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Inceste, la fin d'un tabou ?

Il y a eu le mouvement #Iwas qui a brisé el silence sur les agressions sexuelles en Corse. L’île se croyait préservée, mais hélas, non. Et les tweets sont autant de pierres posées dans un jardin loin d’être d’Éden.
Inceste, la fin d’un tabou ?

Il y a eu le mouvement #Iwas qui a brisé le silence sur les agressions sexuelles en Corse. L’île se croyait préservée, mais hélas, non. Et les tweets sont autant de pierres posées dans un jardin loin d’être d’Éden.
Une récente enquête Ipsos a révélé l’ampleur du phénomène : un Français sur dix ose affirmer avoir été victime d’inceste.

#IwasCorsica

La Corse, terre d’omerta… Parler de ces crimes en Corse est d’autant plus difficile que tout le monde connaît tout le monde. Pour autant, le mouvement américain est devenu #IwasCorsica. Et les victimes ont publié leur drame ; filles ou garçons, victimes d’inceste, de viol, d’agression sexuelle, d’attouchements. Culomba Sicurani, une des premières en Corse à s'emparer de ce mouvement, a ainsi publié avec ce hashtag « #Iwas 6 environ.
C'était mon cousin. Il en avait 14. Je me suis réveillée la nuit. Il ne dormait pas. Et m'a demandé de l'aider à finir ce qu'il était en train de faire ». Et Stella Pasquani a aussi participé au mouvement en publiant « #Iwas ça s'est passé de 4 à 8-10 ans.
C'était mon propre père et uniquement par sodomie. Il me disait que c'était normal, que tous les papas faisaient ça à leurs filles » ; son père incestueux a été condamné à 10 ans de prison en septembre 2019.
Le mouvement a été suivi de manifestations cet été, le 21 juin à Bastia et le 5 juillet à Ajaccio. Si pour l’instant peu de plaintes ont été déposées, la parole se libère et les victimes osent dénoncer leur violeur.

Ce mot qu’on tait

Il faut appeler un chat un chat, et donc ne pas noyer l’inceste dans un jargon juridique. Briser le tabou commence par désigner l’horreur par son vrai nom. L'inceste, c'est le rapport sexuel entre deux personnes qui sont parents à un degré où le mariage est interdit.
En soi, l’inceste n’est pas délictueux, tant que la relation est librement consentie et concerne deux personnes qui ont dépassé l'âge de la majorité sexuelle, fixé à quinze ans en France.

Le droit pénal français tient compte du lien de famille pour sanctionner et définir certaines infractions sexuelles, en général sanctionnées plus sévèrement lorsqu'elles sont commises par « un ascendant, légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime ».
Elles sont alors punies de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 30 000 €. Dans les affaires d'inceste, en application du droit commun, les poursuites pénales peuvent être mises en mouvement par le ministère public, dès lors qu'il a connaissance des faits, ou par la victime.

En France, le lien incestueux est, dans presque tous les cas, considéré comme une circonstance aggravante et représente l'élément constitutif de l'infraction seulement pour les atteintes commises sur des mineurs âgés d'au moins quinze ans. Selon l’association Face à l’! nceste (anciennement Association internationale des victimes de l'inceste [AIVI]), l’inceste représente les trois quarts des violences sexuelles sur mineurs. Les chiffres ont triplé par rapport à 2009.

Pédocriminalité

Ce qui est clair, c’est que ces faits sont toujours délicats à aborder. Comme ce fut le cas lors du procès en 2018, de ce grand-père incestueux, reconnu coupable de viol et d'agressions sexuelles sur sa petite-fille, à Ajaccio, qui était âgée de 9 ans au moment des faits. Ce genre d’affaires est traitée à huis clos de droit. C’était le père qui avait porté plainte suite à la lecture du journal intime de sa fille.
Car les plaintes des victimes restent rares. Suite au mouvement #IwasCorsica, la procureure de Haute-Corse a révélé que 48 plaintes en diffamation avaient été déposées après la publication de dizaines de noms de potentiels agresseurs sexuels ou violeurs partagés par messages privés sur les réseaux sociaux. 10 % des Français, soit 6,7 millions de personnes, ont subi l’inceste selon un sondage Ipsos pour l’association « Face à l’Inceste ».

C’est un véritable fléau de santé publique, avec des conséquences avérées pour les victimes mises en lumière par l’étude ACE (Adverse Childhood Experiences soit « les expériences négatives de l’enfance »).

Pour lutter contre ce fléau, l’OMS préconise trois niveaux de prévention : empêcher le passage à l’acte, détecter les premiers signes, réduire les conséquences. En France, une commission indépendante sur les violences sexuelles faites aux enfants va être créée. Un projet de loi devrait être présenté en 2021.

Maria Mariana

Communiqué de presse de l’association Face à l’inceste, 18/11/2020 : https://facealinceste.fr/blog/petitions/communique-de-presse-du-18-novembre-2020

Étude ACE (Adverse Childhood Experience) : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tude_ACE_ (Adverse_Childhood_Experiences)
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