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A droga fora !

Il y a ceux qui consomment, ceux qui en vivent et ceux qui luttent contre ce fléau de plus en plus présent sur l'île.

A droga fora

Il y a ceux qui consomment, ceux qui en vivent et ceux qui luttent contre ce fléau de plus en plus présent sur l’île. La drogue n’est pas qu’un fait divers qui alimente les rubriques dédiées dans les médias, c’est une réalité de plus en plus difficile à ignorer. En Corse, on ne consomme pas moins, mais on vend, et on consomme différemment.


Trafic exponentiel


Mardi 15 août, un coup de filet de la police judiciaire a permis la saisie de 93 kilos de résine de cannabis et de 7,5 kilos de cocaïne, après l’arrivée d’un ferry de la Corsica Linea au port de Bastia. Une « saisie record » de drogue dans l’île. Selon une source judiciaire, la valeur à la revente de la quantité saisie est de 1,7 million d’euros. Sept personnes sont actuellement en garde à vue. Ces interpellations ont mobilisé près de soixante-dix fonctionnaires de la direction territoriale de la police judiciaire, et parmi eux ceux de la BRI et du GIR de Corse. Les enquêteurs ont pu démanteler ce réseau grâce à un renseignement anonyme reçu en février. Les premières investigations ont montré que les tentacules du réseau touchaient les trois principales villes corses, Ajaccio, Bastia et Porto-Vecchio. Selon les enquêteurs, cette opération montre que le trafic s’intensifie sur l’île, surtout en raison de la saison touristique. Le trafic est particulièrement éclectique, avec une nouvelle organisation, dont la source d’approvisionnement est située à Marseille et inondait toutes les filières de l’île.


Une véritable gangrène

Toujours en août, une mobilisation avait suivi l’agression présumée de deux agents municipaux à Ajaccio, aux Cannes. Selon les habitants du quartier, où la situation est plus apaisée, le trafic de drogue compromet le vivre ensemble. Les tags continuent de fleurir sur les murs de l'île, mais ils n'empêchent pas les consommateurs d'être de plus en plus nombreux. D’après l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), le mot « drogue » recouvre l’ensemble des produits psychoactifs (substances licites comme le tabac ou l’alcool et substances illicites telles que le cannabis ou la cocaïne) dont la consommation perturbe le système nerveux central en modifiant les états de conscience. Les drogues agissent sur le circuit de récompense du cerveau et sur d’autres circuits dont dépend la gestion des émotions, de l’humeur, de la motivation et des apprentissages. Les drogues provoquent souvent, dans un premier temps, des sensations de plaisir qui engendrent le désir de renouveler l’expérience et conduisent certains à ne plus pouvoir contrôler leur consommation. D’autres comportements comme la pratique des jeux d’argent ont une action similaire sur le cerveau. Tous ces comportements sont identifiés sous le terme d’« addiction ».


Consommation en hausse

D’après les chiffres clés 2022 de l’OFDT, le cannabis reste de loin la substance la plus consommée, avec 1,3 million de consommateurs réguliers (et 18 millions d’expérimentateurs). Au niveau européen, la France se distingue par le haut niveau de consommation chez les jeunes (équivalent à celui observé aux États-Unis et au Canada). On observe néanmoins un ralentissement de l’expérimentation chez les jeunes : 9,1 % des élèves de troisième se disent expérimentateurs (au moins un usage au cours de la vie) en 2021 ; 23,9 % se déclaraient comme tels en 2002. Inversement, l’usage du cannabis s'amplifie chez les adultes, cela étant lié au vieillissement des générations qui l’ont expérimenté dans leur jeunesse. Si la consommation de cannabis a l’air d’être décomplexée sur le continent, cela reste plutôt mal vu sur l’île. Fumer du cannabis est toujours mal vu, parce que c’est une drogue de « plouc ». Dans l'ensemble de la France, 7 % des jeunes de 17 ans confessent en faire un usage régulier, ils ne sont que 3 % en Corse. Et pourtant, le marché du cannabis n'est pas vraiment en berne. La cocaïne est le deuxième produit illicite le plus consommé, avec 600 000 usagers dans l’année (et 2,1 millions d’expérimentateurs). Elle est suivie de près par l’ecstasy (méthylènedioxyméthamphétamine – MDMA), qui compte 400 000 usagers et 1,9 million d’expérimentateurs. D’après les forces de l’ordre, le côté festif de la consommation a tendance à banaliser et démocratiser certaines drogues. D’autant que les réseaux sociaux ont facilité la vie des dealers, et compliqué celle des enquêteurs. En matière de drogue, la lutte est quotidienne.


Maria Mariana
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