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Le destin tragique d'Yvan Colonna

Il n'est pas besoin d'insister sur la responsabilité écrasante de l'Etat dans la tentative d'assssinat d'Yvan Colonna.

Le destin tragique d’Yvan Colonna



Il n’est pas besoin d’insister sur la responsabilité écrasante de l’État dans la tentative d’assassinat d’Yvan Colonna. La supposée dangerosité d’Yvan Colonna justifiait son statut de DPS, mais ce statut ne l’a pas protégé d’une agression menée par un détenu qui lui, avait fait la preuve de sa dangerosité en Afghanistan d’abord puis en prison ensuite. La perpétuité d’Yvan Colonna s’est transformée en une tragédie. Quelles vont être les conséquences de ce drame atroce ? Vraisemblablement un regain de violence en Corse même et peut-être, enfin le rapprochement des deux derniers membres du commando Érignac toujours placés sous statut DPS.


La fin d’un cycle

On ne peut que s’incliner devant la douleur de la famille Colonna tout en faisant l’effort d’analyser le drame et ses possibles conséquences. L’histoire d’Yvan Colonna représente d’une certaine façon la fermeture tragique d’une période marquée par les affrontements entre factions nationalistes puis l’assassinat du préfet Érignac en février 1998. Il reviendra à l’enquête d’établir comment un djihadiste particulièrement signalé a pu obtenir un travail itinérant dans la prison et ce qui a réellement pu se passer pour qu’il puisse attenter à la vie d’Yvan Colonna.
Mais les résultats de l’enquête ne changeront rien à l’incontestable responsabilité de l’Etat. Il reste à tenter de prévoir les conséquences du drame. Le garde des Sceaux, M. Dupont-Moretti, n’est autre que l’ancien avocat du militant nationaliste mais aussi le “patron” de l’administration pénitentiaire. Il ne fait aucun doute que sa situation est délicate. Déjà dessaisi du dossier “rapprochement” parce qu’il avait été partie prenante de la défense d’Yvan Colonna, il va lui falloir maintenant expliquer les défaillances de sa propre administration, elle qui venait de refuser la levée du statut de DPS à Ferrandi et à Alessandri, à qui, comme à Yvan Colonna, elle n’avait rien à reprocher. Ce qui signifie que la gestion de cette question était directement politique. En toute logique, la responsabilité du drame l’est tout autant.



Des hommes marqués par le malheur

Le complot monté pour assassiner le préfet Érignac s’est achevé par une série de décès tous plus tragiques les uns que les autres. Il faut d’abord évoquer celui du malheureux préfet tombé sous les balles de ses assassins. Puis, il y eut celui de Joseph Caviglioli, le beau-frère d'Yvan mort, dans un accident de moto, le 13 septembre 1999. Il se trouvait à ses côtés lors de l’ultime interview du militant nationaliste donnée à TF1, quelques heures avant de prendre le maquis. Celle de Vincentu Versini, fils de Joseph, tué sous les yeux de son père qui venait d’être libéré, dans un accident de moto. Celui d’Antoine Alessandri, fils de Pierre, membre du commando Érignac et à qui l’administration pénitentiaire ne permit pas d’assister à ses obsèques. Celui de Vincent Stagnara et d’Antoine Sollacaro qui furent tous deux les avocats de membres du commando. Celui de Marcel Lorenzoni mis en cause par la DNAT dans la première partie du complot. Et puis il y eut la tentative d’assassinat perpétrée sur Alain Ferrandi par des codétenus. Celle d’Yvan Colonna vient clore — on l’espère tout au moins — cette liste de malheurs infinis.


Vers un retour de la violence ?


Il ne fait hélas aucun doute que cette tragédie va être à l’origine de nouveaux drames. Notre culture semble avoir plus de facilités à vivre dans l’ombre de la mort que dans la lumière de la vie. Les plus radicaux des nationalistes, frustrés par le manque de résultats politiques, vont vraisemblablement vouloir marquer le coup en faisant irruption dans le champ politique aux moyens de la violence espérant une fois de plus bousculer les lignes grâce au fer et au feu. La seule façon de désamorcer cette bombe est pour l’Etat d’accepter le rapprochement de deux derniers détenus. La crise ukrainienne et la campagne présidentielle peuvent favoriser une telle décision. Car, en définitive, la Corse n’intéresse plus grand monde. Yvan Colonna était la victime de la haine d’Etat. Les professionnels de la vengeance d’Etat, vont peut-être nous oublier. Nos malheurs sont relativisés par ceux des héroïques combattants ukrainiens et par la crise mondiale qui s’annonce.
Une reprise de la violence en Corse serait une mauvaise affaire pour toutes les parties. L’exécutif corse peut utiliser ce drame pour obtenir enfin une première victoire mais serait affaibli par l’ouverture d’une contestation clandestine. Il donnerait l’impression de ne rien dominer. Même les indépendantistes ont intérêt à ce que la Corse obtienne des résultats au moins sur le plan budgétaire et peut-être plus timidement sur le plan institutionnel. La meilleure façon de rendre justice à Yvan Colonna serait de transformer cette tragédie en une sorte de sacrifice qui serve les intérêts de ce peuple.


GXC
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