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Corse : la terre et le sang

Définir les contours du peuple corse .......

Corse : la terre et le sang


Foutue période qui veut que désormais en Corse, les débats s'orientent vers un sujet à la fois indépassable, incontournable et impossible à régler : celui qui vise à définir les contours du peuple corse.

Planter le décor


La Corse a gagné plus de 140 000 habitants en l'espace d'une génération. Compte tenu du gain démographique des seuls Corses, il est évident qu'il s'agit d'un gain migratoire. Or la Corse détient le plus faible taux de renouvellement démographique de la France. Mais si on retranche les naissances qui proviennent des femmes venues de l'extérieur, on obtient un taux de 1, l'un des plus faibles au monde. Or ceux qui refusent la définition du peuple corse comme communauté de destin oublient le deuxième volet indispensable pour la survie du peuple corse : son renouvellement. Il faut compléter ce triste tableau par d'autres chiffres donnés par l'INSEE. 104 000 Corses — entendons par là des habitants de la Corse — ont plus de 60 ans. 11 % ont plus de 75 ans ce qui fait de la Corse la championne du 4e âge. En 2070, si on en croit l'INSEE, un quart des insulaires atteindront cet âge. La question n'est donc pas de tempêter contre les nouveaux arrivants mais bien de se demander ce que nous ferons s'il n'en arrive pas plus. Passé un certain pourcentage de personnes âgées une population connaît un déclin accéléré de sa culture et même de sa civilisation. Les jeunes auront alors tendance à fuir une terre qu'ils vivront elle aussi comme stérile. Gilles Simeoni a donc raison de dire et d'écrire que la Corse doit continuer à fabriquer des Corses comme elle le fait depuis des siècles. N'a-t-elle pas successivement intégré des Toscans, des Génois, des Grecs et des Français ? Parler d'un peuple défini par le sang est une absurdité en soi. Ça l'est plus encore dans une île pauvre et faiblement peuplée. Et plus encore lorsque même les nationalistes convaincus peinent à procréer.

Une culture qui s'estompe


Edmond Simeoni a largement contribué sans le vouloir au mythe du Corse génétique en diffusant ses espérances diasporiques. On disait sans beaucoup de rigueur qu'il y aura dans le monde un million voire deux millions de Corses entendant par là que la corsité serait un caractère génétique pour l'éternité. Ainsi toute personne possédant un ancêtre insulaire pourrait prétendre à l'appellation contrôlée de corse. C'est là encore une absurdité. On ne peut pas tout à la fois prétendre qu'être corse c'est appartenir à une culture et affirmer que celui qui habite au bout du monde, qui ne connaît rien de la Corse mais descend vaguement d'un ancêtre lointain serait plus corse que le continental qui vit ici depuis des décennies et a été imprégné de ce qui reste de notre culture. Et d'ailleurs de quoi est-elle vraiment faite cette fameuse culture ? De la langue ? 95 % des enfants nés ici ont le français pour langue maternelle reproduisant génération après génération sa déperdition inexorable. Les villages ? 70 % des Corses vivent dans des zones urbaines. Et quand bien même la télévision, les nouvelles technologies ont brisé les cercles de connaissances locaux et même familiaux. L'école ? Une plaisanterie. On n'y enseigne ni l'histoire, ni la géographie et encore moins la langue.

Créer des outils d'intégration ou dépérir


La Corse possède le talent de déceler ce qui ne va pas sans jamais ou presque proposer de solution. La langue dépérit ? C'est la faute à l'État qui pourtant ne cesse de payer. La langue corse est, rappelons-le, à proportion de population, la plus subventionnée d'Europe pour un résultat qui frise l'indécence. Au Pays basque, en Bretagne, il a été créé des écoles privées d'immersion. Ici, quelques bénévoles ont tenté d'agir dans l'indifférence générale. Il n'existe actuellement aucun manuel d'histoire et de géographie sérieux destiné au primaire et au secondaire.
Certes nous sommes une île de chanteurs souvent admirables et de couteliers talentueux. Mais où est donc le fameux peuple corse ? Pourtant il existe indubitablement conforté par l'insularité. Mais il peine à exprimer sa vraie richesse corseté par des partis nationalistes qui ne pensent qu'en terme de statut et qui ne parviennent pas à écrire une feuille de route indépendante qui parvienne à harmoniser le foncier, le social et l'économie. C'était l'ambition du PADDUC qui aurait d'ailleurs dû commencer à être révisé depuis déjà trois ans. Mais là encore, on attend. Quoi ? On ne sait pas mais on attend en restant sur le bas-côté à regarder passer les trains. Que se passera-t-il si comme c'est prévisible, l'autonomie est refusée par les élus français ? Nul ne le sait et surtout pas les Corses qui ne sont tenus au courant de rien par un exécutif qui s'applique la méthode Coué. Bien sûr qu'il est à espérer que ça passe. Mais si tel n'est pas le cas quel est le plan B ? Gilles Simeoni lui-même le sait-il ? Pas certain du tout.

GXC
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