Encore une minute, Monsieur le bourreau
L'étau se resserre pour le Président de la République française........
Encore une minute, Monsieur le bourreau
Le 8 décembre 1793, place de la Nation, la comtesse du Barry, ancienne favorite du roi Louis XV, monte à l’échafaud, condamnée à mort pour intelligence avec l’ennemi. Elle est couchée sur la planche quand elle relève la tête et aurait murmuré : « Encore une minute, Monsieur le bourreau. » Aujourd’hui, c’est Emmanuel Macron, président de la République française, qui donne le sentiment de vivre un tel désespoir il a beau se débattre, changer de Premier ministre, le moment fatal semble se préciser. Sa dernière trouvaille est l’usage du référendum, un outil dangereux à manier et que le général De Gaulle paya de sa démission.
L’étau se resserre
Jean-Luc Mélenchon a fait le pari que le gouvernement Bayrou ne dépassera pas le 16 janvier, un mois qui là encore en 1793 fut fatal à Louis XVI, monarque charmant, mais qui n’avait pas compris combien il est inutile de passer pour un être doux et un grand démocrate quand le peuple gronde. Il faut montrer de l’autorité ou l’emmener avec soi dans ses rêves de grandeur. C’est ainsi qu’a agi De Gaulle en 1945 puis en 1958 avant d’abandonner quand il s’est senti dépassé par la marche des évènements mondiaux. Emmanuel Macron comme avant lui François Hollande et Nicolas Sarkozy n’ont jamais porté un dessein national. Tout au plus se sont-ils alignés sur une ligne générale tracée par les États-Unis d’un côté, la Russie poutinienne de l’autre. La France, pays capitaliste d’état, n’a plus les clefs pour comprendre un monde désarticulé dirigé par les appétits de la finance. Elle ne cesse d’en appeler aux bons sentiments des peuples et la voilà qui, à bout de souffle, se voit proposer comme remède ultime la voie référendaire. L’étau se resserre et la classe dirigeante ne sait plus où donner de la tête.
Un outil dangereux
La voie référendaire est dans un pays tumultueux comme la France une voie sans issue dont le résultat sera au mieux neutralisé comme ce fut le cas pour celui qui refusa Maëstricht pour être ensuite contourné, au pire un facteur de fascisation de la société. Il est basé sur un postulat qui est celui de la démocratie : le peuple est sage. Si tel était le cas, cela se saurait et les politiques n’auraient pas besoin de vendre des mensonges lors des campagnes électorales. La première des incongruités est le présupposé selon lequel une masse d’êtres humains posséderaient les réponses à toutes les énigmes posées par l’existence, par la marche de l’histoire. Ensuite, le référendum suppose que le peuple est capable dans sa majorité d’apporter des solutions simples à des problèmes d’une complexité inouïe et qui comme une fractale se déploient à l’infini. Enfin, un référendum impose que la majorité émette un avis définitivement accepté par la minorité. Or le concept de peuple est une image abstraite dont on ne sait très bien si elle est dessinée par les frontières, le relief, une culture ou une langue commune. La réalité la plus basique nous apprend que la démocratie fonctionne quand une société est hiérarchisée et que chaque classe sociale a le sentiment d’avoir obtenu ce qui lui permettait de vivre à peu près décemment. Qu’une crise survienne atteignant essentiellement la classe moyenne, celle qui possède la capacité d’espérer une rapide promotion et la crise économique se transforme en crise sociale puis en crise de régime. Jamais de pareilles périodes n’ont accouché de projets généreux. C’est l’instant du chacun pour soi avec si possible la recherche désespérée de boucs émissaires.
Si le peuple avait voté…
La condition sine qua non pour qu’un référendum possède une quelconque efficacité est la valeur de la question posée et sa pertinence. Demandez aux Français angoissés par le monde tel qu’il va, s’ils veulent un retour à la peine de mort. Malheureusement, le résultat positif ne fait aucun doute. Ils voteront pour la retraite à cinquante et l’augmentation du SMIC à 2000 euros sans hésiter. Et qu’importent les conséquences désastreuses ! Le référendum n’a d’utilité que sur des sujets mineurs et localisés. Et encore… Si le peuple avait voté sous Pétain, il aurait plébiscité le Maréchal. L’une des causes de la chute de Gorbatchev a été sa campagne contre l’alcool alors que le peuple désirait que la vodka continue d’inonder le marché. Les plus grands dictateurs de Staline à Hitler auraient remporté haut la main tous les référendums. La vérité est qu’un pays, un peuple a besoin de femmes et d’hommes qui donnent le sentiment de posséder une boussole et d’être capable d’imposer une certaine justice sociale. Sans eux, tous les référendums du monde ne changeront rien au destin d’Emmanuel Macron, président d’aventure, devenu le portier d’une France extrémiste. Car au bout du compte, ne nous leurrons pas, le peuple aura à choisir entre le RN, Bardella ou Marine Le Pen qu’importe et un Jean-Luc Mélenchon, un hybride d’un Trotsky décadent et d’un Néron chantant sa propre gloire devant Rome en feu. Alors oui encore une minute, Monsieur le bourreau.
GXC
Photo : D.R