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Spectacle Vivu 2020 / 2021 Bastia

Théatre bastia et l Alb'Oru
Spettaculu Vivu 2020 – 2021

Coup d’envoi à Bastia


Coup d’envoi inhabituellement tôt de la saison 2020 – 2021 du théâtre et de L’Alb’Oru de Bastia. Billetterie en ligne ouverte pour faire son choix parmi 50 spectacles. Une profusion bien opportune après la diète culturelle subie à cause du confinement et du coronavirus.


Particulièrement touché par la crise sanitaire le domaine culturel dans toutes ses expressions. Bonne initiative pour redresser la barre et soutenir la culture que d’annoncer la programmation de la saison prochaine dès le mois de juillet, soit par anticipation, au lieu d’attendre septembre.

Caractéristique de la programmation annoncée : les artistes insulaires seront majoritaires que ce soit en théâtre, en musique, en danse, en cirque, en chant… Le port du masque sera imposé, le nombre de places dans les salles divisé par deux, mais musiciens et comédiens seront au rendez-vous. Des contraintes somme toute légères pour faire barrage au Covid 19 puisque concerts et pièces seront de nouveau accessibles.

Il ne faut pas se cacher que le confinement et ses répercussions sur la culture amènent à soulever bien des questions. Peut-on reconduire telles quelles nos habitudes d’avant ? Les captations vidéo, les interventions de toutes sortes des artistes sur les réseaux sociaux ont rencontré un succès évident. Cette tendance ne va-t-elle contrarier le retour du public en salles ? Interrogation valable autant pour le théâtre que pour le cinéma.

A Bastia cet été la municipalité a tenu à reconduire des spectacles de petits formats et de tonalité neuve dans quelques rues et places du centre ancien. Pourquoi ne pas étoffer et étendre dans le temps ce type d’offre de plein air dans un pays où le climat est plus que souvent clément ? N’y-a-t-il pas là des formules à inventer ?

Imagination requise également en matière d’accueil de troupes venant de l’extérieur coûteuses en cachets et en déplacements. Des efforts en matière financières sont évidemment à fournir quand la très grande qualité et la créativité exceptionnelle sont là, mais est—ce le cas de ces vedettes qui s’incrustent sur tous nos écrans – petits, moyens, grands – et qui n’apportent qu’un prestige au petit pied ! Ne faudrait-il pas privilégier les découvertes, les perles rares qui n’encombrent pas les médias conventionnels et les magazines people ! On a plus besoin d’air que de ressassement surtout dans tout ce qui touche à la culture. « Small is beautiful », cette devise des années 70 n’a rien de périmée. Elle est même plutôt oxygénante.

L’idée de Frédérique Balbinot de faire du théâtre municipal un pôle de vie (cf, interview) pour du spectacle vraiment vivant et conçu au sens large n’est-elle pas un fertile sillon à creuser pour un avenir qui ne soit pas accaparé par des menaces successives de covid et autres épidémies ?

Michèle Acquaviva-Pache


« La question que je me pose est celle du public. Aura-t-il envie de revenir en salles ? C’est la grande inconnue.»

Frédérique Balbinot, programmatrice au Spettaculu Vivu


Où en étiez-vous de votre travail de programmation de la saison 2020 - 2021 lorsque le confinement est survenu ?

Je l’avais presque terminée. Il a fallu tout reprendre, tout réagencé. Quant aux spectacles qu’on aurait dû voir pendant le confinement on les a reportés sur cette saison. C’était équilibriste, mais au final ça c’est bien goupillé puisqu’on va proposer plus cinquante spectacles en corse et en français.


Quelles ont été vos premières réactions à l’annonce de la fermeture du théâtre municipal et de L’Alb’Oru ?

Les premiers jours j’étais dans un état de sidération total. Il m’a fallu plus d’une semaine pour appeler les artistes qui auraient dû se produire. En fait, on a tous mis du temps à se remettre de cet arrêt de nos activités.


Des musiciens, des chanteurs, des comédiens privés de scènes… Leurs attitudes ?

Il a fallu qu’ils encaissent la soudaineté de la décision. Deux exemples : la résidence d’artistes prévue pour finaliser le spectacle, « Sintinelli » a été annulée peu avant son début ; le spectacle sur César Vezzani a été supprimé deux heures avant le lever de rideau ! C’était le choc. Le sentiment d’être par terre. Mais tous les artistes ont fini par s’y faire. Certains avec plus de fatalisme que d’autres… Le flou, qui entourait cette maladie nouvelle, le Covid 19, a également beaucoup pesé. On ne savait grand-chose, en mars, sur cette pandémie.


Les artistes sont en général de grand angoissés. Comment ont-ils pu être un peu rassurés ?

L’annonce par Emmanuel Macron d’une année blanche pour les intermittents les a un peu sécurisés… j’ai pu le constater chez mes amis musiciens, comédiens, techniciens. De toutes façons que pouvaient-ils faire ! Assez vite, ensuite, ce sont posés des problèmes pratiques quant aux reports de spectacles : quelles dates, quels créneaux trouver… L’important c’était de reprendre le collier pour bâtir la saison prochaine.


Et comment se profile-t-elle cette saison ?

Très peu de choses sont passées sous la table : tout a pu être reporté sauf un spectacle… La question que je me pose est celle du public. Aura-t-il envie de revenir en salles ? C’est la grande inconnue. Il y a aussi toutes les interrogations tournant autour de la distanciation physique et du comment s’en sortir avec des jauges à moitié pleines.


Les grands équilibres entre musique et comédie ont-ils pu être maintenus ?

Pour certaines pièces jouées par des théâtres parisiens, qui devaient se produire ici, elles vont être reportées à 2021 – 2022, car elles n’ont pas achevé leur saison à Paris et ne tourneront qu’après. Tel est le cas, par exemple, de la création d’Edouard Baer. En musique les concerts initialement prévus durant le confinement sont reprogrammés cette saison A retenir en outre la venue à Bastia de Rosemary Standley à la voix sans égale. A ne pas manquer non plus : « Par le bout du nez » avec Berléand et Demaison, nouvelle pièce produite par le Théâtre Antoine, « Danser le souffle » pour sa chorégraphie novatrice et l’humoriste, Haroun.


Pour pourra-t-on voir des artistes que vous vouliez inviter à Bastia depuis longtemps ?

Il y a deux ans que je veux faire venir Haroun. Car le genre de stand up qu’il pratique plait beaucoup tout en gardant une belle qualité et un regard percutant sur nos sociétés qu’il décrypte très bien. Pareil pour Sébastien Tellier dont je voulais la participation parce que j’aime sa musique électro.


Si vous aviez à faire un bilan de santé de la scène artistique corse, quel serait-il ?

Le parent pauvre c’est le théâtre en langue corse qui ne se renouvelle pas trop même si U Teatrinu a parfois un côté complètement délirant. En langue française il y a un jeune auteur qui s’est fait remarquer : Alexandre Oppecini. En musique et en chant voilà des domaines où j’ai même trop de choix ! En danse ça commence à prendre tournure.


Votre choix de pièces produites par la scène parisienne ?

Notre programmation a déjà évolué puisqu’on ne met plus à l’affiche de Théâtre de Boulevard. Personnellement j’aimerais me tourner beaucoup plus vers le théâtre public français plutôt que de proposer un certain théâtre privé parisien qui joue son va-tout sur le vedettariat au détriment du texte et de la mise en scène. Handicap ?... Le prix très élevé des spectacles qu’on fait venir de l’extérieur… Trop élevé !


Des difficultés financières ?

La municipalité a maintenu son budget. Pour une petite ville comme Bastia ce budget est conséquent : on n’a pas à se plaindre. Mais dans les conditions actuelles on sera en déficit.


Quelles répercussions aura le fonctionnement à mi-jauge des salles ?

On va perdre de l’argent… Mais le service public va être assuré.


Où en est-on en ce qui concerne les travaux à engager pour la réfection du théâtre municipal ?

Pour l’heure on n’a pas de date précise. On sait, par-contre, que ces travaux font partie des projets de la municipalité élue récemment. Le montant de ces travaux avoisinerait les 23 millions d’euros !


Avez-vous un rêve pour ce théâtre unique en Corse ?

L’état du bâtiment est préoccupant. Il faut prendre conscience qu’il doit être rénové. Ce bel outi,l il faut aussi en faire un lieu de vie qui vit toute la journée, du matin à la nuit.

Propos recueillis par M.A-P
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