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Catalunya : triste 11 septembre

Etalage de divergences stratégiques et de querelles partisanes

Catalogne : triste 11 septembre



La célébration de Fête nationale qui a été un moment fort de l’unité du peuple catalan durant plus d’un siècle et particulièrement durant la période franquiste, donne cette année lieu à l’étalage de divergences stratégiques et de querelles partisanes au sein de la mouvance indépendantiste.


Le Président de la Generalitat de Catalunya a décidé de ne pas participer à la célébration de La Diada (Fête nationale catalane) qui, chaque 11 septembre, rassemble des centaines de milliers d’indépendantistes dans les rues de Barcelone. Il reproche à l'Assemblea Nacional Catalana (organisation populaire, unitaire et plurielle qui a pour but de participer à l’accession de la Catalogne à l’indépendance politique) qui organise l’événement, de critiquer ouvertement sa politique. Ce qui est vrai. L’Assemblea Nacional Catalana affirme que Pere Aragones et son parti (Esquerra Republicana de Catalunya) - en dialoguant avec Madrid sans perspective lisible d’avancées politiques (dans le cadre de la « politique de réconciliation » initiée par le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez et n’ayant à ce jour eu pour résultats que des abandons de poursuites judiciaires ou l’élargissement de quelques responsables indépendantistes), en contribuant à la survie du gouvernement Sánchez (votes des parlementaires Esquerra Republicana de Catalunya en faveur de ce gouvernement qui ne dispose que d’une majorité relative aux Cortès) et en tournant le dos aux mobilisations populaires et aux manifestations de rue - nuisent à la cause indépendantiste. L’Assemblea Nacional Catalana a bien sûr vivement condamné la décision prise par Pere Aragones et a été très loin dans la virulence.
Elle a suggéré que le Président de la Generalitat et son parti tenaient un double langage : « Nous ne comprenons pas comment le président du gouvernement de Catalogne prend une photo avec le gouvernement de Madrid et ne veut pas la prendre avec des centaines de milliers de Catalans qui réclament l’indépendance, la même chose que son parti apporte au programme électoral. »

Junts per Catalunya s’en mêle

Junts per Catalunya a apporté son soutien à l'Assemblea Nacional Catalana : « Il faut être dans la rue ». Le parti de l'ex-président de la Generalitat Carles Puigdemont espère sans doute ainsi prendre la main au sein de la base indépendantiste et inverser un rapport de force électoral qui était devenu favorable à Esquerra Republicana de Catalunya.
En effet, l’an passé, lors des élections au Parlement de Catalogne, le parti de Pere Aragones a pris le dessus. Ce qui a donné lieu à trois évolutions politiques majeures. Premièrement : Junts per Catalunya a dû céder la présidence de la Generalitat à son vainqueur.
Deuxièmement : alors que Junts per Catalunya pratiquait l’opposition frontale dans les rapports avec le gouvernement espagnol, Esquerra Republicana de Catalunya a entrepris de dialoguer et même de coopérer.
Troisièmement : Pere Aragonès fait de l’ombre à Carles Puigdemont. L’ancien président de la Generalitat pâti de l’éloignement (exil en Belgique) et se voit de plus en plus reprocher la crise provoquée par le référendum unilatéral d’autodétermination du 1er octobre 2017 dont il été l’instigateur et sa gestion improvisée voire erratique de la déclaration d’indépendance ayant suivi. Ayant l’image d’un homme neuf (il a 39 ans), modéré (il préconise et pratique le dialogue avec Madrid) et compétent (juriste sachant peser ses paroles et rompu au compromis), Pere Aragones rassure les financeurs, les investisseurs, les entrepreneurs, les classes moyennes urbaines et les résidents catalans originaires d’autres régions, séduit les médias et sait se faire ouvrir les portes des institutions internationales, de l’Union Européenne et de plusieurs chefs d’État. Junts per Catalunya espère très probablement que la décision de Pere Aragones de ne pas participer à la célébration populaire de La Diada est un premier faux-pas et que cela pèsera lors des élections municipales auront lieu l’an prochain.
Mais, en définitive, tout le monde est perdant car la célébration de Fête nationale qui a été un moment fort de l’unité du peuple catalan durant plus d’un siècle et particulièrement durant la période franquiste, donne surtout lieu cette année à l’étalage de divergences stratégiques et de querelles partisanes au sein de la mouvance indépendantiste. Triste Diada...

Alexandra Sereni

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