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Quand travailler est pénible, "Le travail , c'est la santé. Rien faire c'est la conserver"

Cette chanson d’Henri Salvador annonçait les grèves de 68 au nom du droit de ne pas perdre sa vie à la gagner.
Quand travailler est pénible

« Le travail, c’est la santé. Rien faire c’est la conserver ». Cette chanson d’Henri Salvador annonçait les grèves de 68 au nom du droit de ne pas perdre sa vie à la gagner. Elle reste actuelle, la réforme des retraites remettant la pénibilité au travail sur la table des négociations. Entre les cols bleus qui se cassent le dos et les cols blancs qui se prennent la tête, le travail est loin d’être un parcours de santé.

Évolution de la pénibilité

Depuis Les Temps modernes de Chaplin, de nombreuses avancées ont été faites pour atténuer les effets sur la santé des salariés grâce aux apports de l’ergonomie, aux évolutions des organisations du travail, mais aussi aux avancées des CHSCT et aux obligations de l’employeur en matière de santé et sécurité. Mais si le travail s’humanise, la pénibilité ne s’est pas effacée. Aujourd’hui, même si 82 % des professions sont dans le tertiaire, les professions de type artisanal (maçons, agents d’entretien, commis de cuisine, jardiniers, chauffeurs routiers, caristes, ouvriers agricoles…) et celles du care (santé, soins et aide à domicile, propreté...) ont des conséquences directes sur la santé. Ainsi, les troubles musculo-squelettiques (TMS) représentaient 87% des maladies professionnelles en 2020, passant de moins de 5 000 cas au début des années 1990 à près de 45 000 aujourd’hui. Les TMS représentent 90 % des maladies professionnelles imputées aux comptes employeurs en 2019 en Corse, loin devant les affections liées à l'amiante ou aux atteintes auditives. 20% des accidents du travail concernent la zone du dos et sont liés aux différentes manutentions. Par ailleurs, les risques psychosociaux, qui enregistrent l’intensification psychique du travail, représentaient 34% des arrêts maladie, selon le dernier « Baromètre annuel sur l’absentéisme » de Malakoff Humanis. En 2022, la durée moyenne des arrêts longs est de 97 jours. 64% des entreprises ont connu au moins un arrêt long dans les 12 derniers mois (vs 60% en 2020), notamment dans les secteurs de l’industrie, du BTP et de la santé.

Santé au travail

Un Plan de Santé au Travail est élaboré tous les cinq ans depuis 2004, décliné en région par les Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS). Le PRST 4 de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur-Corse a été présenté en décembre 2021. Il focalise sur la prévention des risques et leur évaluation pour favoriser la qualité de vie au travail, ainsi que les conditions de travail. Il existe un accord collectif de branche étendu qui caractérise les postes, métiers ou situations de travail exposés à la pénibilité. Dans le Code du travail, dix facteurs ont été retenus pour qualifier la pénibilité du travail, dans trois catégories qui sont les contraintes physiques marquées (manutentions manuelles de charges lourdes, postures pénibles, vibrations mécaniques), les rythmes de travail (travail de nuit, en équipes successives alternantes, répétitif ou à cadence contrainte), l’environnement physique agressif (travail en milieu hyperbare, températures extrêmes, bruit, agents chimiques dangereux). L’obligation de mettre en place des mesures de prévention est applicable pour tous ces facteurs de risques professionnels. En revanche, les mesures de compensation sont différenciées.

CPPP

Le compte personnel de prévention de la pénibilité, ou CPPP est automatiquement créé depuis janvier 2017 pour les salariés de droit privé exposés à des facteurs de risques professionnels et intégré au compte personnel d'activité (CPA). Le CPPP doit permettre de diminuer les risques et de compenser les salariés par l'acquisition de points, jusqu'à 100 sur l'ensemble d'une carrière. Ces points, calculés depuis 2015, pourront être utilisés pour partir plus tôt à la retraite (jusqu'à 2 ans), bénéficier d'un temps partiel sans diminution de salaire ou encore obtenir une formation professionnelle en vue d'accéder à un poste moins exposé à des facteurs de risques. Tous les employeurs (hors particuliers) ayant des salariés de droit privé, pour au moins un mois, affiliés à la sécurité sociale sont concernés par le CPPP. Et ce, quels que soient la taille, le statut juridique ou l'activité de leur entreprise. Toutes les professions ne sont pas concernées, alors que les chiffres des risques psychosociaux explosent. Car l’inhumanité du travail posté et de l’usine a pris un autre visage, mais demeure. Cela n’est pas le travail qui n’a plus de sens, c’est le sens du travail qui s’est perdu.

Maria Mariana
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