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Les Services spéciaux & la Corse : un nouveau tournant

L'aanonce officielle de la création d'un emploi à la Direction générale de la sécurité intérieure DGSI consacré au "séparatisme corse" réveille dans l'île d'inquiétants échos.
Les Services spéciaux & la Corse : un nouveau tournant

L’annonce officielle de la création d’un emploi à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) consacré au « séparatisme corse » réveille dans l’île d’inquiétants échos.

La Corse a vu, depuis la seconde moitié du XXe siècle, une implantation massive des Services spéciaux. Ils se sont manifestés notamment durant la guerre d’Algérie, en lien avec l’OTAN, pour orchestrer en 1958 un putsch au bénéfice des tenants colonialistes de l’Algérie française (cf. opération Résurrection).


À partir des années 70, ces services spéciaux ont été réactivés dans le cadre d’attentats anti-autonomistes et anti-nationalistes, fomentés en liaison avec certains préfets, sous l’égide du SAC, le Service d’action civique. Ils étaient perpétrés par son officine locale, Francia, dont les exactions ont provoqué l’affaire Bastelica-Fesch en 1980. Suite à une enquête parlementaire menée par le premier gouvernement socialiste, cette officine ainsi que le SAC ont été dissous en 1982.

Témoignage d’un ancrage très fort en Corse des services spéciaux même sous l’ère Mitterrand, c’est dans l’île qu’étaient basés l’unité des nageurs de combats qui se sont illustrés dans l’attentat contre le Rainbow Warrior. Cette opération contre le navire écologiste de Greenpeace en Australie, en 1985, s’était soldée par un mort.


L’époque du préfet Bonnet, qui s’est ouverte en 1998, a vu refleurir des pratiques barbouzardes en Corse. Aujourd’hui, à l’heure où les Services spéciaux sont entrés eux aussi dans l’ère de la Communication, des accents identiques à la prose barbouzarde affleurent dans l’annonce de la création d’un poste à la DGSI consacré au « contre-terrorisme » dans l’île. Pour de nombreux observateurs, cette information laisse augurer d’inquiétants lendemains.


Retour sur l’affaire des paillotes

Le 9 avril 1999, Bernard Bonnet, souhaitant mettre un terme à l'installation illégale de paillotes sur le domaine public maritime, fait intervenir des bulldozers pour démolir deux établissements de la plage de Mare e Sole dans le golfe d'Ajaccio. Des manifestants s’interposent. José Rossi, alors Président de l’Assemblée de Corse, apporte lui aussi son soutien aux paillotiers. Yves Féraud, propriétaire de la paillote Chez Francis, organise le blocage du port d’Ajaccio. Bernard Bonnet accepte de suspendre les destructions en échange de la promesse écrite de huit des propriétaires de raser eux-mêmes leurs constructions après la saison. Dix jours plus tard, au milieu de la nuit, la paillote Chez Francis est ravagée par les flammes.


Alertée, la gendarmerie de Pietrosella retrouve sur place des tracts « Féraud, balance des flics », laissés pour faire croire à un règlement de comptes. Les militaires de la section de recherche d'Ajaccio découvriront plusieurs objets contredisant cette thèse, parmi lesquels une cagoule de gendarmerie et un « Corail », appareil radio réglé sur la fréquence du GPS. Le Groupe de pelotons de sécurité, escadron d’élite de la gendarmerie ayant pour missions les opérations de renseignement, les interventions discrètes et la lutte contre le terrorisme, sera très vite mis en cause. Bernard Bonnet, reconnu comme l'instigateur des faits, sera condamné le 11 janvier 2002 à trois ans de prison, dont un ferme et trois ans de privation de ses droits civiques et civils.

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