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Processus Darmanin : Laurent Marcangeli dans les pas de José Rossi ?

Laurent Marcangeli a d'importantes cartes en mains pour servir son camp mais aussi la Corse, ...

Processus Darmanin : Laurent Marcangeli dans les pas de José Rossi ?

Laurent Marcangeli a d’importantes cartes en mains pour servir son camp mais aussi la Corse, et ainsi égaler ou dépasser ce qu’avait réalisé José Rossi durant les années 1990. A lui de jouer...



Laurent Marcangeli a tenu son pari. Il a été élu député. Il ne l’a certes été qu’avec 51,76% des suffrages exprimés. Mais ayant été arrachée dans un contexte peu favorable (sous les couleurs d’un parti soutenant Emmanuel Macron, face à un candidat de la majorité territoriale siméoniste qui avait reçu au second tour le soutien du centre gauche et de la plupart des mouvements nationalistes), la victoire n’en n’a été que plus belle pour celui qui avait affirmé être le seul à pouvoir empêcher les nationalistes de réaliser le grand chelem (l’emporter dans les quatre circonscriptions de Corse). Elle est d’autant plus belle qu’elle ouvre à l’intéressé une nouvelle perspective : son parcours politique va emprunter une route nationale sans qu’il doive pour autant tirer un trait sur Aiacciu et la Corse.
Pour être en conformité avec le non-cumul, Laurent Marcangeli va certes renoncer aux mandats de maire, de président de la Communauté d’Agglomération du Pays ajaccien, de conseiller territorial et de président du principal groupe d’opposition à l’Assemblée de Corse (Un soffiu novu). Mais il n’en restera pas moins un acteur majeur de la vie politique corse. Demeurant conseiller municipal et avec le maintien en place d’Antoine Maestrali (directeur de Cabinet du maire d’Aiacciu, par ailleurs référent d’Horizons pour la Corse-du-Sud), il pourra à tout moment avoir connaissance des dossiers concernant Aiacciu et le Pays ajaccien ainsi que des évolutions de la vie politique corse. Etant un parlementaire influent, il sera en mesure de défendre les intérêts collectifs de la Corse et quelques intérêts particulier, et surtout de ne pas laisser le monopole de la parole, de la proposition concrète et du compte-rendu à Gilles Simeoni durant le processus Darmanin qui débutera dans quelques jours. Le président du Conseil exécutif va en effet devoir compter avec le nouveau parlementaire car ce dernier va peser lourd. Très lourd.


Un poids politique plus que significatif


Laurent Marcangeli a acquis une dimension autre que celle qui était la sienne quant il avait été élu député en 2012 : il est en effet bien plus qu’un des 577 membres de l'Assemblée nationale. Il appartient au premier cercle des partisans de l’ancien Premier ministre Edouard Philippe dont les ambitions d’accéder à la présidence de la République en 2027 sont un secret de Polichinelle et dont les chances de réaliser ce dessein sont réelles. Il est membre du groupe parlementaire Horizons qui est une composante indispensable de la majorité relative macronienne à l’Assemblée Nationale. Sauf large consensus, aucun texte ne pourra être adopté sans les votes des 29 députés de ce groupe. Enfin, il vient d’être élu, à l’unanimité, à la présidence de ce groupe.
Laurent Marcangeli est donc désormais un des hommes-clés de la droite dans les cercles de pouvoir. Il a en effet pour mission globale de veiller à la cohésion du groupe parlementaire Horizons ; d’arrondir les angles entre les députés Horizons « loyaux » mais « libres » qui appartiennent à la majorité macronienne et les députés Renaissance (ex-La République En Marche) affichant être « fidèles » au Président de la République ; de travailler à la « grande coalition » de gouvernement qu'appelle de ses vœux Edouard Philippe qui pourrait notamment comprendre Les Républicains et des députés de gauche ou écologistes ne se reconnaissant pas ou plus dans la NUPES (Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale). Ce poids politique à l’échelle nationale fera évidement de Laurent Marcangeli un interlocuteur qui aura plus que son mot à dire durant le processus Darmanin.
Sa présence et son envergure feront que Gilles Simeoni devra composer avec d’autres convictions que celles du camp nationaliste pour que la Corse fasse front commun. Cette présence et cette envergure auront aussi pour effet, à l’Assemblée Nationale, de relativiser le lobbying des trois députés nationalistes, même s’il est donné une suite à ce qu’avait été le groupe Libertés et Territoires.


Toutes les carte en mains pour servir la Corse


Laurent Marcangeli a d’importantes cartes en mains pour servir son camp mais aussi la Corse, et ainsi égaler ou dépasser ce qu’avait réalisé José Rossi durant les années 1990. Celui-ci a su concilier d’une part, sa position d’acteur majeur de la droite centriste et libérale en Corse (mandats de maire, conseiller général, conseiller à l'Assemblée de Corse, président du Conseil général de la Corse-du-Sud, président de l'Assemblée de Corse) et à Paris (ancien membre de cabinets ministériels, député, président du groupe parlementaire Démocratie libérale à l'Assemblée nationale auquel il appartenait, ministre) ; d’autre part, sa prise de conscience qu’il était nécessaire d’être à l’écoute de la revendication nationaliste et de faire évoluer les institutions de la Corse.
José Rossi a su aller dans le sens d’une reconnaissance de la spécificité de la Corse au sein de la République en osant par deux fois s’opposer à une grande partie de la droite corse qui préconisait l’immobilisme. Au début des années 1990, Il a été le rapporteur du projet de loi relatif au statut de la Corse (statut Joxe Joxe) ayant porté création de la Collectivité territoriale de Corse. A la fin des années 1990, lors du « Processus de Matignon» (voir encadré), il a été favorable à la possibilité d'adapter les textes réglementaires nationaux aux réalités de l'île et à celle de déroger à des dispositions législatives nationales. Par ailleurs, en 2003, alors que la droite corse soutenait la réponse positive comme la corde soutient le pendu, José Rossi s’est investi pour le OUI lors de la consultation populaire sur la réforme institutionnelle en Corse qui prévoyait notamment une extension des compétences de la Collectivité Territoriale et la création d’une Collectivité unique (fusion des Conseils généraux et de la Collectivité territoriale).

Pierre Corsi


                               Le Processus de Matignon

- Décembre 1999 : Lionel Jospin invite les élus corses à Matignon pour participer à un dialogue « sans aucun tabou » entre eux et avec l’Etat. Il leur est proposé de s’impliquer dans un processus de réflexion et de débat devant aboutir à des propositions qui permettront d’apporter une solution globale aux problèmes de la Corse.

- Décembre 1999 - Mars 2020 : deux tendances se dessinent. La première, conduite par José Rossi président de l’Assemblée de Corse, le radical de gauche Paul Giacobbi, Jean-Guy Talamoni (Corsica Nazione) et Laurent Croce (Parti Socialiste de Haute-Corse), préconise qu’une réforme constitutionnelle aille jusqu’à instaurer « un pouvoir législatif pour la Corse et la reconnaissance d'une communauté insulaire ». La deuxième, sous la houlette de Jean Baggioni, président du Conseil exécutif soutenu par la majorité des élus territoriaux de droite, le radical de gauche Émile Zuccarellialors ministre, et Simon Renucci, leaders de la gauche corse, s’oppose à une évolution institutionnelle trop poussée.

- Mars 2000 : après d'interminables tractations et interventions musclées, la motion soutenue Baggioni-Zuccarelli-Renucci l’emporte de peu à l’assemblée de Corse. Lionel Jospin que décide toutes les propositions seront étudiées et débattues afin que se dessine un consensus.

- Mai à juillet 2000 : les élus corses de tous bords se retrouvent hebdomadairement face aux représentants du gouvernements.

- 20 Juillet 2000 : un texte commun est rendu public. Il prévoit d'importants transferts de compétences à la Collectivité Territoriale de Corse dont la possibilité d'adapter les textes réglementaires nationaux aux réalités de l'île, et celle de déroger à certaines dispositions législatives.

- 28 juillet 2020 : l'Assemblée de Corse adopte le texte commun à une très large majorité.

14 février 2001 : un projet de loi reprenant le texte commun voit le jour.

17 janvier 2002 : le Conseil constitutionnel rejette la disposition d’avent permettre de déroger à certaines dispositions législatives.

Juillet 2003 : une consultation populaire rejette le projet de loi.




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