproche est de ne pas intégrer le phénomène corse dans une dimension historique autre qu’apologétique. Battini écrit combien il a été marqué par les grands personnages de notre histoire — Sampiero, Paoli, Napoléon—, mais il n’analyse pas la relation conflictuelle qui a fait naître ces individus en Corse pour ensuite subir une défaite définitive. Quelle est la funeste mécanique qui permet à de tels hommes de grandir puis d’être chassés (ou assassiné) dans ce confetti îlien ? Enfin, comment le phénomène identitaire corse s’inscrit-il dans un processus plus global. Mais cessons de barguigner. Le sursaut corse est un ouvrage rare qui permet enfin de parler de l’essentiel et il faut le lire. Il sera condamné sans même être ouvert par les bonnes âmes qui n’ont pas compris que le dialogue est la seule façon d’emporter une victoire. Gageons simplement que Battini et son mouvement auront à cœur de repousser toute forme de racisme ou de xénophobie.
GXC
Le Sursaut Corse, Nicolas Battini, éd. L'Artilleur, 202
Est-il encore possible par les temps qui courent de vanter les qualités d’un ouvrage tout en s’en déclarant en grand désaccord avec l’exposé ? C’est pourtant ce que j’ai ressenti en lisant l’ouvrage de Nicolas Battini, le fondateur de la Mossa Palatina ;
Un livre qui a du souffle
Nicolas Battini a une pensée qu’on peut classer à l’extrême droite de l’échiquier politique si tant est que de telles cases ont encore un sens. Autrefois, l’antisémitisme de la plupart des antisionistes aurait trouvé leurs harmoniques avec Jeune Nation des frères Sidos, nostalgiques d’une Algérie française et de l’antisémitisme pétainiste. Aujourd’hui les cartes sont brouillées. La gauche et l’extrême gauche vilipendent l’identitarisme blanc, mais célèbrent celui des populations autochtones des dominions français. Battini cite l’écrivain Maurice Barrès, l’homme de la terre et des morts. Edwy Plenel, le fondateur de Mediapart, grand pourfendeur de l’extrême droite, écrit le 18 mai 2024, un billet intitulé : « En Kanaky, la terre est le sang des morts » tiré du titre d’un livre de l’anthropologue Jean Guiart. Les deux réflexions se ressemblent étrangement. Mais ce qui semble être une évidence pour les uns est un blasphème pour les autres. Et c’est justement ce thème, celui de l’identité que Nicolas Battini aborde avec une franchise rafraîchissante, car au moins à partir de son écrit, on sait de quoi on peut débattre. Et il affirme son propos avec un souffle qui rend le livre appétissant.
Le parcours d’une vie
Nicolas Battini raconte son parcours, l’acte militant qui l’a conduit à subir six années de prison. Il décrit ce temps carcéral et sa rencontre avec le djihadisme qui l’a conduit à changer de vision sur la société. Dès lors, dit-il, le principal danger a été non plus l’État français, mais le risque de grand remplacement et d’instauration de la charia. J’avoue ne pas avoir été convaincu par la démonstration moi qui continue d’être un enfant de l’apôtre Paul, lui qui écrivait dans Galates 3-28 : « Il n’y a plus ni Juif ni païen, il n’y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n’y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » Mais j’estime que chacun a le droit d’avoir son opinion en fonction de son vécu, de ses peurs, de ses espérances et qu’il est indigne de vouloir faire taire une personne au prétexte que son opinion est contraire à la mienne. Il faut souligner que Battini réfute toute idée racialiste et met à l’honneur son grand-père, un Berbère arabisé qui combattit les nazis, prit un prénom français et adopta la religion catholique. Pour lui, la question est celle de la civilisation et il rejoint l’idée fondamentale de Samuel Huttington exposée dans Le Choc des Civilisations à savoir la décadence de l’Occident face à un monde désormais multipolaire dans lequel le monde musulman cherche à prendre une place perdue autrefois. Selon lui, c’est même la raison de sa démission de Femu. Il dresse des portraits sans pitié de Gilles Simeoni et de Jean-Baptiste Acquaviva pour qui il a travaillé et raconte la rupture quand Femu a accusé l’État d’être le responsable de l’assassinat de Colonna alors que pour lui, c’est Elong Abé et donc le djihadisme qui était à désigner. Battini décrit précisément son parcours judiciaire et fait un sort à la rumeur qui l’accuse d’avoir donné ses compagnons, démontrant que ce sont ses accusateurs qui ont cherché à tout prix à s’en sortir au mieux. Il donne des noms. J’ajouterai à titre personnel que j’ai vérifié ses dires. Ils sont parfaitement conformes à la réalité.
L’identité à l’honneur
Mais le sujet de Battini est l’identité corse. Il condamne l’idée de communauté de destin sans parvenir à convaincre. Mais il est cohérent. Maurassien en diable, il affirme que les deux piliers de l’identité sont la terre et la foi. Maurassien, mais aussi gramciste, il place la superstructure, la culture, le psychisme au-dessus de l’économie bien qu’il s’affirme libéral. Alors que dire ? L’écriture est belle et fluide. Il manque néanmoins une dimension réellement spirituelle et planétaire à sa pensée. Je ne pense pas qu’il faille confondre la spiritualité, c’est-à-dire la foi en une transcendance et la religion qui peut n’être que culturelle. Le deuxième reproche est de ne pas intégrer le phénomène corse dans une dimension historique autre qu’apologétique. Battini écrit combien il a été marqué par les grands personnages de notre histoire — Sampiero, Paoli, Napoléon—, mais il n’analyse pas la relation conflictuelle qui a fait naître ces individus en Corse pour ensuite subir une défaite définitive. Quelle est la funeste mécanique qui permet à de tels hommes de grandir puis d’être chassés (ou assassiné) dans ce confetti îlien ? Enfin, comment le phénomène identitaire corse s’inscrit-il dans un processus plus global. Mais cessons de barguigner. Le sursaut corse est un ouvrage rare qui permet enfin de parler de l’essentiel et il faut le lire. Il sera condamné sans même être ouvert par les bonnes âmes qui n’ont pas compris que le dialogue est la seule façon d’emporter une victoire. Gageons simplement que Battini et son mouvement auront à cœur de repousser toute forme de racisme ou de xénophobie.
GXC
Le Sursaut Corse, Nicolas Battini, éd. L'Artilleur, 202