• Le doyen de la presse Européenne

Territoriales : Gilles, Laurent, Jean-Christophe, Paul-Félix et les autres......

Les listes ont toutes été publiées. Le premier tour met en lumière trois types d'enjeux: peser, survivre, préparer.
Territoriales : Gilles, Laurent, Jean-Christophe, Paul-Félix et les autre

Les listes ont toutes été publiées. Le premier tour met en lumière trois types d'enjeux : peser, survivre, préparer.


Gilles, Laurent, Jean-Christophe et Paul-Félix ambitionnent de peser lourd.

La liste Gilles Simeoni (Fà populu inseme) est taillée pour tenter de "plier le match" dès le premier tour face à la liste Laurent Marcangeli et ainsi éviter d'avoir à passer par le casse-tête de la fusion. Elle peut tabler sur la notoriété du "patron" et sa stratégie "attrape-tout" et "mise hors-du-jeu" des partis politiques (similaire à celle d’un certain Emmanuel Macron), sur la présence presque envahissante d'élus majeurs Femu a Corsica de communes du Grand Bastia ainsi que, dans le rural, sur une retombée positive des élections législatives de 2017 (d'où sans doute la présence de Jean-Félix Acquaviva malgré le risque qu’il soit accusé d'une volonté de cumul).

Le choix tactique est simple : susciter une mobilisation du Nord (y compris anti-Sud) où Laurent Marcangeli est a priori insuffisamment implanté, compter sur quelques individualités ou conditions locales pour limiter les dégâts au Sud où Laurent Marcangeli doit compter avec la montée en puissance de Jean-Christophe Angelini. Ce choix "gillo-nordiste" a sans doute déterminé, faute de places pour tout le monde, le renoncement ces derniers jours à la grande ouverture dont notamment quelques individus et les socialistes ont fait les frais. Laurent Marcangeli (Un soffiu novu) veut arracher une avance de plusieurs points au premier tour car ses réserves seront a priori peu importantes au deuxième et ainsi imposer à Gilles Simeoni au moins une perturbante fusion à risque.
Pour ce faire, il a assuré ses positions au Sud pour réduire la marge de manœuvre de son principal adversaire et exploiter la déroute du candidat de ce dernier aux élections municipales d'Ajaccio (Jean-André Miniconi ne figure d'ailleurs pas sur la liste Fà populu inseme), contenir Jean-Christophe Angelini et réduire à peu de choses Jean-Charles Orsucci.

Au Nord, il peut en principe compter sur des soutiens de poids dans le Cortenais, en Balagne et bien entendu du côté de la Marana. Il n'a toutefois pas réussi à verrouiller en Plaine orientale et à séduire François-Xavier Ceccoli qui préside la fédération 2B Les Républicains. Jean-Christophe Angelini a pour sa part bâti une liste (Avanzemu) dont l'objectif est de faire jeu égal avec celle de Gilles Simeoni et d'imposer à ce dernier une répartition équitable des responsabilités et des orientations politiques associant pragmatisme et respect des fondamentaux du nationalisme. A partir d'une solide assise dans le Sud et de points d'appui en Balagne, en Casinca, à Corte et dans le Fium'Orbo, la liste Avanzemu mène bataille avec des sortants ayant fait leurs preuves, des militants chevronnés disposant de réseaux et des recrues d'ouverture de poids. Enfin, la liste conduite par Paul-Félix Benedetti (Da per noi) a l'ambition de jeter les bases d'une nouvelle génération nationaliste associant les fondamentaux idéologiques et les actions de terrain, à la compétence gestionnaire et à des réponses fortes à la question sociale. Fort d'un socle militant actif qu’il a su élargir et surtout d’avoir frôlé ce résultat en 2017, Paul-Félix Benedetti peut raisonnablement espérer franchir la fameuse barre des 7% et obtenir plusieurs élus pour faire entendre ou prendre en compte les revendications nationales et sociales du parti Core in Fronte dont sa liste est issue.

Les autres...

Jean-Guy, Jean-Charles et Michel vont se battre pour assurer la survie de leur démarche politique.
Après avoir tenté jusqu'au bout de préserver l'unité de la coalition Pè a Corsica, Jean-Guy Talamoni va peut-être livrer son dernier combat en tant que tête de liste (Fà Nazione). Il le fera, comme il l'a toujours fait, en militant exemplaire et leader talentueux. Même si les sortants de son parti et Lionel Martini ont rejeté les tentatives de débauchage et font bloc autour de lui, Jean-Guy Talamoni est confronté à un obstacle de taille : il doit réaliser 7% pour être maître de son destin ou 5 % pour espérer fusionner avec une liste nationaliste ayant franchi 7%. Et ce : en ayant dû composer sa liste en dernière minute, sans avoir pu préparer le terrain, en étant en concurrence directe avec Paul-Félix Benedetti dont le parti, Core in Fronte, s'est emparée de la fonction tribunicienne qu'avait longtemps exercée Corsica Libera.

Jean-Charles Orsucci qui mème la liste Corse, terre de progrès, est lui aussi à la peine. Alors que son résultat 2017 à deux chiffres l’autorisait à espérer jouer dans la cour des grands, il constate que soutenir le pouvoir parisien et avoir ménagé la majorité territoriale ne lui valent que déboires et ingratitude. Réputé être macroniste, il est une victime collatérale des excès du préfet Lelarge et a perdu du crédit à gauche. Si la ministre Marlène Schiappa a déclaré à Bonifacio qu'il serait le chef de file de La République en Marche, la ministre Jacqueline Gourault a médiatiquement signé à Bastia, avec des élus siméonistes, une convention PTIC (Plan de Transformation et d'investissement pour la Corse) d'un montant de 150 M€ et fumé le calumet de la paix avec Gilles Simeoni. Enfin, il se dit que Gilles Simeoni aurait tout mis en œuvre pour dissuader des maires de s’engager aux côtés de leur collègue bonifacien. La marche 7 % qui est l’objectif minimal annoncé, sera difficile à atteindre. D’autant que des sortants ont succombé aux chants des sirènes d’autres listes.

Le leader communiste Michel Stefani n'est pas logé à meilleure enseigne. Il a la rude tâche conduire une liste a priori faible (Campà megliu in Corsica) qui, ne pouvant et ne voulant fusionner avec aucune autre liste, doit impérativement réaliser 7% pour permettre un retour de la gauche dans l’hémicycle de l’Assemblée de Corse. Pour faire mieux que la liste Jacques Casamarta qui avait atteint 5,68 % en 2017, Michel Stefani et ses colistiers devront reconquérir une partie de l’électorat populaire qui s’ancre dans l’abstention ou le vote nationaliste ou Rassemblement national, ainsi que capter des suffrages d’électeurs de gauche non-communistes.

Quant à Agnès, François et Jean-Antoine, s’ils ont peu de chances d’atteindre 7% ou 5%, et ils le savent, tous trois entendent délivrer des messages forts et préparer l'avenir. La liste Agnès Simonpietri (Ecologia Sulidaria) souhaite remettre en avant de grands « dossiers verts » qui restent à traiter concrètement (déchets, bétonisation, économie circulaire...) et restaurer l’identité et l’autonomie d’une écologie politique qui s’était diluée au sein du nationalisme. François Filoni, tête de liste Les nôtres avant les autres, a de son côté pour mission de remettre sur les rails le Rassemblement National qui, chez nous, excelle dans la chicane interne, l’implosion ou l’explosion. N’étant pas de la maison, il n’est pas au bout de ses peines. Mais en cas de résultat qu’il jugerait décevant (forte probabilité même si Marine Le Pen vole à son secours quelques heures), aura-t-il la constance de poursuivre sur le chemin de croix ? On peut en douter… Ce qu’espèrent d’ailleurs Jean-Antoine Giacomi. En effet, avec la liste Fora Nova, lui et son directeur de campagne Filippo di Carlo font le pari de supplanter le Rassemblement National en ancrant et installant dans la durée une droite populiste corse qui aurait sa place au sein des droites identitaires et souverainistes européennes.



Pierre Corsi


Partager :