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Core in fronte Scontri populari : concurrence ou future reléve ?

Un outil de construction d'un véritable projet de société
Core in Fronte ambitionne que « Scontri Populari » soit un outil de construction d’un « véritable projet de société » et devienne un rendez-vous politique majeur.



Les Ghjurnate Internaziunale di Corti n’auront pas lieu. Le rendez-vous politique traditionnel du premier week-end d'août est lui aussi victime du Covid-19. Corsica Libera a précisé qu'il ne s'agit que d'un report : « Compte tenu de la problématique sanitaire actuelle et des dernières données objectives dans ce domaine, nous ne considérons pas comme responsable de maintenir les Ghjurnate aux dates habituelles » et a invité à des retrouvailles en 2021 à l’occasion du quarantième anniversaire de l'événement. Les Ghjurnate ne sont certes plus le grand rassemblement populaire qui réunissait, durant les années 1980 et 1990, des milliers de militants et de sympathisants. Elles ont pâti de l’affaiblissement général de l’intérêt pour l’idéologie et l’expression politique. Elles ont été affectée par l’effacement des clandestins dont les apparitions sur scène ou les communications étaient fréquentes, souvent importantes et toujours très attendues. Les affluences particulièrement en baisse de ces dernières années ont aussi reflété la perte d’influence de Corsica Libera au sein de la mouvance nationaliste. Enfin, il n’est pas à exclure que les Ghjurnate ne répondent plus à l’attente de la plupart des militants et sympathisants nationalistes, et plus globalement des Corses.
En effet, la présence de délégations venues des quatre coins de la planète et l’évocation des combats nationalistes dans le monde ne semblent plus guère susciter l’intérêt ou la curiosité. L’évocation des problématiques corses est probablement davantage attendue.

Les Ghjurnate restent néanmoins un moment important de la vie politique et un indicateur des réalités au sein de la mouvance nationaliste. Comme l’affichait jadis La Samaritaine, un des emblématiques grands magasins parisiens, « Il se passe toujours quelque chose aux Ghjurnate ».
Ainsi les deux dernières éditions ont été marquées par des événements qui ont respectivement représenté une cinglante mise au point et une importante confirmation. En août 2018, Gilles Simeoni et Jean-Christophe Angelini ont refusé de participer au débat « Pè a Corsica : un paese da fà » dont Charles Pieri devait être l’animateur. Tous deux ont ainsi affirmé leur volonté de maintenir sans ambiguïté un cap réformiste et d’ouverture, et leur refus que l’ancien responsable du FLNC-Storicu, sujet à la controverse, apparaisse comme un influenceur majeur de la majorité territoriale.
En 2019, l’absence de Gilles Simeoni et la teneur des interventions ont permis à l’assistance et aux observateurs politiques de définitivement se convaincre que les trois partis de la majorité territoriale (Pè a Corsica) n’iraient pas ensemble au combat à l’occasion des élections municipales de mars 2020.



Scontri Populari : des ambitions affichées



Core in Fronte qui ne l’avait certes pas prévu, pourrait être grandement bénéficiaire du report des Ghjurnate. En effet, la non-tenue de ces dernières intervient alors que ce parti organise pour la première fois un grand événement politique et culturel estival. Intitulé « Scontri populari », il aura lieu à Patrimonio, le jour et le lendemain de la parution du présent article (31 juillet et 1er août). Il consistera en deux journées d'échanges politiques, économiques culturels « ouverts et appelés à se renouveler chaque année dans une microrégion différente ».
Le thème de la présente édition est «Terra è Ghjenti ». Il s’inscrit dans la perspective « de mettre les hommes et les territoires au cœur des problématiques de la Corse ». Outre l’ancrer dans la réalité corse et en faire un lieu d’échanges, Core in Fronte ambitionne aussi que « Scontri Populari » soit un outil de construction d’un « véritable projet de société » et devienne un rendez-vous politique majeur. Et d’expliquer : « Les Corses attendent des réponses claires sur la question des déchets, l’agriculture de production, le tourisme maitrisé, les transports, l’énergie, la santé, les institutions ou encore la question des prisonniers (…) Nous devons montrer ce que nous pouvons faire Da per Noi.

Les Scontri Populari seront justement l’occasion de dialoguer avec l’ensemble du Mouvement national, les syndicats, les acteurs économiques, les associations, ainsi que les nombreuses personnalités de la société civile. » Les thèmes des communications et des tables rondes programmées (réappropriation historique, prisonniers politiques, respect des principes fondamentaux de la Justice et des Droits de l’Homme, Urbanisme et ruralité, Indépendance alimentaire, Tourisme hôtelier et Résidences secondaires, Economie numérique) ainsi que la qualité des intervenants et animateurs, tout comme d’ailleurs le débat politique et institutionnel annoncé (A nostra suvranità Da Per Noi) sont à la hauteur des ambitions affichées.
Reste à savoir si les acteurs politiques, syndicaux et associatifs sollicités et le public attendu répondront présents. Si globalement oui et si l’édition 2021 a lieu, et également si Core in Fronte fait bonne figure à l’occasion des élections territoriales de mars 2021, Scontri Populari pourrait représenter un sérieux concurrent pour les Ghjurnate ou même une relève.

Dans le passé, précisément au début des années 1980, un événement estival dont la première édition avait eu lieu dans l’enceinte de la citadelle de Corte, n’avait réuni que quelques centaines de participants. Il paraissait bien malingre si l’on se référait aux foules qui s’étaient pressées sur les chapiteaux autonomistes de l’ARC puis de l’APC. Quelques années plus tard, cet événement rassemblait des milliers de personnes, recevait des délégations étrangères et des artistes de renommée internationale se produisaient durant ses soirées culturelles. Les chapiteaux autonomistes n’étaient plus. Surfant sur une Lutte de Libération Nationale qui répondait alors aux attentes de la majorité des nationalistes, les chapiteaux des Ghjurnate Internaziunale les avaient remplacés.



Pierre Corsi



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