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Colza ou gaz liquide : l'avenir énergétique de la Corse, bonne ou mauvaise nouvelle ?

L'état et EDF envisageraient de faire fonctionner les moteurs de la nouvelle centrale électrique avec du biocarburant
Colza ou gaz liquide : l’avenir énergétique de la Corse
Selon les informations de Corse-Matin , l'État et EDF envisageraient de faire fonctionner les moteurs de la nouvelle centrale électrique du Ricanto qui remplacera celle du Vazzio, dont la livraison est prévue par la PPE en 2023, avec du biocarburant. L’état n’a ni infirmé ni confirmé.

Quant à la Collectivité corse, elle n’est tout simplement pas au courant ce qui devient une fâcheuse habitude.
Or l’annonce est cohérente avec celle du gouvernement, faite le 27 juillet dernier, par Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, qui a avancé l'échéance de 2024 de deux ans, pour remplacer progressivement le fioul domestique 100 % d'origine fossile par du bioliquide.

Une annonce inquiétante

Il faudrait un jour écrire la ballade de l’énergie pour la Corse depuis la carbo-sarde qui inaugura les premiers plasticages dans les années 60 en passant par le stupide refus du câble ICO, de l’installation du Sarco, du moteur du Vazzio précipité dans le port. Sans oublier le serpent de mer du Galsi, du fantomatique gazoduc Cyrénée, et de l’indestructible centrale du Vazzio.

Et voilà que surgirait du sol d’ici deux ans une centrale toute neuve qui, pour l’heure, en est encore au terrassement.
Pourquoi pas après tout puisque c’est inscrit dans la feuille de route adoptée en 2015, corédigée par l'État et la Collectivité de Corse et prévue par la PPE ?
Si c’est écrit alors ?
Mais quid de l’alimentation en biocarburant au lieu du gaz liquide ?

Une première remarque est l’attitude pour le moins cavalière des pouvoirs publics qui semblent ne pas avoir encore compris que la Corse était doté d’un exécutif et d’une assemblée territoriale.
Il eut été convenable de ne pas les faire passer pour de simples organes d’enregistrement de décisions prises ailleurs et de les avertir.

Une indépendance énergétique en trompe l’œil

La Corse, de par le refus d’un câble avec le continent (ICO) au début des années 80, est considérée comme une zone non interconnectée (ZNI) au même titre que les départements et régions d’outre-mer (Guadeloupe, La Réunion, Mayotte), les collectivités territoriales (Martinique, Guyane), certaines collectivités d’outre-mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna notamment) et l’île anglo-normande de Chausey. En vertu du principe de péréquation à l’échelle nationale, les consommateurs paient un niveau de facture d'électricité identique à celui de la France continentale : les surcoûts structurels entre coûts de production et recettes tarifaires des fournisseurs historiques sont compensés au titre des charges de service public de l’énergie (CSPE).

Le coût de l’énergie corse dépasse les 200 euros le MWh contre environ 100 euros sur le continent (non compris la CSPE qui se chiffre à 22 euros le MWh). Un autre paramètre à prendre en compte est la perte de clients mensuelle qu’EDF subit du fait de la concurrence : 150.000 ce qui est énorme.
A priori le programme de transition énergétique vise l’indépendance pour ZNI horizon 2030. Reste à savoir ce qui signifie le concept galvaudé d’indépendance. Au nom de laquelle, on a refusé le câble ICO pour ensuite applaudir au GALSI qui nous rendait dépendant de l’Algérie et de l’Italie.

On a installé discrètement le Sarco grâce auquel nous recevons de l’électricité italienne. On s’est félicité de recevoir du gaz liquide venu du continent et voilà qu’on nous propose maintenant du colza.

Conclusion: nous ne sommes pas indépendants et nous devons nous résoudre à l’idée que, si nous pouvons réduire notre dépendance, celle-ci existera toujours.


Un colza pas si écolo que ça


La moitié du biodiesel produit dans l’Union Européenne est issu de produits importés : seuls 4,7 Mt de biodiesel (sur 10 Mt utilisées) sont issus de graines produites en UE. L’UE est déficitaire à hauteur de 63% pour les huiles, usages alimentaire et énergétique confondus.

Plus l’huile de colza est orientée vers le biocarburant, moins l’UE est en mesure de satisfaire sa demande en huile alimentaire, et plus il faut importer d’huile de l’étranger : 6 Mt d’huiles par an (dont 3,3 Mt dont ce poison qu’est l’huile de palme), l’équivalent de 1,6 M d’ha de colza, un peu plus que la production annuelle française.
Par ailleurs, les usines qui fabriquent le biocarburant tournent en partie à l’huile de palme.

En d’autres termes, la fabrication du biocarburant colza accélère les conséquences connues des palmiers : déforestation, destruction de tourbières, émissions massives de gaz à effet, disparition de la biodiversité végétale et animale, déplacement des populations autochtones, utilisation de pesticides interdits en France, absence de protection des applicateurs… Il faut également savoir que l’achat du colza pour la filière énergétique dépend de grands groupes qui sous-paient les producteurs.

Quoi qu’il en soit cela mérite un débat et non pas ce tour de passe indigne.


GXC
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