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Territoriales : ça va chauffer, priorité à l'eau

Améliorer la gestion de la ressouce hydrique doit être la grande priorité programmatique .....
Territoriales : ça va chauffer, priorité à l’eau !


Améliorer la gestion de la ressource hydrique doit être la grande priorité programmatique, du moins pour ce qui concerne les investissements, des listes qui seront en lice en juin prochain.


A l’occasion du scrutin territorial qui aura lieu dans deux mois, les différentes listes composeront avec les sollicitations de leurs partisans et les revendications des représentants d’intérêts locaux, sectoriels ou particuliers. Ce qui les conduira à intégrer dans leurs programmes des thématiques bien connues dont certaines font débat depuis des décennies : évolutions institutionnelles, libération des prisonniers, coofficialité de la langue corse, spéculation foncière, bétonisation, revitalisation de l’intérieur, relance de l’agriculture, statut de résident, fiscalité dérogatoire, transports aérien et maritime, Diaspora, déchets, réalisation d’équipements destinés aux loisirs ou à l’attractivité touristique, soutien aux entreprises ou aux porteurs de projets, aide aux communes, action culturelle, réseau routier, sauvegarde du patrimoine, logement social...

Ces thématiques sont d’un grand intérêt et susciteront probablement, quand la campagne aura vraiment débuté, des discours passionnés, de formidables philippiques et d’épiques passe d’armes. Une fois le scrutin passé, les vainqueurs devront bien entendu s’employer à satisfaire les soutiens partisans ou intéressés leur ayant permis de l’emporter et auront aussi à cœur de réaliser des projets liés aux thématiques qu’ils auront mises en avant. Voilà qui demandera de l’argent public, beaucoup d’argent public. Mais le mobiliser ou le capter sera difficile. Les budgets de l’État et des collectivités territoriales seront durant plusieurs années affectés par les effets de la crise sanitaire. L’obtention de fonds européens sera de plus en plus âprement disputée. Quant au contribuable qui croule sous le poids d’une fiscalité locale de plus en plus lourde et en vient à penser que le pendant de la décentralisation est le « matraquage fiscal », il sera de moins en moins disposé à consentir un « effort fiscal ».


Une thématique « peu sexy »

Tout cela risque de faire passer au second plan une thématique « peu sexy » mais dont le traitement ne peut souffrir le moindre retard : mieux gérer la ressource hydrique pour limiter les effets désastreux du réchauffement climatique. Cette gestion relève bien de l’urgence absolue car, pour reprendre l’expression imagée de l’ancien président de la République Jacques Chirac lors du 4ème Sommet de la Terre (septembre 2002, Johannesburg), il est évident que « notre maison brûle ».
Partout dans le monde les signes se multiplient : régression des grands glaciers, fonte des banquises arctique et antarctique, dégel du permafrost en Sibérie, multiplication de violents incendies de végétation en Australie et aux Amériques… Certes moins spectaculaire chez nous, l’incendie y sévit cependant déjà et les perspectives sont loin d’être engageantes.

Comme dans la plupart des autres régions méditerranéennes, les températures moyennes ont augmenté de près de 2 degrés. Les températures estivales diurnes grimpent jusqu’à 45 degrés dans plusieurs micro-régions. Les épisodes caniculaires sont de plus en plus fréquents. Les précipitations sont moins importantes. Les sécheresses hivernales locales deviennent des épisodes climatiques courants. L'érosion d’importantes portions du littoral provoquée par la montée du niveau de la mer est manifeste.
Plusieurs cours d’eau sont aujourd’hui davantage des oueds que des cours d’eau. Et cela ne devrait pas s’arranger de sitôt ! A l’horizon 2050, les modèles climatiques prévoient une hausse moyenne des températures de 3 à 5 degrés. Dans le plus optimiste des scenarii de Météo France, le nombre de jours de vagues de chaleur doublerait d’ici la fin du siècle.
Dans l’arc méditerranéen donc aussi chez nous, dans une ou deux décennies, les canicules pourraient, entre juin et septembre, durer au total un à deux mois.



Outil stratégique disponible

Une inversion de tendance n’est pas pour demain. Les grands confinements de l’an passé pour freiner la propagation de la Covid-19 et le ralentissement de l’activité économique à l’échelle mondiale en ayant découlé n’ont pas permis d’améliorer les choses. Les niveaux de présence dans l’atmosphère des gaz à effet de serre ont quasiment perduré. Ceci suggère que le réchauffement climatique va durer et même s’accentuer.
Il est donc essentiel qu’améliorer la gestion de la ressource hydrique soit la grande priorité programmatique, du moins pour ce qui concerne les investissements, des listes qui seront en lice en juin prochain.
Les conditions pour aller en ce sens sont d’ailleurs réunies. D’abord, avec le Schéma d’aménagement hydraulique Acqua Nostra 2050 dont elle s’est dotée, la Collectivité de Corse dispose d’un outil stratégique indiquant les grands travaux à réaliser jusqu’en 2050 pour sécuriser la ressource, alimenter régulièrement les territoires, augmenter les capacités de stockage, structurer le transfert de la ressource.
Ensuite la stratégie est partagée car Acqua Nostra 2050 a été adopté à l’unanimité à l’Assemblée de Corse après avoir été élaboré à partir de la volonté politique de Saveriu Luciani, conseiller exécutif, et président de l’Office d’équipement Hydraulique de la Corse (OEHC), des compétences des personnels de l’Office et de la consultation de nombreux acteurs.

Enfin l’OEHC a commencé à réaliser Acqua Nostra 2050. D’une part en débitant la construction de « routes de l’eau » (possibilité de transférer la ressource selon les besoins hydriques). D’autre part en programmant, dans le cadre de travaux de remise en conformité, la rehausse de certains barrages afin d’augmenter les capacités de stockage (1 million à 1,5 million m³ pour respectivement les ouvrages Alisgianu, Codole et Figari).
C’est donc bien parti ! Durant la prochaine mandature, il faudra cependant impérativement dégager un consensus afin de mobiliser les financements indispensables pour aller encore de l’avant (au moins 600 M€ étant nécessaires à terme). Réaliser Acqua Nostra 2050 représente un passage difficile mais obligé car rien ne peut se faire sans eau.


Pierre Corsi

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