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Le grand désengagement

Les salariés seraient devenus des mercenaires
Le grand désengagement

Les salariés seraient devenus des mercenaires. Le phénomène appelé « The Great Resignation » n’a pas encore atteint l’Hexagone. Sous nos latitudes, le taux de démission reste en deçà de périodes antérieures. Les salariés cherchent surtout à profiter du dynamisme du marché de l'emploi. De quoi soucier les employeurs, en souffrance de collaborateurs.

Une vague ordinaire

D’après une récente étude de la Dares si le nombre de démissions est en hausse en France, cela n’équivaut pas à ce mouvement appelé « La Grande Démission » aux États-Unis. En France, les gens démissionnent parce qu’ils ont trouvé mieux ailleurs, alors qu’outre-Atlantique, les gens partent sans avoir rien ensuite. La nuance est de taille, même s’il est vrai qu’un million d’emplois ne sont pas pourvus à travers la France et que 470 000 salariés en CDI ont déposé leur démission au premier trimestre 2022, soit « 20 % de plus qu’avant l’épidémie ». Cela n’est pas inédit dans l’Histoire. Rien qu’au XXIe siècle, ce taux a été plus élevé en 2001 et en 2008, lors des pics de croissance de l’économie. Puis, il a chuté « pratiquement de moitié, lorsque l’activité s’est calmée. Le mouvement de démission reflète donc le dynamisme du marché du travail, ni plus ni moins. Au second trimestre 2022, on dénombre 18 590 demandeurs d’emploi en fin de mois en Corse. C’est 3,8 % de moins qu’au premier trimestre de cette année, contre 1,7 % de moins au niveau national. Ainsi, le nombre d’inscriptions à Pôle Emploi régresse deux fois plus vite en Corse avec -18 % qu’à l’échelle nationale : -8,9 %. Le taux de chômage est à son plus bas niveau depuis 2014.

De bonnes raisons

En France, les premières analyses de la Dares, montrent que les démissionnaires sont rapidement en emploi : environ 8 démissionnaires de CDI sur 10 au second semestre 2021 l'étaient dans les six mois qui ont suivi, soit la même proportion qu'avant la crise sanitaire. In fine, le pouvoir de négociation a clairement tourné en faveur des salariés, ce qui peut favoriser la hausse des rémunérations. Outre cet effet potentiel sur les salaires, les enquêtes montrent que « début 2022, certaines entreprises font des concessions sur les conditions ou l'organisation du travail (télétravail) ou sur la forme des contrats d'embauche pour conserver ou attirer des salariés », souligne la Dares. Si les salariés démissionnent, c’est bien sûr pour la rémunération, mais pas seulement. L'une des principales motivations de ces démissionnaires, c'est d'améliorer leurs conditions de travail et donc leurs conditions de vie. Autre motivation, il s'agit pour certains salariés, de trouver un sens à son métier. Ils sont nombreux à quitter leur emploi car ils ne trouvent plus de sens à ce qu'ils font et estiment ne pas avoir d'impact positif sur la société. Ces emplois ce sont notamment ce que l'on appelle les « bullshit job ». Selon une autre étude, pour plus de cinquante pour cent des cas, on ne quitte pas un travail, on quitte un manager.

Enjeux de recrutement

Selon une étude d’UKG, fournisseur mondial de solutions RH, « 65 % des démissionnaires français regretteraient déjà leur ancien employeur » L’herbe n’est donc pas toujours plus verte ailleurs ! Pour autant, la pression sur les entreprises est réelle. Depuis des mois, les tensions sur le marché de l'emploi existent et augmentent dans plusieurs secteurs d'activité et pas uniquement pour les développeurs informatiques ou le secteur de l'hôtellerie Recruter devient de plus en plus compliqué. Cela devient même probablement le premier enjeu stratégique des entreprises, et ce pour les années à venir. Recruter prend du temps et coûte de l'argent. Le marché du travail doit se réinventer pour permettre aux entreprises d’allier travail hybride et projet d’entreprise. L’enquête de Gallup, intitulée « State of the Global Workplace 2022 Report » fait le point sur l’engagement au travail (c’est-à-dire l’implication et l’enthousiasme que montrent les employés dans leur travail et sur leur lieu de travail). Gallup estime que le manque d’engagement coûte à l’économie mondiale 7 800 milliards de dollars américains et représente 11 % du PIB mondial. Dans le monde, seulement 21 % des salariés seraient engagés. La France est avant-dernière du classement européen avec 6 % des salariés qui sont engagés, juste devant l’Italie (4 %). Des podiums à rapprocher des perspectives politico-économiques, qui doivent jouer sur le moral des salariés, qui sont aussi des citoyens.

Maria Mariana
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