• Le doyen de la presse Européenne

Une page à moitié tournée

Une main tendue à l'exécutif

Une page à moitié tournée


Gérard Darmanin est un homme habile. Son discours prononcé devant la stèle commémorative érigée en hommage du préfet Erignac aurait pu être vindicatif comme l'avait été celui du président Macron. Il aurait pu être parfaitement neutre. Il a choisi de tendre la main à l'exécutif en semblant enfin tourner la page écrite le 6 février 1998 avec l'assassinat du préfet Erignac.
Quant à l'apparition de la Ghjuventù Clandestina Corsa, elle tient évidemment du positionnement des différents groupes au sein du mouvement nationaliste. Qui peut croire que des incendies de maisons — cruels pour les malheureux propriétaires — ou d'immeubles — une guerre entre promoteurs ensuite « empruntés » par des clandestins ? — vont changer la donne sinon apporter de l'eau au moulin de ceux qui veulent que rien ne change ? Donc c'est au mieux un non-évènement, au pire une conspiration de jeunes manipulés mais par qui ?

Une symbolique particulière


En s'inclinant devant tous les morts, Gérard Darmanin a fait œuvre utile. Il ne fait aucun doute qu'il faisait essentiellement allusion à Yvan Colonna ce qui demandait du courage puisqu'au même moment le président de la République recevait la famille du défunt préfet. On se souvient du discours agressif, stupide d'un Emmanuel Macron flanqué d'un Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'Intérieur calamiteux en 1998 face à Gilles Simeoni, président de l'exécutif mais aussi ancien conseil d'Yvan Colonna.
Jamais la République française n'a autant honoré un haut fonctionnaire tombé dans l'exercice de ses fonctions. Jean Moulin, nommé préfet en 1937, grand résistant puis assassiné par le gestapiste Klaus Barbie, n'a pas eu droit à de tels honneurs pas plus que Yann Piat, député de la République assassinée par la mafia locale le 25 février 1994. Seul le préfet Erignac a été ainsi honoré. La seule raison est qu'il avait été une victime d'un terrorisme qui défiait l'État. C'était également vrai pour les victimes d'Action directe, le général Audran et George Besse, le P.-D.G. de Renault alors entreprise nationale désormais oubliés de tous.

Une punition collective


Il ne fait aucun doute que l'immense majorité des Corses ont condamné l'assassinat du préfet Erignac. Les dizaines de milliers de personnes qui ont défilé dans la rue afin de témoigner leur rejet de ce geste en ont témoigné. Il faut d'ailleurs rappeler qu'alors les organisations nationalistes elles-mêmes avaient émis des communiqués allant dans le même sens allant jusqu'à supposer qu'il pouvait s'agir d'une provocation montée par les services secrets ou d'un crime perpétré "par la mafia". La Corse ne méritait pas la punition collective qui lui a été infligée par l'Etat et qui, en fait, était le but recherché par le commando dit Erignac.

Regarder vers l'avenir


Je doute que l'Etat puisse concéder un quelconque changement constitutionnel de statut dans les circonstances actuelles alors qu'il ne parvient pas à réunir une majorité pour faire passer sa loi sur les retraites. L'important est maintenant de trouver des solutions à nos problèmes de gestion du territoire. Je vais le répéter comme chaque semaine : les transports, l'énergie, les déchets et la décentralisation locale. Car enfin, il n'aura servi à rien d'obtenir la réunification de la région et des départements si le résultat final est un montre obèse qui peine à avancer serait-ce d'un centimètre.
Pourquoi ce qui est demandé à Paris ne saurait être valable en Corse ? Les microrégions, les communes ont besoin d'air. Elles doivent pouvoir agir sans être sans cesse infantilisées en demandant au centre la permission d'avancer. Sans cela, nous serons une majorité à regretter l'ancien statut obtenu faut-il le rappeler alors même qu'un référendum local l'avait repoussé. Si l'ouverture accordée semble-t-il par Gérard Darmanin, devait aboutir à, de nouveau, bêler le mot d'autonomie sans qu'on en définisse très précisément le contenu et les limites, alors tout cela n'aura servi à rien. C'est d'ailleurs ce qu'a martelé le ministre de l'Intérieur dans une interview qui a douché l'enthousiasme déclenché par son discours. Mais on ne peut que lui donner raison : à quoi sert-il de rester dans l'idéologisme alors que sur le terrain les actes ne démontrent en rien une capacité à gérer les problèmes de l'île ? Tant que la majorité s'avérera incapable d'offrir des garanties quant à sa créativité gouvernementale, rien n'avancera. Et les incendies allumés par des clandestins en mal de moyens et d'imagination n'y changeront rien.

GXC
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