31 e FESTIVAL DE LAMA
Le 7e art au village
31 è Festival de Lama
Le 7 è art au village
Lama est un petit paradis et l’accueil de son festival redouble son attrait. Des films de grande qualité au cœur de l’été. Lama, où de la poésie et du mystère en partage. Avec en prime de la convivialité ce qui ne gâte rien. Lama c’est encore des sentiers qui semblent mener au bout du monde tout en cheminant sur les hauteurs balanines.
L’édition 2025 de la manifestation s’ouvre le 26 juillet et tire le rideau le 1 er août. Du côté des cinéastes venant d’ailleurs on va découvrir, « Un simple accident », de Jafar Panahi, cinéaste iranien, plusieurs fois embastillé par la dictature des mollahs, qui a dû tourner son dernier film dans la clandestinité. « Un simple accident » a emporté la Palme d’or au récent festival de Cannes… Panahi a l’habitude des distinctions suprêmes. N’a-t-il pas été déjà couronné par un Lion d’or à Venise et un Ours d’or à Berlin. Interdites de diffusion dans son pays ses œuvres cinématographiques arrivent néanmoins à circuler sous le manteau au risque de sanctions pour qui les visionnent. « Un simple accident » relate le face à face entre un tortionnaire et sa victime dont la certitude va s’ébranler !
« Oui » de l’Israélien, Nadav Lapid, présenté à la Quinzaine des cinéastes 2025, met en scène un musicien qui a la caractéristique d’acquiescer à tout ce que lui demande l’armée d’Israël. « Oui » est une charge contre les béni-oui-oui et les flagorneurs qui acceptent n’importe quel desiderata du pouvoir en s’empressant de les réaliser. Opposant au gouvernement extrémiste et fascisant de Netanyahou Nadav Lapid s’est résolu à vivre une partie de son temps à Paris. Malgré les très nombreux obstacles sur sa route il n’hésite pas à dénoncer la spirale militariste dans laquelle s’enfonce Israël.
« Sirat » du Franco-Galicien, Olivier Laxe, a été récompensé par un Prix du jury à Cannes. L’histoire et celle d’un père et de son fils qui cherchent inlassablement fille et sœur dans les montagnes marocaines où elle a disparu lors d’une rave party. Une très logue marche harassante dans des étendues âpres et désertiques. Selon les croyances musulmanes Sirat est le pont qui sépare l’enfer du paradis, pont que chacun devra franchir au jour du jugement dernier. L’allégorie interpelle… avec justesse !
Cuvée cinématographique 2024, « Le Mohican » doit tout de même être reprogrammé le 31 juillet en présence du réalisateur, Frédéric Farrucci et du principal interprète, Alexis Manenti qui n’avaient pu être à Lama l’année précédente. « Le Mohican », un film traitant admirablement de la spéculation foncière en Corse, une œuvre majeure. A voit et à revoir. En saisissant l’opportunité de débattre avec le cinéaste et son acteur.
Michèle Acquaviva-Pache
• « Télérama fait une place dans sa dernière parution au Festival de Lama. Une belle initiative qui mérite d’être soulignée !
Compétition de courts-métrages corses
Sept courts-métrages sont en compétition
• « A Morra » de Laurenzo Massoni, 28 m’. Par hasard au cœur du Niolo un voyageur découvre le jeu a morra. C’est l’occasion pour lui de faire aussi connaissance avec des gens du cru.• « La cavale » de Christian Risticoni, 17 m’. Un fugitif s’ennuie ferme lors de sa cavale. Quand soudain elle devient mouvementée…
• « Britannicus swimming pool » d’Olivier Arnold, 13 m’. Une reconversion loin d’être évidente !• « Montesoro » de Clément Carvin, 17 m’. Le cimetière militaire allemand situé dans le quartier sud de Bastia. Deux solitaires, presqu’aussi exclus que ceux qui gisent du sommeil éternel, échangent…• « La confrontation » de Sandy Pujol Latour et Marie Abbenanti, 29 m’. Un commissariat. Une policière, Karine. Une plaignante, la jeune Maxime, morte de peur à l’idée de se trouver en face de celui qui l’a agressée enfant.• « Une histoire de vacances »de Malika Zairi, 10 m’. Pour la première fois Hakima, franco-marocaine, refuse de suivre sa famille en vacances à Marrakech, sa ville d’origine. Pourquoi ?• « Les anges » de Mona Favoreu, 17 m’. Un village corse. Des jeunes en vacances. Naissance d’une fascination pour la violence…
ENTRETIEN AVEC MARIE FLORA SAMMARCELLI, présidente du festival de Lama.
Comment se présente cette 31 è édition. Pouvez-vous nous en rappeler le fil conducteur ?
Nous avons comme d’habitude des petites difficultés de dernière minute… mais tout va bien ! Notre devise : « Chronique d’un village monde ». Nous montrons en effet des films de tous les horizons, pas seulement européens ! Cet été, nous proposons, en effet, une œuvre de Nadav Lapid, cinéaste israélien, considéré comme une personnalité de la nouvelle vague de son pays.
Vous dédiez cette édition à Emilie Dequenne récemment disparue. Qu’est-ce qui vous enchantait chez elle ?
D’abord ses qualités humaines, c’était une amie du festival qui nous a soutenu dans des moments difficiles. Professionnellement elle avait une façon de s’engager dans ses rôles et d’incarner ses personnages de manière impressionnante. A l’écran elle était un mélange de force et de sensibilité qui était remarquable.
A l’affiche vous mettez en avant trois réalisatrices. En quoi font-elles un cinéma de femme ?
Que des cinéastes soient des femmes ou des hommes nous attendons d’eux qu’ils ou ellesfassent de bons films !... Que peuvent avoir de particulier des réalisatrices ? Dur de répondre ! Peut-être d’être plus sensibles à certains sujets que leurs homologues hommes !
Comment qualifier les trois films présentés par des réalisatrices ?
« TKT » (t’inquiète pas) de Solange Cicurel, qui a été 25 ans avocate, traite du harcèlement scolaire. Ce sujet n’est pas nouveau au cinéma mais la cinéaste l’aborde de façon inédite. Dans « TKT » Emma, la protagoniste principale, va mener elle-même l’enquête pour savoir pourquoi ses camarades l’ont harcelée et ce par un procédé cinématographique original. Dans « Nino » de Pauline Loquès dont c’est le premier long-métrage, il y a une grande puissance évocatrice et une grande sensibilité, jointes à de l’humour survenant par des situations cocasses. Nino, qui apprend brutalement qu’il est atteint d’un cancer, va trois jours durant cheminer face à cette annonce qui le chamboule par sa violence. Ce que j’apprécie surtout chez Pauline c’est son récit plein de douceur et de tendresse. En outre l’acteur, qui joue Nino, Théodore Pellerin, est extraordinaire. Il a d’ailleurs obtenu le Prix Iris de la révélation pour un précédent rôle à la Semaine de la Critique. « Dites-lui que je l’aime » de Romane Bohringer est l’adaptation du livre de Clémentine Autain. Les deux femmes ont en commun d’avoir été abandonnées par leurs mères. L’histoire de l’une fait écho à l’histoire de l’autre. Toutes deux ont souffert de leur enfance blessée. La tonalité du film, par instants, n’écarte pas l’humour.
Vous proposez une compétition de documentaires et c’est nouveau. Pourquoi ?
Le documentaire contrairement au reportage exige un vrai travail de cinéaste. Des documentaires nous en montrions déjà dans nos éditions précédentes, mais nous voulons sensibiliser encore plus le public à ce genre qui documente la réalité. Parmi ces films il y en a un sur l’adoption auquel je participe. Le titre, « Je suis né avec ma maman au printemps », cette phrase mon fils l’a prononcée en maternelle, parce qu’il est arrivé du Vietnam en Corse à cette saison… Nous projetons également, « Roma ind’è noi » qui ne parle pas seulement de la visite du pape en Corse mais va beaucoup plus loin. Autre exemple avec l’ONG Imagine nous nous sommes impliqués, auprès de collégiens de Biguglia, qui ont choisi de montrer à l’écran des métiers porteurs de valeurs. Ils ont réalisé cinq portraits celui d’une professeure, d’une pompière, d’un artiste (Thomas Bronzini), d’un spécialiste de la montagne (Pedru Pasqualini) et d’un vétérinaire.
Que réservez-vous aux enfants ?
Précisons que les projections pour les petits ont lieu à « U Mercatu ». Ils pourront y voir, entre autres, l’excellent film d’animation, « Flow », « La vie de château », qui aborde la question de la mort sans aucun pathos. A visionner à partir de 6 ans. Le récitant en est Frédéric Pierrot qu’on a pu apprécier dans la série, « En thérapie ».
Quel film en ouverture ?
« Classe moyenne » d’Antony Cordier, qui conte l’affrontement d’un couple de gros bourgeois plutôt déplaisants confronté à un couple de gardiens qui veille sur leur villa du midi. Pendant la projection on rit beaucoup… d’un rire jaune ! On s’esclaffe aussi devant l’humour noir ravageur du cinéaste. Une réalisation vue à La Quinzaine des cinéaste 2025.
Qu’en est-il de votre « Ciné mémoire » ?
Pour les cent ans de « La Ruée vers l’or » nous repassons cette œuvre de Chaplin. Les vues de l’Alaska seront d’un décalage réjouissant en notre été corse ! Pour les cinquante ans des « Dents de la mer » nous projetterons le film de Spielberg à La Piscine. On peut gager que les effets en seront encore plus effrayants sur grand écran que sur celui de la télévision où nombreux sont ceux qui ont découvert cette réalisation.
Le cadre du Festival de Lama est magnifique. Mais ce cadre ne représente-t-il pas quelques difficultés ?
Ce cadre est un atout. Mais pour convaincre cinéastes et gens de cinéma nous avons dû nous entourer de techniciens professionnels indiscutables. Nos projectionnistes sont réputés, ce qui les rassurent, car faire le voyage à Calvi puis prendre la route pour Lama n’effraie personne. Côté public, il y a des gîtes pour se loger. Certes, ils sont loués de la semaine, mais certains festivaliers n’hésitent pas à faire coïncider vacances et festival. Quant à l’hôtel 4 étoiles du village, cela dépend des moyens disponibles de chacun ! Enfin pour faciliter l’accès à Lama nous avons créé des packings doublés d’une navette.
M.A-P
Photo: distruteurs du festival