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COVID -19 : Les conséquences psychologiques de l'épidémie

Contrairement aux idées reçues, les répercussions psychologiques du virus ne touchent pas uniquement les plus faibles.
COVID-19 : Les conséquences psychologiques de l’épidémie

Contrairement aux idées reçues, les répercussions psychologiques du virus ne touchent pas uniquement les plus faibles. La deuxième vague de l’épidémie et le reconfinement ont mis en lumière de nouvelles catégories d’individus psychologiquement atteints.


Les angoisses n’épargnent personne. Et le second confinement l’a bien démontré. « Nous avons été sollicités par des individus lambdas, qui n’ont jamais eu de problèmes de leur vie et qui ont eux-même été très surpris des effets que la crise a sur eux. Ils sont d’ailleurs plus exigeants que nos patients habituels car la réalité des problèmes psychiques et des prises en charge leur est totalement inconnu », décrypte Marie Hélène Cattino, médecin psychiatre au centre hospitalier de Castelucciu à Ajaccio.

Ces répercussions se traduisent sous différentes formes, plus ou moins importantes. « En général, ce sont des grosses crises d’angoisse, des troubles du sommeil, voire des aspects plus traumatiques qui peuvent éveiller de la paranoïa. » Les problèmes financiers sont également une source d’angoisse très présente. « La problématique économique qui touche de nombreuses personnes est également non négligeable. Certains sont aux aboies, sans rentrées d’argent. »

L’angoisse d’un futur incertain

Pour les jeunes,
la période est également difficile à vivre. « Avoir 20 ans en ce moment est très compliqué », concède la psychiatre.
Évidemment, cette incertitude grandissante à propos de l’avenir ne touche pas exclusivement les jeunes. « L’angoisse liée au fait qu’on ne sait pas quand est ce qu’on va s’en sortir touche l’ensemble de la population. On se dit que rien ne sera plus comme avant. L’absence de réconfort familial causée par l’interdiction des rassemblements a un gros impact sur le mental, notamment pour les personnes âgées qui sont en très grande souffrance. »

Si les atteintes psychologiques sont plus denses que lors de la première vague, c’est que la situation sociale s’est elle aussi transformée. « Lors du premier confinement, nous avions tous peur et nous nous sentions tous au même niveau. Il y avait une forme de solidarité.
Dorénavant, les gens sont plus frileux, il n’y a plus personne au balcon et des raccourcis sont faits. Les soignants sont presque responsables de la situation, du confinement, du couvre-feu. Ça a cassé cette belle solidarité et ce sentiment d’être unis contre en ennemi invisible mais unique.
»

                                               « cette situation d’urgence, de par sa durée, n’est plus exceptionnelle »

Le corps médical n’est évidemment pas exempté de cette atmosphère anxiogène. « On a une double, voire une triple charge de travail. Nous n’avons plus de répit. C’est un bouleversement à tous les niveaux, pour tout le monde.» Un bouleversement qui se prolonge, sans date de sortie. « La France entière est en plan blanc.
C’est l’urgence qui prime, et cette situation implique le recrutement d’autres soignants pouvant être opérationnels. Cette situation d’urgence, de par sa durée, n’est plus exceptionnelle et donne lieu à un réel épuisement.
» Cependant, ce débordement et cette surcharge de travail ne doivent pas laisser penser qu’une consultation n’est pas essentielle. « Si une personne a des symptômes tels que l’irritabilité, si elle ne se reconnait plus et qu’elle s’estime incapable de faire face à tout ça : il faut consulter. »


Le mal-être des enfants et adolescents

Si la première vague de l’épidémie et le premier confinement semblent les avoir quelque peu épargné psychologiquement, les plus jeunes apparaissent désormais comme les nouvelles victimes de cette crise mondiale.

« De nouvelles demandes de la part d’enfants et d’adolescents ont fait leur apparition », affirme Nathalie Nobili Pieri, pédopsychiatre au centre hospitalier de Castelucciu. « Nous avons fait face à une augmentation de prise en charge hospitalière pour des patients adolescents qui ont décompensé. »
Une recrudescence de troubles anxieux et de syndromes dépressifs aussi bien chez l’enfant que chez l’ado : « Au niveau scolaire, les enfants ont décroché et ont repris le chemin de l’école avec angoisse. Ces difficultés ont entrainé des troubles anxieux et un sentiment de dévalorisation. » Mais aussi des « tentatives de suicide » et des « scarifications » qui ont entrainé des répercussions au sein-même des familles de ces jeunes car « l’enfant est l’indicateur familial » : « Les repères ont changé. On a enlevé leurs grands-parents aux enfants, privé les ado de leurs copains, entrainant une profonde déstabilisation. »

Toutefois, il est primordial de garder espoir et de ne pas s’enfermer dans une spirale d’ondes négatives, quitte à tenter de déceler le côté « positif » de cette crise sans précédent : « La réorganisation et la créativité dont il a fallu faire preuve ont conduit à la mise en place d’outils positifs qui vont perdurer et se développer, tels que la télémédecine », analyse Marie-Hélène Cattino, avant de laisser entrevoir une lueur d’espoir concernant le futur de notre société : « La perte de confiance envers l’État va peut-être donner lieu à l’émergence d’actions citoyennes solidaires. Il serait bénéfique que les gens comprennent que l’aide ne doit pas seulement venir d’en haut et que nous devons tous y participer collectivement, chacun à notre échelle. »
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