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Jean-Paul Gaultier : clap de fin

L’enfant terrible de la mode a tiré sa révérence des podiums. C’est lors de cette dernière semaine de défilés Haute-Couture que Jean-Paul Gaultier a fêté ses cinquante années de carrière et… la fin de ses collections.
Retour sur une soirée historique et les raisons de ce départ, vers d’autres horizons.

Ce n’est qu’un au revoir. Jean-Paul Gaultier avait convié des centaines de personnalités, amis, et autres professionnels du milieu au théâtre du Châtelet pour présenter son ultime collection de Haute-Couture. Dans une salle bondée, pas moins de 200 mannequins et artistes se sont succédés sur l’immense scène, pour un show unique. Amanda Lear, la pin-up américaine Dita Von Teese, l’actrice espagnole Rossy de Palma ou encore l’ex-mannequin et comédienne Farida Khelfa étaient présentes. Les guest stars Paris Jackson, Djibril Cissé, Estelle Lefebure, Antoine De Caunes, Kiddy Smile, Cristina Cordula, l’ex-miss Univers Iris Mittenaere ou encore Béatrice Dalle ont défilé sur le podium, sur les musiques de Boy George, Catherine Ringer ou Mylène Farmer.

Mais ce défilé n’était pas une succession de robes classique : la top Coco Rocha a offert une danse irlandaise avec beaucoup d’énergie et de joie, pendant que le danseur étoile Germain Louvet est apparu sur des pointes. Les genres n’ont jamais été importants pour Jean-Paul Gaultier, tout comme cette sorte de prétention qui court dans la mode. Sourire, danser, aimer : tels ont été les moteurs de création de ce génie à la marinière, celui qui a été formé par Pierre Cardin dans ses jeunes années et qui chérira pour toujours sa Nana, son ourson aux seins coniques, poitrine reprise sur scène avec un corset légendaire pour une certaine Madonna.

Cette soirée était moins une présentation de vêtements qu’une célébration de la vie. Néanmoins, et parce que rien n’est gratuit avec Jean-Paul Gaultier, le sens des pièces était celui de la durabilité. Pour contrer cette surconsommation, celle d’une mode comme second secteur le plus polluant au monde, J-P.G. a préféré ressortir d’anciennes tenues pour en créer de nouvelles pour l’occasion, un upcycling grandiose. Dans le communiqué déposé sur les sièges des invités étaient écrits les mots suivants : « Je pense que la mode doit changer. Il y a trop de vêtements, et trop de vêtements qui ne servent à rien. Ne les jetez pas, recyclez-les ! Un beau vêtement est un vêtement vivant. […] Dans mon premier défilé comme dans le dernier, il y a des jeans que j’ai portés. C’est la plus belle des matières. Et comme beaucoup d’êtres humains, elle devient encore plus belle en vieillissant. […] Adieu le flambant neuf, bonjour le flambant vieux ! ».

Une leçon. Celle d’un homme qui n’a jamais cessé d’innover, de trouver dans la tendance une notion éternelle, celle de l’humain. Parce que Jean-Paul Gaultier n’a jamais choisi de ce plier à des codes précis, ceux de l’univers d’une mode qui joue un jeu. Lui, le jeu, il l’a inventé. Fidèle à ses convictions, il n’a pas créé un style, mais un mouvement. Quand chaque Maison se battait pour avoir les mannequins du moment, lui a décidé de faire défiler Nabilla, Loana, Zaya… Un lien entre l’inaccessibilité des podiums et l’accessibilité du message. « C’est ça que j’aime par dessus tout : mélanger ! Surtout des choses qui ne sont pas censées aller ensemble. J’adore le métissage des matières, des gens, des classes sociales, des genres… et rigoler avec ça », avoue-t-il. S’il a arrêté le prêt-à-porter en 2014, c’est pour se concentrer sur la noblesse de la couture, avec toute son insouciance. Puis, il y a eu le « Fashion Freak Show », cette comédie musicale orchestrée par l’enfant terrible autour de sa vie, ses rencontres, qui a désormais sa place dans les plus grandes salles du monde entier. Au-delà des « qu’en dira-t-on », dans un monde souvent austère, il a osé, toujours. « Merci pour ces 50 premières années », écrit-il. Son nouveau destin ne fait que commencer.
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