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Transport ferroviaire : Il était une fois rien ou presque ...

Quelques progrès ont été réalisés concernant le péri-urbain et la clientèle a suivi. En revanche, plus personne n’évoque vraiment la conquête du Sud.
Transport ferroviaire : Il était une fois rien ou presque…
Quelques progrès ont été réalisés concernant le péri-urbain et la clientèle a suivi. En revanche, plus personne n’évoque vraiment la conquête du Sud.

La Chambre Régionale des Comptes de la Corse a sévèrement critiqué l’exercice par la Collectivité de Corse de la compétence Transports ferroviaires
.

Ses conclusions ont cependant été vivement contestées par la majorité territoriale. Gilles Simeoni a dénoncé la partialité de l’auditrice qui a conduit le contrôle.
Qui a raison ? Qui a tort ? A vrai dire, je m’en fiche un peu. Dans les rapports des Chambres Régionales des Comptes, tout comme d’ailleurs dans les rapports d’audit réalisés par des « experts indépendants », on trouve toujours matière à accable, critiquer, pinailler, excuser ou féliciter.
De plus, leurs conclusions sont comme les phalènes confrontées à la chaleur de la lampe, elles sont consumées dès qu’elles sont prises dans les feux croisés de la polémique.
Enfin ces rapports finissent très vite dans un placard ou en haut d’un étagère avec pour seule perspective d’être couverts à jamais de poussière.

En revanche, je suis consternée par le constat que le projet de réouverture du tronçon ferroviaire Casamozza-Folelli est en panne. Cela n’est pas une bonne nouvelle pour la Corse. D’abord parce que développer le transport ferroviaire sur ce tracé représenterait une véritable rupture avec les logiques corporatistes et individualistes du transport routier, du tout-automobile et de la distribution de carburants qui, depuis 1945, prévalent chez nous.

En effet, si le train ne dessert plus la Plaine orientale, l’armée allemande qui a saboté le réseau en 1943, n’est pas seule à porter une écrasante responsabilité. La voie ferrée de Casamozza à Porto-Vecchio a été définitivement fermée par ce que les secteurs professionnels cités plus hauts ont, entre 1945 et 1960, persuadé l’État et la plupart des élus d’oublier le train.
Ils sont d’ailleurs failli obtenir la fermeture de l’actuel réseau (Ajaccio/Bastia, Ponte-Leccia/Balagne) et le train n’a dû son salut au début des années 1960 qu’à une formidable mobilisation populaire.

N’est pas Morton qui veut…

Il a fallu attendre 40 ans pour qu’un effort réel en faveur du transport ferroviaire soit entrepris.
Au début de années 2000, la Collectivité Territoriale a fait moderniser une partie des voies, restaurer des bâtiments d’exploitation et acheter du matériel roulant. Cette modernisation a été opérée dans la douleur malgré l’apport financier du PEI (Programme exceptionnel d’investissement). Il aura fallu l’arrivée de Paul Giacobbi aux commandes de la Collectivité Territoriale en 2010 pour qu’entrent en service des rames véritablement modernes. Paul Giacobbi et ses amis, et plus particulièrement les conseillers territoriaux communistes, ont aussi eu aussi le mérite d’œuvrer pour relancer l’offre de service pour les étudiants, les touristes et les habitants des péri-urbains bastiais et ajaccien.

Mais chacun sait que tout cela n’a pu et ne peut suffire à rentabiliser la gestion du train ou même à équilibrer les comptes. En 2015, on a pu espérer qu’un nouvel élan serait donné au transport ferroviaire avec l’annonce de vouloir jouer à fond la carte du péri-urbain et de mettre le cap au Sud depuis Bastia pour créer un axe économique structurant selon une volonté de développement durable.

Quelques progrès ont été réalisés concernant le péri-urbain et la clientèle a suivi.
En revanche, plus personne n’évoque vraiment la conquête du Sud. Les études de faisabilité qui ont été réalisées, les quatre scenarii de tracé et le financement qui avait été évalué entre 40 et 50 millions d’euros semblent être passés à la trappe. Cette conquête n’est plus sortie de l’oubli que pour se moquer gentiment, sur les réseaux sociaux, du président des Chemin de Fer de la Corse qui, en 2015, avaient imprudemment claironné : « Le train ira jusqu'à Folelli d'ici deux ans ».

N’est pas Morton qui veut. Pour les non cinéphiles ou ceux qui ont oublié, je précise qu’il s’agit du magnat aux jambes mortes qui, dans « Il était une fois dans l’Ouest », s’employait, certes avec des moyens contestables, à relier au plus vite les Océans Atlantique et pacifique avec sa ligne de chemin de fer.

Alexandra Sereni
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