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Une faute politique qui va peser lourd

Un hold-up légal et démocratique : le 49.3

Une faute politique qui va peser lourd



La loi portant sur les retraites est donc passée grâce à un hold-up légal et démocratique : le 49.3. C’est un désastre à court, moyen et long terme pour la classe politique française en général. En opposant la légalité à la légitimité sociale, la droite a réussi à donner du corps à la rue c’est-à-dire au peuple en marche et à offrir la victoire à la seule formation gagnante de cet immense gâchis : le Rassemblement national.


Une République chaotique


On se souviendra de cette loi retraite. Le Parlement s’est montré sous son jour le plus lamentable : chahuts, insultes, blocages… bref un foutoir en partie causé par les députés de la France insoumise dont on se demande ce qu’ils désiraient. Il n’est pas impossible qu’ils aient misé sur la colère de la rue contre la paralysie parlementaire. La droite est en lambeaux. Elle s’est prêtée à un lamentable jeu de dupes pour en fin de compte faire partie des dindons de cette farce amère. Elle aura été le paillasson d’une majorité plus que relative pour en définir être abandonnée sur le bord de la route car l’inconnue d’une impossible équation. Mais le plus grave n’est pas le bazar des députés ou la suffisance insupportable des sénateurs. C’est la rupture durable entre le pays législatif et le monde du travail.
Les « gens qui savent », ceux qui nous gouvernent peuvent bien se donner des airs professoraux pour démontrer qu’en 2040 on irait à la faillite, la vérité est que ceux qui vont le plus pâtir de la nouvelle loi ne seront pas les cravatés sortant des grandes écoles, les héritiers de la nouvelle aristocratie, mais bien ce monde d’invisibles qu’au moment de la pandémie, nous applaudissions chaque soir. Ce sont les dos cassés, les « sans dents » pour reprendre la misérable expression de François Hollande, qui en prennent pour deux ans supplémentaires.
C’est dans cette masse qu’autrefois on appelait le peuple que la colère, le ressentiment, l’impression d’avoir été méprisé après avoir tout donné sont en train de devenir un fait politique majeur : le carburant d’une victoire du Rassemblement national.

Comme un air de solidarité


Le monde politique est un monde de voyous. On s’y étripe, on s’y trahit, on s’y élimine sans états d’âme. La grande tradition ouvrière en France, malgré les errements et les erreurs a, au contraire, été de bâtir des solidarités, des entraides, de créer du lien entre les plus démunis. Les Gilets jaunes incarnaient déjà cette recherche d’une fraternité lors des rassemblements de ronds-points. Le confinement a, au contraire, démantelé ces fragiles rapprochements. Le monde du travail a été en partie fragmenté par le travail à domicile. Internet, sous l’apparence de relations plus aisées entre individus, a renforcé les solitudes. Pendant les mois de pandémie notre relation à la société n’a existé que grâce à ces professions indispensables : infirmièr (e) s, éboueurs, techniciens de surface, caissières bref tous ces petits métiers payés au lance-pierre.
Ce sont celles et ceux-là qui sont descendus dans la rue contre la loi retraite, retrouvant durant quelques semaines le bonheur de se retrouver autour d’un but commun. Ce sont celles et ceux-là à qui le président et ses valets viennent de lancer avec mépris que s’ils n’ont pas de pain, ils n’auront qu’à manger de la brioche. La mobilisation a eu des airs de fête, ceux d’une parenthèse enchantée que nous avons autrefois connue et qui vient de se refermer brutalement parce qu’un président n’a pas osé écouter la volonté du peuple.
Alors que 90 % des travailleurs ont dit refuser de cette loi, alors que la députation elle-même allait peut-être la repousser, il s’est trouvé un quarteron de ministricules pour décider urbi et orbi ce qui serait bon pour des dizaines de millions de sujets. Fichue démocratie qui foule aux pieds son principe élémentaire : la volonté du peuple. Il eut pourtant été facile de se retrancher derrière les résultats d’un référendum. Mais c’était trop demander à ce monde de petits marquis qui se croit investi d’une mission de sauvegarde du pays alors qu’il n’agit qu’en défense de la Finance et des trusts internationaux, un monde dans lequel plusieurs élus et ministres possèdent des intérêts immédiats.

Le RN en embuscade


En face d’une gauche qui a ferraillé sans discontinuer, mais qui peine à faire oublier qu’elle aussi s’attaqua au système des retraites, la seule force à sortir renforcé de cette incroyable catastrophe démocratique est le Rassemblement national qui, en restant discret et pondéré, a paru respectueux des institutions. Forte d’un électorat comprenant la plupart des électeurs des couches sociales les plus modestes, Marine Le Pen a campé sur sa position initiale, à savoir la retraite à soixante ans pour les longues carrières et soixante-deux pour les autres. Il ne fait aucun doute qu’en cas d’élection, elle attirera à elle un nombre conséquent d’électeurs qui n’en peuvent plus du mépris affiché ouvertement par le pouvoir.

GXC
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