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2022 : Les deux fers au feu de Gilles Simeoni

Si. Yannick Jadot était élu, Gilles Siméoni pourrait presque s'écrier << Evviva ! >>

2022 : les deux fers au feu de Gilles Simeoni

Si Yannick Jadot était élu, Gilles Simeoni pourrait presque s’écrier « Evviva ! ». Cependant, même si cette élection est très improbable, le président du Conseil exécutif n’est pas condamné à désespérer. Il dispose d’une autre raison d’espérer : s’entendre avec Emmanuel Macron si ce dernier est réélu.



A priori, c’est écrit. A l’occasion des élections présidentielles qui auront lieu dans quelques mois, Gilles Simeoni et Femu a Corsica soutiendront Yannick Jadot, le candidat qui a dernièrement été investi par Europe Écologie Les Verts. Rien ne peut sembler plus logique et prévisible. Si l’on considère ses positionnements lors des scrutins territoriaux à l’issue desquels elle a obtenu des élus, l’écologie politique a certes paru être très proche de la Lutte de Libération Nationale.
En effet, durant les années 1990 et au début des années 2000, les écologistes Norbert Laredo, Jean-Marcel Vuillamier et Vincent Cicadda ont été élus à l’Assemblée de Corse sur des listes Corsica Nazione à forte dominante Cuncolta Naziunalista. Il ressort néanmoins que, dans la durée et sur le terrain des luttes pour la protection de l’environnement, il en a été et il en est autrement. Les autonomistes et les écologistes sont des compagnons de route depuis des décennies.
A la fin des années 1970 et au début des années 1980, au sein du Comité Anti-Vaziu, ils ont uni leurs efforts pour s’opposer à l’installation de l’actuelle usine au fioul lourd de production thermique d’électricité située à la sortie sud d’Aiacciu et promouvoir l’idée d’une autonomie énergétique de la Corse. François Alfonsi alors essentiellement connu pour son engagement dans ce combat et qui, quelques années plus tard, sera un des dirigeants de l’Unione di u Populu Corsu (UPC) qu’avait fondée Max Simeoni après les événements d’Aleria et la dissolution de l’Azzione per a Rinascita di a Corsica (ARC), et Norbert Laredo qui deviendra la personnalité la plus marquante de l’écologie politique en Corse, étaient d’ailleurs les deux principaux animateurs du Comité Anti-Vaziu.

Le compagnon de route Jadot

Outre le combat pour la protection de l’environnement, autonomistes et écologistes ont partagé le combat politique. En 1989, lors des élections européennes, Max Simeoni a figuré en bonne place sur la liste écologiste menée par Antoine Waechter et a été élu. Il a siégé au Parlement européen jusqu’en 1994. Unecertaine Marie-Antoinette Maupertuis a été son attachée parlementaire.
En 2009, ayant été intégré à la liste Europe Écologie (Sud-Est) en tant que représentant de Régions et Peuples Solidaires (RPS), fédération de partis régionalistes et autonomistes de différentes régions françaises, François Alfonsi a une première fois été élu député européen.
Depuis 2019, ayant figuré sur la liste Europe Écologie Les Verts que conduisait Yannick Jadot, et ce au titre de représentant en position éligible de la quarantaine de partis régionalistes, autonomistes et nationalistes de l’Alliance Libre Européenne (ALE), François Alfonsi siège à nouveau au Parlement européen.
Aujourd’hui, la proximité entre écologistes et autonomistes se traduit aussi par les positionnements politiques respectifs de Gilles Simeoni et Yannick Jadot qui convergent significativement. Aux interdictions et restrictions de l’écologie « radicale » pouvant flirter avec la décroissance et le rejet de la modernité, ils préfèrent les compromis du « durable » et les avancées technologiques « vertes ». Ils sont des européistes convaincus. Ils aspirent à une Europe de régions autonomes et de peuples en construction selon une vision de communauté de destin et non à une Europe d’États indépendants et de peuples affirmant des identités communautaires et historiques. Ils ont une vision de l’économie plus libérale que planifiée et interventionniste. Ils sont davantage ouverts à des réformes sociétale qu’à une remise en cause de l’ordre social. Si Yannick Jadot était élu, Gilles Simeoni pourrait presque s’écrier « Evviva ! ». Cependant, même si cette élection est très improbable, le président du Conseil exécutif n’est pas condamné à désespérer. Il dispose d’une autre raison d’espérer : s’entendre avec Emmanuel Macron si ce dernier est réélu.

Lune de miel avec Macron ?

Les conditions d’une lune de miel existeront. Un président de la République en début de mandat qui n’aura plus à se soucier d’une réélection, aura toute latitude de se montrer audacieux.
Le président du Conseil exécutif coche toutes les cases de l’interlocuteur idéal. Il a un crédit important auprès des insulaires et dispose d’une majorité absolue à l’Assemblée Corse. Il s’est défait de la présence à ses côtés des indépendantistes qui irritait au plus haut point le locataire de l’Élysée. Il vient avec la publication du rapport Mastor d’afficher son pragmatisme et son choix probable d’un compromis historique : la rupture de l’autonomisme avec le nationalisme. Dans ce rapport, il est en effet suggéré que les habitants de la Corse et plus particulièrement les autonomistes pourraient définitivement reconnaître l’indivisibilité de la République en optant pour un « pacte girondin ». Ce qui en ferait des femmes et des hommes acceptant d’être des Français différents et non plus des Corses susceptibles de revendiquer des pans de souveraineté sinon la souveraineté sur leur territoire. Ce qui qui fonderait le droit de la Corse à l’autonomie sur sa situation géographique, l’insularité, et non plus sur la reconnaissance de droits nationaux historiques du Peuple corse. Les deux président auraient d’ailleurs tort de ne pas saisir l’opportunité de s’entendre car les circonstance sont favorables.
A l'échelle nationale, la classe politique est de plus en plus favorable à la reconnaissances de spécificités régionales et de pouvoirs locaux adaptés.
En Corse, l’opposition non nationaliste affiche un esprit constructif. Au nom du groupe de Un soffiu novu qui, à l’Assemblée de Corse, réunit l’opposition de droite, Jean-Martin Mondoloni a récemment déclaré : « Nous ne sommes pas nationalistes, mais nous ne sommes pas des ennemis de la Corse. Nous voulons trouver une solution pérenne et fertile au profit de la jeunesse corse, nous voulons concourir à l'émergence d'une solution sur le registre du droit, de l'humanité et dans le secteur économique et politique.» Gilles Simeoni peut en définitive se dire qu’en 2022, il aura deux fers au feu.

Pierre Corsi
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