L'humanité en quête de spiritualité
Le monde donne l'impression d'être soumis à une houle incessante qui interdit toute vision de l'avenir
L'humanité en quête de spiritualité
En Iran et en Chine, deux régimes dictatoriaux sont obligés de céder (un peu) à cause de la colère du peuple qui est descendu dans la rue. En Russie, l'autocrate Poutine continue d'envoyer ses opposants au Goulag. Mais aux États-Unis, le camp trumpiste, qui espérait une victoire écrasante sur les démocrates de Biden, subit une défaite écrasante. Le monde donne ainsi l'impression d'être soumis à une houle incessante qui interdit toute vision de l'avenir.
Les conjonctions des maux
Au XIVe siècle, l'Occident eut soudain le sentiment d'être maudit. Outre la guerre de Cent Ans qui ravageait les villes et les campagnes, voilà que la Peste s'était mise de la partie. On estime qu'un tiers à la moitié de l'Europe périt de cette pandémie. De cet hiver sinistre naquit un printemps civilisationnel : la Renaissance. Car un siècle plus tard, à Mayence, un homme Johannes Gutemberg mettait au point le procédé de l'imprimerie. Dès lors les évènements majeurs s'enchaînèrent : impression de la Bible en grand nombre, interprétation du texte sacré par « le commun des mortels », naissance de la réforme, apparition des Lumières etc. etc.
Aucune période ne ressemble à une autre et pourtant les mécanismes du renouvellement paraissent étonnamment identiques. Qu'en est-il aujourd'hui ? Depuis un demi-siècle, la consommation humaine s'est démultipliée provoquant la sixième extinction avec une angoissante question à la clef : l'espèce humaine en fera-t-elle partie ? Les catastrophes se sont enchaînées sans qu'il faille y voir une quelconque intervention divine, mais bien une cascade de causes et d'effets. Et nous n'en sommes qu'aux prémices. Le prochain défi de l'humanité va être l'augmentation exponentielle des vagues migratoires intra et extracontinentales.
Or, à ce jour, aucun gouvernement n'a trouvé le moyen d'enrayer de pareilles transhumances qui ont pour origine la faim, la misère et la guerre, les trois maux que nos aïeux ont connus au XIVe siècle. La nature, elle, connaît des moyens de régulation que la civilisation interdit : la maladie, la prédation, l'autorégulation des naissances.
Un progrès générateur de malheur
Et c'est bien là la grande question de notre millénaire : quel est donc ce progrès technique qui, selon les Lumières, devait apporter bonheur et sagesse et qui amène certes des améliorations en termes de santé et de longévité, mais produit au bout du compte la haine, l'égoïsme et le conflit sans oublier la destruction de la nature ? Les mirages du XIXe siècle qui furent ceux du capitalisme et du socialisme sont entièrement à revoir. Si l'humanité ne change pas de cap en constatant l'échec de la révolution industrielle, elle plongera année après année dans un cauchemar dont elle ne pourra pas sortir.
Encore une fois, que fera-t-on quand des hordes innombrables de misérables venues d'ailleurs viendront frapper à notre porte ? Oserons-nous nous avouer à nous-mêmes que c'est bien nous les Occidentaux qui avons généré ce désordre systémique ? Il ne s'agit pas de s'adonner à cet exercice grotesque qu'est la repentance, mais de considérer le problème dans toute sa réalité et d'en chercher les remèdes appropriés. Désormais, il n'est plus possible de parler de progrès univoque et fléché comme l'ont fait les penseurs du dernier millénaire.
Un besoin et un désir de spiritualité
Depuis la chute de l'URSS et paradoxalement l'abandon quasi total de l'idéal communiste — paradoxal parce qu'il est difficile d'affirmer que cette dictature représentait le rêve de Karl Marx —, les religions ont pris le relais en général pour le pire. Ici l'Islam, là l'évangélisme protestant, là le fanatisme du judaïsme radical, les massacres au nom du bouddhisme ou encore les appels au meurtre de l'orthodoxie russe… Il n'est plus un continent qui soit épargné par les guerres de Religion.
Et pourtant, sous cette noirceur perce une vérité : l'homme patauge dans le consumérisme et le matérialisme alors qu'en lui subsiste le mystère de la transcendance. L'individu a besoin pour être en accord avec lui-même de croire en une mission qui le relie, dans le positif, à la nature. C'est cela le grand pari de notre siècle : réinsuffler à l'homme l'esprit de cette nature dont nous sommes issus et qui est à la fois notre matrice et notre raison d'être. Nous lui appartenons entièrement, spirituellement et pourtant nous nous acharnons à la défigurer. Elle nous a donné la vie et nous la dévorons de l'intérieur. Spinoza affirmait que Dieu c'était la nature. Réapprenons à la respecter, à l'aimer et peut-être parviendrons-nous à nous aimer nous-mêmes et ainsi aimer le Vivant.
GXC