Pietrosella adopte le bail réel solidaire
La création de ce dispositif anti-spéculatif permettant l'accés à la propriété à moindre coût.
Pietrosella adopte le bail réel solidaire
La semaine dernière, le conseil municipal de la commune a voté à l’unanimité la création de ce dispositif anti-spéculatif permettant l’accès à la propriété à moindre coût.
Favoriser l’accès à la propriété à un prix nettement inférieur à celui du marché. C’est l’objectif du bail réel solidaire que Pietrosella a choisi d’adopter. "En termes d'initiative communale, c'est le premier en Corse, précise Jean-Baptiste Luccioni, maire depuis 2001 de la commune située sur la rive sud du golfe d'Ajaccio. On va donc créer un organisme de foncier solidaire (OFS) à Pietrosella destiné à la mise en oeuvre du bail réel solidaire. Pour nous, l'objectif est que personne ne soit exclu de l’accession à la propriété.”
Créé en 2014 dans le cadre de la loi Alur (Accès au Logement et Urbanisme Rénové), le bail réel solidaire (BRS) dissocie le foncier du bâti. Raison pour laquelle il permet l'accession à la propriété en résidence principale à un prix inférieur de 30 à 40% à celui du marché. En résumé : une personne est propriétaire - ou locataire - de sa maison mais reste locataire de son terrain. En cas de revente, il ne peut y avoir aucune plus-value, d’où le côté anti-spéculatif du BRS. “La contrepartie de ce bail, explique Jean-Baptiste Luccioni, c’est que s’il y a besoin de transmettre le bien pour une quelconque raison, il ne peut y avoir de plus-value sur la vente. Le terrain appartient à l’organisme de foncier solidaire (OFS). En étant propriétaire du foncier, cela permet d’encadrer le prix du marché. Les preneurs disposeront d'un bail de location pour le terrain car ils n’en sont pas propriétaires.”
Différents critères
Concernant l'attribution des logements, elle répond à des critères bien précis : la maison ou l’appartement doit obligatoirement être la résidence principale du preneur dont les revenus ne doivent pas dépasser certains plafonds. Exemple : “pour un couple avec deux enfants, le revenu net maximum annuel ne doit pas dépasser 60.000 euros”, précise le maire de la 133ème commune la plus chère de France qui compte plus de 50% de résidences secondaires.
Ici, le prix moyen du mètre carré pour une maison se situe autour des 5500 euros. “Avec cet outil, notre intérêt est de permettre à des gens qui, théoriquement, ne pourraient pas s’installer là d’accéder à la propriété, souligne Jean-Baptiste Luccioni. À Pietrosella, les coûts excluent une partie de la population sur le plan financier mais aussi générationnel. Ce BRS permet, sur des territoires tendus comme le nôtre, de répondre à cette double exclusion tout en ayant un garde-fou extrêmement important avec cette clause d’anti-spéculation.”
Côté financement, la commune pourra compter sur plusieurs leviers. “Une partie est issue de la location des terrains puisque l’OFS va les louer aux différents preneurs, explique le maire.
Cet organisme est éligible à des prêts à très long terme et à des subventions que l’on pourrait obtenir de l’État ou de la Collectivité de Corse.“
700 demandes`
À Pietrosella, la commune dispose déjà de terrains et de logements qui pourraient être transférés vers l’organisme de foncier solidaire (OFS) en vue de devenir bail réel solidaire. C’est notamment le cas d’un lotissement communal de 62 lots. “ Actuellement, on a un peu moins de 700 demandes sur ce projet-là, précise Jean-Baptiste Luccioni. Un opérateur social a fait une opération de 54 appartements sur la commune. En ce moment, ils ont encore 49 dossiers éligibles. Avec ce BRS, on sait donc que l’on va toucher beaucoup de gens et beaucoup de familles de la commune mais aussi du bassin de vie ajaccien.”
Désormais, les statuts de l’OFS seront arrêtés fin mai en préfecture. Dans la foulée, les premières opérations pourraient débutées. “Entre ceux existants et ceux en cours, on a déjà, a minima, 51 logements susceptibles d’être transférés sur l’OFS. D’ici trois ans, on pourrait avoir une centaine de logements en BRS sur la commune.” D’ici là, Pietrosella ne devrait plus être la seule commune de l’île à proposer un tel dispositif. À Porto-Vecchio, un projet de bail réel solidaire est également en gestation.