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Un accord sur l'autonomie toujours en stand by

Le récent accord sur l'autonomie de la Corse,......

Un accord sur l’autonomie toujours en stand by



Le récent accord sur l’autonomie de la Corse, conclu entre le gouvernement français et plusieurs élus corses, reste en attente d’un texte final qui devrait être prêt pour la fin juin. Il devrait prévoir la reconnaissance d’un statut d’autonomie « au sein de la République », ainsi qu’une mention dans la Constitution de la Corse comme « communauté historique, linguistique et culturelle ». Trop peu pour les indépendantistes, trop flou pour une partie de la gauche, trop avancé pour les centralisateurs.


Une fracture nationaliste profonde


Pour ses partisans, notamment les représentants de Femu a Corsica et du Partitu di a Nazione Corsa (PNC), ceux qu'on pourrait qualifier d'étapistes, ce compromis ouvre la voie à une différenciation institutionnelle permettant de mieux répondre aux spécificités de l’île. Mais pour une partie du camp nationaliste, et notamment pour le parti Nazione, héritier de Corsica Libera, cet accord constitue une « faute politique » majeure. Rejetant fermement ce texte, Nazione accuse les signataires d’avoir cédé sur des revendications fondamentales : droit à l’autodétermination, reconnaissance du peuple corse, statut de résident, protection foncière, corsisation des emplois ou encore co-officialité de la langue. Selon le mouvement, le concept de « communauté historique » n’a qu’une valeur déclarative, sans effets juridiques concrets. Loin d’être une avancée, ce compromis serait au contraire un « verrou » qui referme la perspective d’un véritable pouvoir corse. Sa représentante à l’Assemblée de Corse votera donc contre. Jean-Guy Talamoni, figure emblématique du nationalisme corse, va plus loin, dénonçant une « publicité mensongère ». Il semble vouloir capitaliser sur le mécontentement en se posant comme le gardien d’une ligne indépendantiste pure, quitte à prendre le risque d’une marginalisation politique.

Jean-Jacques Panunzi : une alerte sur les fondements républicains


Du côté des institutions françaises, l’accord ne fait pas l’unanimité non plus. Le sénateur corse Jean-Jacques Panunzi, fervent défenseur d’une République unitaire, a exprimé ses plus vives inquiétudes. Il critique l’introduction dans la Constitution de la notion de « communauté corse », qui selon lui rompt avec les principes d’universalité républicaine. Pour Panunzi, cette reconnaissance identitaire va plus loin que ce qui est prévu pour les Outre-mer, et pourrait ouvrir la voie à une forme d’ethnicisation du droit.

Le sénateur redoute également la création d’un pouvoir législatif autonome en Corse, sans passage par l’habilitation parlementaire nationale. Une telle évolution risquerait selon lui de transformer la collectivité territoriale en une « entité surpuissante », échappant à tout contre-pouvoir. Panunzi fustige aussi le manque de résultats concrets des majorités nationalistes au pouvoir depuis 2015 : rien, selon lui, n’a été fait sur les problèmes structurels comme le logement, l’emploi, ou l’apprentissage du corse. Il accuse les leaders autonomistes d’entretenir le conflit avec Paris plutôt que de gérer efficacement les affaires courantes. Pour lui, c’est un catalogue de doléances constitutionnalisé, sans stratégie de transformation concrète.

Réactions en chaîne : vers une contagion institutionnelle ?


L’impact de cet accord ne se limite pas à la Corse. Il suscite déjà des réactions en chaîne dans d’autres régions françaises suscitant la méfiance des centralisateurs. En Alsace, le député Renaissance Olivier Becht, ancien ministre, a proposé au Premier ministre Gabriel Attal une expérimentation permettant à la Collectivité européenne d’Alsace (CEA) de récupérer certaines compétences régionales. Sans aller jusqu’à revendiquer une autonomie à la corse, Becht entend faire avancer la cause d’une Alsace plus forte, notamment en contournant le Grand Est. Cette proposition, soutenue par plusieurs élus alsaciens, vise aussi à profiter du moment politique : l’approche des élections européennes pousse les responsables à vouloir répondre à des revendications locales longtemps ignorées. Becht en appelle à une réforme par la loi ordinaire, plus discrète que la révision constitutionnelle corse, mais susceptible de raviver un sentiment identitaire régional fort, comme celui qui perdure en Alsace.

En Bretagne également, le président de région Loïg Chesnais-Girard s’est emparé du débat. Dans un courrier adressé à Gérald Darmanin et Gérard Larcher, il plaide pour que toute collectivité territoriale puisse demander un statut particulier, à l’instar de la Corse. Il ne s’agit pas d’une demande d’indépendance, ni même d’autonomie sur le modèle corse, mais d’un appel à une différenciation territoriale ouverte, fondée sur les réalités de terrain.

Il ne fait aucun doute que le président Macron tiendra sa promesse d'amener un texte devant la représentation nationale. Ensuite, ça ne sera plus son problème. Et là ça risque fort de ne pas passer.

GXC
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