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BBB Enquête d'un instrument !

BBB, c'est le bastia Blue Band, Au hasard d’un survol de Facebook, une petite annonce : « Cherche instrumentiste – ou saxophoniste ou trompettiste ou clarinettiste – sachant lire la musique et pouvant jouer dans la rue ».
BBB :Enquête d’un instrument !

BBB, c’est le Bastia Blue Band. Au hasard d’un survol de Facebook, une petite annonce : « Cherche instrumentiste – ou saxophoniste ou trompettiste ou clarinettiste – sachant lire la musique et pouvant jouer dans la rue ». Deux BBB, c’est le Bastia Blue Band. Au hasard d’un survol de FaceBook, une petite annonce : « Cherche instrumentiste – ou saxophoniste ou trompettiste ou clarinettiste – sachant lire la musique et pouvant jouer dans la rue ». Deaptitudes indispensables. Bref, un bon musicien !


Un post de Dumè Ferrari, fondateur et pilier du BBB.
Un mot, sur un réseau social dont il n’est pas vraiment fan. Une demande, non dénuée de ces petites touches ironiques dont le musicien est assez coutumier. Car derrière ce « sachant lire la musique » se cache pour l’impétrant l’impérieuse nécessité de déchiffrer les arrangements originaux du Bastia Blue Band et comme il se doit d’être doté d’un minimum de culture musicale.

Créer en 2004 par le trompettiste, Dumè Ferrari, le BBB c’est en l’état : Jean Noël Guglielmacci à la contrebasse ou au trombone, Olivier Lungarella au banjo, Pierre Lambert à la clarinette. Jean Luc Leveque à la washboard. Caractéristique du groupe : être le plus proche possible du son original New Orleans par ses harmoniques et gagner au fil des ans et de l’expérience une maturité lui permettant d’affirmer une liberté d’expression pleine et entière dans ses arrangements. Autrement dit : avoir son style à lui, reconnaissable et identifiable immédiatement.

Ce cycle BBB c’est encore une de ses pirouettes chères à Dumè Ferrari, puisqu’il renvoie à « Better Bureau Business », pur organisme étasunien ayant pour vocation de sauver la mise des acheteurs et des vendeurs lors de tractations commerciales portant le label du libre-échange ! Attention mieux vaut ne pas tomber dans le piège d’une traduction littérale, cette connotation demeurant de l’ordre du clin d’œil.

A l’origine du jazz louisianais il y a du blues, du gospel, des marches, du ragtime et survient dans ce panorama musical le génie qu’est Louis Armstrong, aime à rappeler le Bastiais. Armstrong donne au genre ses fondements en partant pratiquement d’une page blanche après voir retenu les leçons de son maître, King Oliver et beaucoup roulé sa bosse. D’une puissance de jeu inégalable à la trompette., sachant s’entourer d’excellents musiciens il fait du jazz une musique internationale et popularise le scat basé sur l’improvisation. « Jusqu’à présent on ne cesse de redécouvrir l’apport d’Armstrong tant il est resté d’avant-garde ». Même admiration enthousiaste chez Dumè Ferrari en évoquant dans la foulée Miles Davis, explorateur de tant de formes musicales, des Etats-Unis à l’Afrique et à l’Europe, défricheur de tant de voies jusqu’à mêler jazz et trance. Une mention n’ayant rien d’incidente de la part du créateur de l’album, « Protocol inconnu » qui marie chjami è rispondi avec jazz et électro. A la joie de rencontrer à nouveau au hasard d’une place ou d’une rue le BBB en tenue bleu et blanche aux couleurs de Bastia… Vite, on en fait le vœu !


                                 « Avec les concerts de rue il y a le plaisir de jouer dans des endroits différents en journée ou en soirée. »
                                 Dumè Ferrari


Comment s’est fait votre rencontre avec la trompette ?
J’avais 7 ans, j’étais avec ma mère sur la place Saint Nicolas. La fanfare, « La Lyre bastiaise », jouait. C’est de là que date mon amour pour la trompette. Trop petit pour cet instrument j’ai commencé par le cornet à piston.


Quel problème pose la trompette à celui qui en joue ?
Rien ne vibre dans l’instrument. Il est inerte. Ce sont les lèvres qui bougent. Tout est question d’oreille, de souffle. C’est la personne qui vibre et cette personne doit comprendre qui elle est et ce qu’elle a à dire…


Est-ce particulièrement difficile de jouer dans la rue ?

Avec les concerts de rue il y a le plaisir de jouer dans des endroits différents en journée et en soirée. La difficulté est de rester concentré sans s’occuper de ce qu’il y a autour de nous. Il faut être dans son monde à soi et parvenir à y faire entrer les gens qui se sont arrêtés… Surtout on ne doit pas les agresser.


Les dispositions requises ?
Avoir du tonus. Être capable de bouger, de s’adapter, de sentir où ça va sonner !


En 2016 vous avez sorti l’album, « Protocol Inconnu ». C’était une première mêlant chjami è rispondi, trompette-jazz, batterie, guitare, électro. Pourquoi ce défi ?
Pour sortir la musique corse d’un carcan. Parce que le mélange n’empêche pas la cohérence. Parce que ce mélange est dans ma tête.


Dans cet album vous faisiez coexister chjami è rispondi et trance. N’était-ce pas osé ?
Dans les chjami è rispondi les poètes n’ont pas d’autres moyens que les mots pour s’exprimer. C’est sur le mot qu’ils prennent appui et à partir duquel ils développent des métaphores. Comme dans le jazz les poètes improvisent et se répondent. Jazz, trance, chjami è rispondi ne sont pas standardisés. Ils sont libre expression qui remet l’humain au centre. Et l’humain est ce qu’il y a de plus précieux.


Avant la pandémie vous aviez mis au point un concert autour de Boris Vian. Pourquoi ?
L’idée est venue de Nanu Giuly, notre guitariste, notre ancien, puisqu’il a 82 ans ! Je lui ai répondu que sa suggestion n’allait parfaitement : Vian j’aime ! Et Vian adorait le New Orleans !


C’est le jazzman qui vous plait surtout en Vian ?
Le jazzman. Le poète. L’écrivain. Le parolier. Le chanteur. Le critique musical. Le directeur artistique. Le scénariste. Le traducteur. Le conférencier. Le peintre… Et l’ingénieur. Et le pataphysicien…


Comment expliquer que chaque génération redécouvre l’œuvre de Vian, romans ou chansons ?
C’est une constatation : ses chansons sont toujours là. Elles conservent leur actualité. Leur ton ironique, acidulé, provocateur y sont sans doute pour beaucoup.


Qui avez-vous appelé pour collaborer à ce spectacle ?

Nanu Giuly, bien sûr. Pierre Rebouleau, piano. Ange Bianchini, batterie, Jean Paul Beretti, basse.


Quelle est l’architecture de ce spectacle ?

J’ai choisi comme fil conducteur « La complainte du progrès » qui parodie une image du couple version « american way of life » pour qui le progrès se résume en un arsenal d’appareils ménagers censés libérer les femmes et ceci dans la plus grande pauvreté mentale. J’ai aussi retenu « On n’est pas là pour se faire engueuler », « Je bois », « J’suis snob ». On s’écarte aussi à l’occasion du répertoire de Vian en faisant des incursions par des chansons écrites par d’autres qu’il aurait pu chanter ou qui sont en décalage. Le récital dure une heure et je chante.


Composez-vous, en ce moment ?
J’aime faire des boucles harmoniques, des chansons qui n’ont pas de résolution. Ce qui m’inspire c’est la nature, les oiseaux… Les merles qui se baignent dans les flaques d’eau autour de la maison. J’attends avec impatience le printemps pour qu’ils se mettent à chanter et entamer avec eux, en sifflant, des chjami è rispondi à notre façon.


Beaucoup de choses ont changé pour vous et le Bastia Blue Band en cette période de pandémie ?
On ne joue plus ! On ne brise pas les interdits… On avait 40 dates inscrites à notre agenda… Alors on se souvient avec joie de ce rendez-vous à Levie, l’été dernier, qui a été merveilleux… Des hôtes et un public fantastiques. Fantastique encore la présence de Jean Christophe Vilain, tromboniste fameux et célèbre, qui avait fait exprès le déplacement de l’Alta Rocca. Son jeu est pur velours. Un remarquable instrumentiste doublé d’un homme chaleureux.


Comment occupez-vous vos journées ?
On répète… J’écoute du jazz, du funk, du hard rock. Je chante même si je ne suis pas un chanteur à la voix étendue. Je monte des murs en pierre sèche. Je coupe du bois : du chêne-liège.

Propos recueillis par M.A-P


Eviva Vian !

Heureuse l’idée de ce récital Boris Vian par Dumè Ferrari et pourquoi ne pas se précipiter à nouveau – ou pour la première fois – dans la prose poétique et surréaliste de « L’Ecume des jours », de « L’automne à Pékin », de « L’arrache-cœur » ou dans le pastiche « porno-polar » de « J’irai cracher sur vos tombes », trainé en justice par des tartuffes. Courrons – quel vaccin extra ! – réécouter ses chansons. Il en existe une foule qui ont été enregistrées dont les antimilitaristes « La java des bombes atomiques », parodie des savants fous mettant la planète au bord du gouffre et « Le déserteur » qui lui valut en 1954 les foudres de la censure dans une France passant de la guerre d’Indochine à celle d’Algérie. On peut aussi opter pour le comique du « Blouse du dentiste » ou de « Fais-moi mal Johnny », perles jubilatoires de moqueries du blues et de la chanson noire.
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