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Gilles Simeoni : des voeux sincères et surtout pieux

Les voeux des excercices imposés......
Gilles Simeoni : des vœux sincères et surtout pieux

A l’occasion de la présentation de ses vœux, on pouvait légitimement être dans l’attente que Gilles Simeoni parle clair, et ce même au risque de déplaire. Il n’en n‘a rien été.

Les vœux des représentants des grandes institutions politiques sont des exercices imposés. Ils ont aussi le plus souvent un contenu empreint de retenue car ils sont censés s’adresser à l’ensemble des administrés concernés. Mais il advient aussi que des circonstances exceptionnelles commandent que ces vœux soient très politiques, et plus précisément qu’ils mentionnent des choix forts et n’étant pas forcément de nature à susciter le consensus.
Chez nous, le 31 décembre dernier, les temps paraissaient mûrs pour qu’ils en fût ainsi. On pouvait légitimement être dans l’attente que Gilles Simeoni parle clair, et ce même au risque de déplaire. En effet, le long entretien qu’il avait accordé quelques jours plus tôt à Corse Matin, avait à la fois suscité l’envie d’en savoir davantage et suggéré qu’il serait, en partie du moins, solennellement répondu à cette envie le soir de la Saint Sylvestre. Il n’en n‘a rien été. Le président du Conseil Exécutif a prononcé une allocution qui a été marquée par le parti pris de ne froisser personne, et aussi par le choix de garder le silence sur de grands dossiers ou d’évoquer certains d’entre eux en usant de généralités ou de vœux pieux.

Prix des carburants et des produits de consommation courante, quel avis ?

Gilles Simeoni a d’abord évoqué la crise Covid-19 en relevant qu’elle met « sous tension le secteur médical et hospitalier et les soignants, fragilise l’économie, et altère le lien social » et que « les semaines à venir seront compliquées ». Difficile de ne pas partager ce constat et de ne pas reconnaître à l’intéressé la pertinence d’avoir accompagné ledit constat de l’annonce de trois initiatives.

La première initiative étant de réunir le Comité de suivi de la crise Covid-19 qui comprend des élus, des membres de la société civile, des professionnels de santé et des représentants de l’État afin d’une part, d’examiner, à la lumière du respect des libertés individuelles, les mesures contraignantes imposées par la crise sanitaire ; d’autre part, d’envisager des mesures visant à soutenir le tissu économique et social.

La deuxième initiative étantd’engager un cycle de travail sur les besoins du système de santé. La troisième initiative étant d’organiser une deuxièmeConférence sociale avec notamment pour objectifs « d’obtenir la prise en compte des propositions de l’Assemblée de Corse sur la baisse du prix des carburants et de poursuivre l’action entreprise sur la baisse du prix des produits de consommation courante » et d’aborder « de nouvelles thématiques du quotidien comme par exemple le prix de l’énergie, du foncier et du logement… » Concernant cette troisième initiative, et ce au vu des prix actuels des carburants et de certains produits de première nécessité, on était cependant en droit d’attendre plus. Par exemple qu’outre susciter une nouvelle réunion, le président du Conseil exécutif émette un signal fort en livrant son appréciation sur le résultat plus que décevant du suivi des préconisations de la première conférence.

Grandes problématiques et grands dossiers, entre généralités et silences

Gilles Simeoni a ensuite énoncé les potentialités de notre île : « La Corse a tous les atouts pour réussir […] riche de ses multiples atouts, de son capital humain, de sa jeunesse » et rappelé qu’il s’était engagé à les exploiter : « C’est l’engagement que nous avons pris devant les Corses.»
Il serait malvenu de contester ces évidences ou, à peine six mois après les élections territoriales, de remettre en cause la volonté sincère que l’engagement soit tenu.
Mais il aurait sans doute été judicieux qu’après six ans aux commandes de la Collectivité Territoriale de Corse puis de la Collectivité de Corse, et fort de l’apport des études, contributions et débats ayant enrichi cette longue durée, Gilles Simeoni aille au-delà des généralités et des silences et énonce clairement les issues concrètes qu’il entendait réserver à des problématiques et dossiers étant pendants depuis trop longtemps : traitement des déchets sans que la fiscalité afférente explose et que les terres soient souillées par l’enfouissement ; résolution du litige avec la Corsica Ferries concernant la part d’indemnisation restant à payer et les intérêts de 14 000 euros / jours continuant à courir ; politique offensive, y compris par des préemptions et des actions judiciaires, pour limiter la spéculation immobilière ; mesures incitatives susceptibles de favoriser un retour des Corses de l’extérieur ; rééquilibrage effectif des financements publics en faveur du rural ; prolongement du réseau ferré vers la Plaine orientale ; construction ou non d’un nouveau port de commerce à Bastia ; clarification des contours des services public aérien et maritime afin de réduire les coûts et de les préserver des sanctions de l’Union Européenne ; contrôle accru de la gestion et intégration progressive des agences et offices et de leurs personnels au sein des Directions opérationnelles de la Collectivité de Corse….

L’aspiration autonomiste

Enfin, Gilles Simeoni a convoqué l’espoir d’aujourd’hui et l’espérance d’hier en évoquant « Une jeunesse à laquelle nous faisons pleinement confiance et que nous aiderons à concrétiser ses rêves et ses aspirations » et en affirmant « La mandature à venir doit être, nous nous y sommes engagés, celle de la transmission et celle de la concrétisation de l’idéal qui nous porte depuis des décennies. » C’est d’ailleurs dans cette évocation qu’il a enfin frôlé le concret que l’on était en droit d’attendre.
En effet, il a alors martelé le cap qu’il entendait tenir : « Le Conseil exécutif de Corse et l’Assemblée de Corse […] ont proposé à l’Etat de construire avec toutes les forces politiques, toutes les forces vives de l’île, une solution politique globale, selon un calendrier à définir ensemble, et l’objectif recherché d’une solution politique globale a vocation à se traduire, au plan institutionnel, par un statut d’autonomie de plein droit et de plein exercice. » On peut toutefois être déçu que Gilles Simeoni n’ait été guère précis concernant les intentions de l’État.
Et la non réunion de la réunion de la commission chargée de se prononcer sur la levée du statut DPS (Détenu particulièrement surveillé) d'Alain Ferrandi et Pierre Alessandri accentue ce ressenti.

En conclusion, on retiendra surtout des vœux du Président du Conseil exécutif leur caractère sincère et surtout pieux, et aussi leur final incitant à la convivialité : « Ma o mancu, per sta sera, lasciemu da cantu i pinseri è passemu ci una bella serata, una stonda di spartera in famiglia o incù l’amichi. Chì l’annu 2022 sia felice è dolce ! »

Pierre Corsi





 
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