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Isarël : L 'épovantail Itamar Ben -Gvir

L'enième tour de piste électorale en Israël

Israël : l’épouvantail Itamar Ben-Gvir


L’énième tour de piste électoral aura confirmé la menace d’une division aussi flagrante qu’inquiétante de la société israélienne entre un centre, une gauche et une majorité de partis arabes acceptant une pluralité raciale et religieuse, et une droite contaminée par le suprémacisme juif.

Quand ces lignes auront été publiées, l’électorat israélien se sera rendu aux urnes pour la cinquième fois depuis avril 2019 afin d’élire les 120 députés de la Knesset (Parlement d’Israël). Il n’est pas certain que cela aura dessiné une majorité claire et stable. En revanche, que le résultat - qui sera très probablement suivi de semaines de tractations politiciennes (le passé, les sondages et le mode de scrutin incitent à le prévoir) - permette à l’actuel Premier ministre centriste Yaïr Lapid d’espérer se maintenir au pouvoir ou au bloc de droite d’ambitionner ramener l'ancien Premier ministre Benyamin Netanyahou aux responsabilités, cet énième tour de piste électoral aura confirmé la menace d’une division aussi flagrante qu’inquiétante de la société israélienne entre un centre, une gauche et une majorité de partis arabes acceptant une pluralité raciale et religieuse, et une droitecontaminée par le suprémacisme juif. En effet, les enquêtes portant sur les intentions de vote ont d’ores et déjà révélé que pourdisposer d’une majorité et revenir au pouvoir, le leader de la droite Benyamin Netanyahou devra ouvrir son gouvernement auxsuprémacistes. Benyamin Netanyahou a d’ailleurs déjà déclaré que s'il retrouve le poste de premier ministre, le leader suprémaciste Itamar Ben-Gvir fera partie du gouvernement.

Quid Itamar Ben-Gvir ?

Âgé de 47 ans, avocat, actuellement député à la Knesset, Itamar Ben-Gvir a milité au sein de l'extrême droite dès les années 1990. En sa qualité d’avocat, il s'est spécialisé dans la défense des extrémistes sionistes et des colons accusés de violence contre des Palestiniens. C’est en 2012 qu’il a fondé le parti suprémaciste juif Otzma Yehudit (Pouvoir juif) dont les revendications-clés sont aussi éloquentes qu’inquiétantes. Otzma Yehudit réclame l’annexion de la Cisjordanie sans accorder aux Palestiniens la citoyenneté israélienne, l’expulsion d’Israël des citoyens israéliens d’origine arabe « déloyaux », l’incitation des citoyens israéliens d’origine arabe à émigrer afin de renforcer le caractère juif d’Israël, la refonte du système judiciaire selon des « valeurs juives ». Otzma Yehudit organise des manifestations provocatrices dans des quartiers et des villages à forte population arabe israélienne et, en Cisjordanie, soutient systématiquement les annexions illégales et les exactions des colons contre lesPalestiniens. Dans la perspective du scrutin du 1er novembre dernier, Otzma Yehudit s’est allié à un autre parti suprémaciste (Ha-Tzionut ha-datit), traduire « Sionisme religieux ». Quand vous lirez ces lignes, les deux partis seront sans doute forts de 13 ou 14 sièges à la Knesset (sur 120) et Itamar Ben-Gvir sera peut-être en position de devenir ministre.

Inquiétude en Israël et ailleurs

La percée des deux partis et la montée en puissance d’Itamar Ben-Gvir inquiètent autant en Israël qu’en dehors du pays. Selon un ancien chef d'état-major de Tsahal (l’armée israélienne), une « guerre civile » pourrait éclater si Itamar Ben-Gvir accède au gouvernement. La leader du parti travailliste s'exprimant à quelques jours de la 27ème commémoration de l'assassinat de Itshak Rabin par un extrémiste sioniste opposé aux accords d'Oslo, a ciblé Itamar Ben Gvir et Benyamin Netanyahou. La dirigeante du parti de gauche a rappelé qu’avant l'assassinat d’Itshak Rabin, Itamar Ben Gvir, encore adolescent, avait, avec des termes menaçants, revendiqué le vol d’une pièce du véhicule officiel du Premier ministre israélien : « Nous avons réussi à atteindre sa voiture et nous l'atteindrons lui aussi » et que Benyamin Netanyahou avait participé à une marche anti-Rabin où des manifestants portaient un faux cercueil. Au niveau international, le ministre des Affaires étrangères des Émirats Arabes Unis a déclaré qu’inclure Itamar Ben-Gvir dans un gouvernement pourrait mettre en péril les accords d'Abraham (récents traités de paix entre Israël et plusieurs pays arabes). Un influent sénateur démocrate US a lui aussi mis en garde Benyamin Netanyahou. Plusieurs observateurs estiment cependant qu’en politicien roué, Benyamin Netanyahou, qui veut veut revenir au pouvoir, use de l’épouvantail Itamar Ben Gvir pour susciter des ralliements à sa cause. Ils estiment en effet que, si à l’issue des élections, Benyamin Netanyahou est en situation de former un gouvernement (ce qui est probable, son parti le Likoud étant depuis des mois, donné en tête dans les enquêtes portant sur les intentions de vote), certains de ses opposants politiques préféreronts’allier à lui dans un gouvernement de coalition plutôt que de laisser la champ libre à Otzma Yehudit et Ha-Tzionut ha-datit. A suivre...

Alexandra Sereni
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