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Où sont les justes ?

Un éternel recommencement dont on se passerait bien
Où sont les Justes ?

Depuis le 7 octobre, les étoiles de David viennent dégrader les murs et concurrencer d’autres messages haineux. Au-delà de la xénophobie manifeste, cela rappelle les pires heures de l’histoire contemporaine, comme un éternel recommencement dont on se passerait bien.

D’où parle-t-on ?

L’antisémitisme est la discrimination et l'hostilité manifestées à l'encontre des Juifs, ou supposés appartenir à la communauté juive, en tant que groupe ethnique, religieux ou supposément racial. Étymologiquement, ce terme s'appliquerait aux peuples sémites parlant l’une des langues sémitiques, mais il désigne, dès sa formulation vers la fin du XIXe siècle, une forme de racisme à prétentions scientifiques et visant avant tout les Juifs. L'antisémitisme développe des préjugés et des interprétations diffamatoires, des attitudes haineuses et des agressions verbales ou physiques. Les cibles sont multiples : un nom de famille ou un prénom, des traditions ou des pratiques religieuses, des modes de vie, une apparence physique, un métier ou tout autre signe considéré comme spécifique. Il fait partie de croyances, de complotisme d’un autre âge. Dans un sondage d’octobre 2017, l’institut Ipsos montre que 64 % des Français pensent que les Juifs disposent de lobbies très puissants, 52 % qu’ils ont beaucoup de pouvoir, 51 % qu’ils sont plus riches que la moyenne, 38 % qu’ils sont trop présents dans les médias, et 38 % pensent qu’« on parle trop de la mémoire de la Shoah ».

En réaction

Les manifestations d'antisémitisme peuvent être influencées par des événements mondiaux, des tensions politiques, des conflits historiques et d'autres facteurs socio-économiques. Le conflit israélo-palestinien est un élément déclencheur de ces sentiments antisémites. Mais n’oublions pas qu’il s’est manifesté à maintes reprises dans l’histoire des pays européens. L’affaire Dreyfus en France en 1895 en est un exemple. L’antisémitisme a aussi été un pilier politique lors des lois de Vichy sur le statut des Juifs en 1940. Les nazis en avaient fait le fondement de leur régime, qui avait conduit à programmer la solution finale, avec les conséquences que l’on connait. Certains le nient, on appelle cela le négationnisme, c’est une doctrine qui vise à nier la réalité du génocide des Juifs par les nazis, notamment l’existence des chambres à gaz. Chaque fois que des événements antisémites se produisent, les Juifs de France se sentent en insécurité et migrent vers d’autres pays. Ils sont ainsi passés de quelque 900 par an avant 2000 à 7800 au lendemain des attentats de 2015 pour s’établir à 5000 en 2016. Depuis le 7 octobre, toutes les grandes villes d’Europe sont frappées par cette inflation exponentielle de l’antisémitisme. Malgré les grandes marches contre l’antisémitisme organisées partout en France, les actes et menaces antisémites sont en nette hausse sur le territoire, à l’exception de la Corse.

Mesurer et lutter

Le service central du renseignement territorial a recensé près de 600 actes antisémites en seize jours, plus que le nombre d'actes recensés pour l'ensemble de l'année 2022. Des messages de haine qui ne viennent pas polluer la Corse. L’île conserve son aura « d’île des Justes », seul département à n’avoir pas dénoncé de Juifs à l’occupant. Dans son histoire, la Corse s'est toujours illustrée par sa défense des Juifs. Déjà au XVIIIesiècle, Pascal Paoli déclarait que « les Juifs ont les mêmes droits que les Corses puisqu'ils partagent le même sort ». En 1915, 800 juifs expulsés de Palestine par l'Empire ottoman débarquent à Ajaccio, puis à Bastia et forment de nouvelles communautés. Aujourd’hui, cette communauté discrète compte quelque 500 personnes, qui vivent sereinement dans l’île, hermétique à la propagande antisémite. Il est important de noter que l'antisémitisme, comme toute forme de discrimination, est condamné par la plupart des sociétés démocratiques et est contraire aux principes des droits de l'homme. Dans la loi, l’antisémitisme comme le racisme constituent des circonstances aggravantes pouvant augmenter les peines maximales encourues, jusqu’à un an de prison et 45 000 euros d’amende pour provoquer la haine, la discrimination ou le racisme. Promulguée le 13 juillet 1990, la loi Gayssot énonce que « toute discrimination fondée sur l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion est interdite ». En d’autres termes, elle réprime le racisme et l’antisémitisme et fait du négationnisme un délit.

Maria Mariana
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