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Alindì: " repousser les limites de l'imaginaire de la Corse "

Entretien avec Gérôme Bouda, cofopndateur d'Allindì
Allindì : « repousser les limites de l’imaginaire de la Corse »


L’un des objectifs principaux d’Allindì, société d’édition et de production audiovisuelle ajaccienne, était de développer des outils numériques innovants en faveur de la langue et la culture corses. Lancé il y a un an et demi, son projet majeur – une plateforme SVOD « un peu comme Netflix » – centralise déjà plusieurs centaines de créations corses et méditerranéennes.


« Scunfinà l’imaginariu di a Corsica »

« Repousser les limites de l’imaginaire de la Corse », tel est le pari d’Allindì. L’entreprise s’appuie sur une dynamique corsophone et moderne. Son nom, « A llindì », est un néologisme : de « lindu » (limpide, clair) transformé en verbe. La volonté d’Allindì est de simplifier l’accès à des contenus, productions et coproductions insulaires et méditerranéennes, à une époque où il est toujours difficile de les retrouver quelques mois ou années après leur diffusion. La raison : avant Allindì, il n’existait aucun support ou plateforme pour les héberger sur la durée, une situation d’autant plus paradoxale à l’ère de la révolution numérique. Allindì a donc fait le choix de promouvoir un système moderne, adapté aux nouveaux modes de consommation (semblable à Netflix, PrimeVideo, Disney+, etc.) qui permettrait de rapprocher les Corses de ces productions audiovisuelles méconnues. La production insulaire propose de nombreux films de grande qualité et primés dans des festivals partout dans le monde, mais ils sont finalement très peu vus par le public. L'ambition d’Allindì est de les faire connaître.

Au-delà de l'outil et de l'accessibilité, cette démarche permet aussi à tout un chacun de contribuer au développement de l'audiovisuel en créant une opportunité supplémentaire aux ayants-droits, afin de valoriser leurs œuvres.


Une plateforme « SVOD »

SVOD vient de l’anglais « subscription video on demand », soit un service de films et vidéos à la demande. Cette plateforme peut aussi servir de complément de diffusion pour les producteurs et créateurs corses. Avec un abonnement économique (4€/mois), les utilisateurs ont accès à l’ensemble du catalogue, et peuvent regarder chaque film, série, documentaire, etc. Le catalogue d’Allindì est régulièrement enrichi de nouveaux programmes, avec pour objectif de devenir peu à peu un vrai « Netflix à l’usu Corsu. » Cette démarche s’accompagne d’une éditorialisation riche, avec newsletters, bonus, interviews, etc. Accessible à tous, cette plateforme permettra aussi aux seniors, moins habitués aux nouvelles technologies, de maîtriser le service, et de retrouver les programmes qu’ils souhaitent regarder en quelques clics. Allindì s’adapte aussi à la qualité du réseau (HD ou SD, par fibre, en 3, 4 ou 5G), et à toutes les machines (mobile, tablette, pc, mac).

Un projet complexe tant au niveau technique que juridique, mais qui permettra peut-être, selon Maria Francesca Valentini et Gérôme Bouda, les deux co-fondateurs d’Allindì SAS, de répondre aux défis de demain, qu’il s’agisse de la sauvegarde de la culture corse ou de la transmission de sa langue.

Quel bilan après un an ?

Lancé au 1er Août 2020 avec le Festival de Lama, la plateforme Allindì SVOD se développe peu à peu, avec chaque mois de nouveaux programmes. Allindì a par ailleurs réalisé et produit plusieurs films et documentaires en interne, comme l’odeur du Gaz, ou encore Quastana : portrait de campagne. Il y a pour l’instant en lignes plus de 400 œuvres et près de 250h de programmes, et de nombreuses nouveautés à venir…



Andria Faggianelli





Entretien avec Gérôme Bouda, cofondateur d’Allindì


Parmi les nouveautés du mois de février sur Allindì, il y a l’apparition d’une catégorie longs-métrages ?

En effet à partir de Février, Allindi propose une catégorie dédiée aux longs métrages. Place donc aux fictions et documentaires d’une durée supérieure à 59 minutes, reflétant une grande diversité de formes et de fonds. De la révolte de femmes emprisonnées en Israël à la résistance d’un écrivain français face à l’appétit du couturier Pierre Cardin qui achète son village d’origine, en passant par le pèlerinage de 400 km de femmes portugaises vers notre Dame de Fatima … On a un bel éventail de longs métrages à découvrir et à savourer !

En parallèle, vous êtes en train de clôturer un appel à projet ?

C'est un appel à projets qui va s'arrêter début mars. Il s’agit d’un partenariat entre la Collectivité de Corse avec la Cinémathèque de l’île – Casa di Lume – le Laboratoire Culturel Culori et Allindi. L’objectif est de donner à 3 réalisateurs accès à une centaine d'heures du fond d’archives amateures de la cinémathèque de Corse pour créer des mini documentaires de 15 à 20 minutes. Cette matière brute, fixée sur la pellicule par des amateurs ou des professionnels tout au long du 20ème siècle, est une source créatrice vive que nous souhaitons mettre au service d’un cinéma documentaire de création, capable de questionner l’avenir de notre île et de ses populations. Ces films doivent offrir une lecture en langue corse de la Corse contemporaine et de ses particularités à travers le recours aux images d’archives et à leur confrontation à la Corse de 2021.


Et avez-vous déniché des perles rares ?

On n’a pas encore fait de sélection mais on a quelques propositions intéressantes, émanant plutôt de jeunes gens ! 3 films courts (15 à 20 minutes) seront retenus dans les différentes catégories :

Film ouvert aux étudiants de l’Université de Corse, avec coréalisation possible : par exemple un binôme étudiant histoire/cinéma, cinéma/studii corsi, studii corsi/arts etc…

- Jeune réalisateur (1er, 2ème ou 3ème film), pour les réalisateurs de moins de 40 ans.

- Et enfin réalisateur confirmé (plus de 6 films réalisés avec une société de production).

Allindì, a Casa di Lume et Culori permettront aux réalisateurs retenus de produire leurs films, qui seront visibles sur Allindi.com et dans le cadre des projections de la Cinémathèque de Corse.


Vous êtes désormais reconnus comme diffuseur par le CNC ! Qu’est-ce que l’on peut souhaiter à Allindì pour l’avenir ?

Alors, autre nouveauté : le Centre national du cinéma a reconnu Allindì comme diffuseur, comme le sont ViaStella et TéléPaese. Ça veut dire que l’on peut aussi devenir un levier de financement pour les films que l’on veut soutenir, et que l’on pourrait éventuellement produire. On s’inscrit donc dans un schéma traditionnel avec une demande un peu différente des télévisions puisqu’on n’a pas les mêmes nécessités d’antenne. D’ailleurs, pour pouvoir accompagner les auteurs, grâce au soutien de la CDC, nos locaux sont actuellement en plein chantier : on va très prochainement avoir deux salles de montage et une salle d’enregistrement de son ! Donc on se donne les moyens d’apporter un réel soutien technique aux producteurs indépendants, et on va essayer de faire vivre ces outils auprès d’associations. C’est vraiment ce que l’on peut souhaiter à Allindì : continuer son chemin et on en est qu’au début, pour pouvoir proposer assez vite des programmes dans lesquels se retrouveront les Corses de 3 à 103 ans.
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