• Le doyen de la presse Européenne

La démocratie sans le peuple

La démocratie c'est cause toujours.......

La démocratie sans le peuple



S'il est bien un paradoxe démocratique, c'est celui qui met face à face les choix d'un peuple confronté à celui de ses dirigeants. Que de fois les résultats d'un référendum ont été infirmés par les décisions de son élite politique ? Le cas de la Corse présente une nouvelle fois une telle équation sur la place publique.


Des choix populaires violés


On se souvient du référendum de mai 2005 sur le projet de traité constitutionnel européen refusé par près de 55 % des votants et pourtant adopté en 2007. En 2016, il est demandé aux Nantais de voter pour ou contre la ZAD afin de créer un nouvel aéroport. Le résultat est négatif. Pourtant la ZAD est préservée. En 2003, les électeurs de Corse, consultés par voie référendaire sur la suppression des départements et la création d'une collectivité unique, votent non. L’article 38 de la Constitution a permis au Gouvernement de contourner le résultat négatif. Il confère en effet à celui-ci la faculté d’intervenir dans un domaine réservé au législateur, sur autorisation du Parlement, pour exécuter son programme par ordonnances. Ainsi, trois ordonnances du 21 novembre 2016, ratifiées le 7 mars 2017, ont défini le régime juridique de la Collectivité de Corse qui est entrée en fonction au 1er janvier 2018. Et tant pis pour la démocratie. Aujourd'hui, les nationalistes hurlent au scandale parce que leur projet d'autonomie n'est pas repris par le gouvernement. Outre le fait qu'ils n'avaient pas inscrit dans leur programme un projet précis, on peut remarquer qu'en 2018 ils n'avaient pas soulevé la question démocratique. Cependant, ils ont formellement raison. Il est étonnant que la démocratie ne puisse s'imposer au gouvernement.

Le peuple a-t-il nécessairement raison


Le postulat démocratique voudrait que les peuples aient raison en toute occasion. Nous savons tous que c'est faux. La notion de « peuple » est floue et en fait recoupe celui de majorité absolue ou parfois même relative. On a beaucoup glosé sur la différence entre « peuple » et « foule », le premier étant censé représenter la sagesse et l'autre la bestialité. Ce ne sont que des débats théoriques qui sont maniés selon les intérêts des uns et des autres. Mais dans le cas de la Corse, les 68 % gagnés par les différentes familles nationalistes auraient dû devenir un argument imparable pour le gouvernement. Le problème est que la question de l'autonomie a été abordée émotionnellement après les émeutes de Bastia et d'Ajaccio. Or la France est hantée par le danger de la dislocation. Son pouvoir central a toujours combattu les minorités agissantes, templiers, banquiers lombards ou juifs, protestants, parlements provinciaux etc. Les peuples possèdent une mémoire longue qui n'a rien à faire des préoccupations du moment. La France n'est pas près de changer. La vraie question est de savoir si la Corse en éprouve intimement le désir ou si elle ne s'agite pas par peur de perdre ce qu'elle possède déjà. Car enfin, la majorité nationaliste que ce soit celle de 2015 ou celle de 2021 n'a pas donné le sentiment d'être très efficace. Dans à peu près tous les domaines essentiels, elle a échoué. En ce sens on peut douter du bien-fondé non pas de l'idée de l'autonomie mais de la capacité des nationalistes à réellement en assumer les conséquences.

Reprendre tout par le début


Les nationalistes ont abordé la question de l'autonomie par le versant idéologique semblant prétendre que le jour où celle-ci serait accordée à la Corse la nuit deviendrait jour. Au vu et au su des piètres résultats obtenus dans les domaines qui étaient les leurs et qui leur étaient chers on peut sérieusement en douter. La langue corse n'est plus qu'un haillon agité pour de simples raisons électorales. Les transports prennent l'eau. Quant au petit train qui devait s'élancer vers Porto Vecchio, il n'est qu'un rêve. Les déchets s'amoncellent sans véritables solutions. L'énergie n'a trouvé de débouchés temporaires que grâce à la solidarité nationale. L'immobilier flambe depuis l'arrêt de la violence clandestine. Bref, les nationalistes n'ont à aucun moment administrer la preuve qu'ils pourraient diriger une Corse autonome. Bien au contraire. Peut-être est-il venu le moment d'interroger les artisans de l'économie corse sur les solutions qu'eux proposent sans toujours passer par ce chas d'une aiguille idéologique ? Mieux la Corse apprendra à se développer sans toujours tendre la main en direction de Paris, et plus elle sera crédible pour revendiquer une véritable autonomie. Jamais la Corse ne pourra se passer des subventions françaises ou européennes. Prétendre le contraire c'est mentir et promettre la lune. Mais nous pouvons faire infiniment mieux que ce que nous faisons. Mais pour cela, il faut mettre aux commandes des Corses compétents, conscients des réalités économiques et provoquer un New deal insulaire. Sans cela dans un siècle on touillera la même bouillie.

GXC
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