• Le doyen de la presse Européenne

Comme un goût d'espérance !

Je suis de ceux qui pensaient que les nationalistes l'emporteraient par défaut alors même que le bilan de leur mandature était des plus médiocres.
Comme un goût d’espérance

Je suis de ceux qui pensaient que les nationalistes l’emporteraient par défaut alors même que le bilan de leur mandature était des plus médiocres. La réussite de Gilles Simeoni (plus que celle de sa mouvance) a dessiné une Corse capable de porter un projet idéaliste et fédérateur à rebours des autres régions françaises.
Cette victoire a fait renaître une confiance en nous même si toutefois nous sommes capables de maîtriser les démons de la division qui nous travaillent de l’intérieur. Cette mandature risque d’être aussi médiocre que la précédente si la nouvelle majorité n’ose pas briser des consensus clientélaires et parfois même faire preuve d’autoritarisme quand la seule autorité ne suffira pas.

Étonnante Corse


Comme lors de la précédente élection, le coup du serment m’a paru très enfantin et peu convaincant.
La dernière fois, les élus nationalistes avaient juré sur la Giustificazione delle rivoluzione di Corsica en promettant une maison transparente comme le verre. Je ne suis pas certain que le serment ait été tenu. Mais j’ai été enthousiasmé par l’élection d’une femme à la présidence de l’Assemblée. Tout est bien entendu dans la symbolique. La charge est essentiellement représentative. Il n’y avait que Jean Guy Talamoni pour s’être cru le temps d’un mandat vizir à la place du vizir.
La désignation de Marie Antoinette Maupertuis marque une rupture, j’allais écrire civilisationnelle, pour notre société. J’ai la chance (et aujourd’hui la malchance) d’avoir connu cette Corse des villages qui sortait à peine d’une longue nuit médiévale. Je me souviens de l’électricité balbutiante, de l’arrivée de l’eau courante, du goudronnage des routes, etc., etc. Mais surtout, il me revient ces images des femmes de mon village pour la plupart enveloppées de noir de la tête aux pieds comme certaines femmes musulmanes aujourd’hui, souvent ignorées voire méprisées des hommes, parfois maltraitées.
Mon grand-père, qui avait vu le jour en 1892 à Chera, me racontait comment les mâles montaient une mule tandis qu’à côté cheminait une femme souvent chargée d’un fardeau énorme. Il se souvenait des ces bêtes de somme à visage humain portant sur leur tête des sacs de charbon de bois acheminés vers a Rundinara (trois à quatre heures de marche). Plus près de nous, je revois ces assemblées régionales entièrement masculines où la femme n’avait pas droit de cité. Je me souviens des rires moqueurs lorsque la loi sur la parité fut adoptée et des élues considérées comme des pièces rapportées. Je parle d’un temps lorsque les nationalistes eux-mêmes ne concevaient la femme que comme un objet de plaisir ou de reproduction. L’élection d’une femme au deuxième poste de la Corse est donc une belle et grande nouvelle.

Une espérance de futur


Souvent, la seule et vraie honnêteté consiste à analyser objectivement ses propres sentiments, ses propres émotions, mais surtout à ne pas les confondre avec ceux de son peuple ou de sa communauté. L’individu ignore ce que pense la multitude si tant est que celle-ci ait une conviction. J’avoue avoir en horreur ces politiciens qui, sans vergogne, vous assènent des « les Français pensent que… » « Les Corses savent bien que… ». On ne peut parler qu’en son nom avec évidemment le risque de se tromper.
Eh bien, j’avoue que l’élection de Gilles Simeoni m’amène aujourd’hui (et non pas hier) à espérer que nous allons être capables de dépasser nos tares séculaires et au contraire mettre en exergue nos nombreux talents pour enfin devenir un territoire d’expériences et d’étonnements heureux.
Les sujets prégnants sont les mêmes depuis des décennies : les déchets, l’énergie, les transports, la langue. Il est possible de trouver, sinon des solutions, du moins des chemins menant à un apaisement. Mais il va falloir accepter d’en mécontenter certains et notamment celles et ceux qui invoquent en permanence un idéal auquel s’oppose irrémédiablement le principe de réalité. Les idéalistes sont nécessaires, mais à une condition : qu’ils ne l’emportent pas. Il faut qu’ils restent des contre —pouvoirs maintenus dans certaines limites.
Il n’y a pas de ligne juste. Il y a au contraire une nécessité de pragmatisme et d’empirisme avec une loi fondamentale pour l’élu(e) politique : ne pas viser sa prochaine élection à n’importe quel prix, mais agir pour le bien commun. La majorité actuelle est on ne peut plus légitime parce que démocratique. Elle mérite d’être soutenue et aidée. Nous avons tous intérêt à ce qu’elle réussisse.

GXC
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