• Le doyen de la presse Européenne

Pascal Ouedraogo, expose à la galerie bastiaise Noir et Blanc jusqu'au 2 février

De merveilleux batiks

Pascal Ouedraogo, peintre

De merveilleux batiks



Au piquet Mali, Burkina Faso, Niger. Mécontent, Paris a fermé dans ces pays ambassades, consulats et évacué ses troupes… N’en déplaise à l’ex-colonisateur La Galerie bastiaise Noir et Blanc expose les fameux batiks du Burkinabé, Pascal Ouedraogo. Des batiks ouvragés avec finesse, sensibilité, poésie… A découvrir et à admirer jusqu’au 6 février.



Cette exposition est rendue possible grâce à L’Association Solidarité Af
rique Sahel dont le responsable est Philippe Clerc de Meria. Les œuvres de Pascal Ouedraogo sont singulières, déroutantes pour certaines. Toutes questionnent, ce qui au fond est le propre de l’art. Une seule est franchement de couleurs vives. Elle invite à visiter un village traditionnel, un village de tous les temps. A l’arrière-plan on suit un ballet d’arbres dont le branches se dressent au ciel… pour une supplication ? Qui sait ! Deux rangées de silhouettes hum​aines non genrées semblent absorbées par ce paysage où baigne une quiétude, une sérénité apaisante si n’était l’étrange transe des arbres qui peuvent être des fromagers, des baobabs mais pas des manguiers.

A l’opposé de cette réalisation au charme presque naïf on peut voir des tableaux très sophistiqués aux teintes plus douces. L’un d’eux est carrément somptueux : toujours ces cortèges d’humains non sexués où si l’œil se fait plus attentif on discerne dans le fondu des tissus des visages de face qui interpellent par leurs regards saisissants, par des yeux parfois si immenses qu’ils semblent sortir du batik. Que veulent donc nous dire ces yeux ?... La composition très savante de l’œuvre incite également à la méditation d’autant plus qu’elle est énigmatique.

En cheminant dans l’exposition on est soudain pénétré par une toile diffusant une atmosphère solaire. Eclaire-t-elle ou brûle-t-elle ? Ambivalente cette atmosphère, ponctuée parl’apparition de ce qui peut être un dieu exigeant une prière ou scrutant les âmes de ces rangs d’humains qui se pressent devant lui, encore et encore. Il y a dans cette peinture une clarté qui émane du divin.

Dans notre parcours on est soudain happé par une main brune rayonnante. Bénit-elle ? Alerte-t-elle que le mal rode et qu’on est en danger ? Chez l’artiste l’ambiguïté est fréquemment présente. Est-ce pour que l’observateur poursuive sa quête de sens ?

Une série de petits formats sont plus sombres, plus empreints d’une perturbation intérieure etau fond très troublante. Si Pascal Ouedraogo ne se révélait pas un artiste aussi soucieux de travailler ses œuvres on pourrait avancer devant quelques toiles une parenté avec l’art brut. Ce serait une erreur comme le confirme ce très bizarre personnage mi animal mi-homme, mi-chat mi- corps en voie d’un autre monde.

Présentement la fermeture des services consulaires dans trois pays d’Afrique de l’Ouest bloque, par exemple, des étudiants inscrits dans des facs hexagonales et la caution bientôt exigée pour leur séjour en France ne va qu’aggraver leur sort. Des mesures qui vont aboutir à une déperdition de la francophonie que nos chers gouvernants sont soi-disant de fervents défenseurs… quand il s’agit de faire barrage au corse !

Michèle Acquaviva-Pache

Jusqu’au 2 février. Au rez-de-chaussée de la galerie il faut également s’arrêter pour voir la belle exposition de Julie Pontaut. Au sous-sol les œuvres de treize artistes attendent les visiteurs.

ENTRETIEN AVEC PHILIPPE CLERC

A quelle occasion avez-vous rencontré le peintre, Pascal Ouedraogo ?

Cela fait 23 ans que je vais en Afrique. Après une visite au Mali avec quelques amis on a choisi d’aller au Burkina Faso, pays à la réputation d’ouverture. A l’époque j’étais directeur technique d’une ville de la couronne parisienne et j’ai ensuite rejoint le service écologie de Sarcelles où j’ai travaillé auprès François Pupponi. Là, j’ai rencontré un Burkinabé extraordinaire qui m’a invité chez lui à Ouagadougou. Dans cette capitale j’ai fait la connaissance de beaucoup de monde. C’est au 1 er Centre national d’Art et d’Artisanat que j’ai vu Pascal Ouedraogo pour la première fois. Il était complètement concentré sur ce qu’il était en train de créer. J’ai aussitôt aimé ses œuvres qui allaient plus loin que la seule répétition de la tradition.


Quel est l’itinéraire de cet artiste ? Parvient-il à vivre de son art ?
Il a fait des études. C’est un intellectuel. Il fréquente beaucoup ses confères et les poètes. Avant les grosses difficultés que subit son pays ses batiks le faisaient vivre. Aujourd’hui ce n’est plus le cas…


Ouedraogo
travaille sur batik, en quoi cela consiste-t-il ?
Les artistes, qui travaillent sur batik, utilisent des toiles de coton très solides. Ils emploient des teintures naturelles mélangées à des herbes. Chaque peintre à se manière propre d’œuvrer. A un stade les toiles sont tendues au soleil, qui fait son office. Les dessins sont réalisés au fur et à mesure et à chaque étape ils sont recouverts de cire.

Quels sont ses sujets de prédilection ?
Ses œuvres sont surtout symboliques et toujours prime l’humain avec des théories d’hommes ou de femmes vues de dos pour ne pas dévoiler leurs visages. Je pense qu’il y a là une trace de l’animiste si présent en Afrique.

Comment définir son style ?
Difficile… Je retiendrai ses couleurs et ses fondus qui dans ses dernières créations vont jusqu’au monochromes. Certains détails de ses tableaux signent une tonalité mystique… L’an dernier à cause de la situation malheureuse du Burkina Faso il n’avait plus rien pour faire bouillir la marmite. Alors je luis ai acheté plusieurs de ses réalisations.

Quel est son caractère ?
On le surnomme « le guerrier » ! Son héros c’est Thomas Sankara qui a conçu une façon originale de penser le développement qui mette son pays hors de l’emprise du néocolonialisme français. Dans toutes les situations il ne se laisse pas marcher sur les pieds. Un jour un ministre a voulu acquérir un de ses tableaux. Problème, au cours des pourparlers il s’est aperçu que ses interlocuteurs vouaient, en fait, un bakchich. Il a coupé court et il est parti la tête haute… Lorsqu’il n’est pas absorbé à parfaire ses œuvres il a de l’humour et apprécie la discussion.

Vous avez rencontré Pascal Ouedraogo au Centre national d’Art et d’Artisanat de Ouagadougou. Comment se présente ce lieu ?
C’était le 1 er centre du genre à l’époque, maintenant il y en a un 2 è plus grand. Ce centre n°1 fonctionnait plutôt comme une coopérative et réunissait des peintres, des bijoutiers, des bronziers, des sculpteurs, des couturiers et des couturières… Ce qui m’a frappé c’est que ces artistes et artisans de toutes disciplines débattaient beaucoup entre eux.

Vous êtes responsables de l’Association Solidarité Afrique Sahel par qui a-t-elle a-telle été lancée ?
Au démarrage on était six avec des itinéraires personnels et professionnels différents. Ainsi notre secrétaire est tri nationale : chilienne, française, soviétique, car détenue au stade de Santiago par les nervis de Pinochet elle a finit par être libérée et par vivre les débuts de son exil en URSS. Notre association s’est essentiellement occupée d’agriculture et d’élevage. Non loin de Ouagadougou nous avons soutenu l’implantation d’une petite structure où les paysans font du maraichage. Ils déterminent eux-mêmes ce qu’ils veulent faire pousser. On les a aidés à forer huit puits et à creuser une bassine pour stocker l’eau. On est très heureux que dans ce coin cultivateurs mossi et éleveurs peuls s’entendent très bien… ce qui n’est pas toujours le cas ailleurs… On a également construit une école à Boussé sur la route du Mali.


Allez vous poursuivre vos actions en cette période très dure pour le Burkina Faso ?
Les agriculteurs se débrouillent très bien sans nous ! Personnellement je vais essayer de continuer à donner des coups de main dans le domaine artistique.

Propos recueillis par M. A-P











Partager :