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David Istria, nouveau président du tribunal de Commerce d'Ajaccio

"L'année 2025 constituera un cap important ..."
David Istria, nouveau président du Tribunal de Commerce d’Ajaccio
« L’année 2025 constituera un cap important à franchir d’un point de vue économique »


Elu en fin d’année dernière à la tête du Tribunal de Commerce d’Ajaccio, David Istria a pris officiellement ses fonctions lors de la rentrée solennelle de l’institution, le 15 janvier dernier. Concessionnaire automobile, il a occupé les fonctions de juge consulaire durant plus de dix ans. Et prend la succession de Frédéric Benetti dont il a été le vice-président lors de la dernière mandature. Homme de conviction qui se veut optimiste, David Istria évoque les grands axes de son mandat.



Vous êtes nouveau président du tribunal de Commerce de Corse-du-Sud. Vous vous inscrivez dans la continuité de votre prédécesseur ?
Tout à fait. Je reprends le travail amorcé par Frédéric Benetti durant deux mandats. Et je souhaite axer tout particulièrement mon travail dans certains domaines à améliorer. Comme un nouveau président ou un nouveau chef entreprise le ferait quand il reprend une affaire.


Quelles améliorations et quelles priorités pour ce mandat ?
La priorité absolue de ce mandat, c’est d’aller voir l’ensemble des institutionnels, les différents organismes, que ce soit la Préfecture, l’Ursaff, les DGFIP, la Chambre de Commerce, les experts comptables, les avocats...Afin d’essayer, ensemble, de trouver des solutions pour accompagner les entreprises qui sont en difficulté.


Envisagez-vous de nouvelles mesures?
La Préfecture a invité l’ensemble des socio-professionnels et des institutionnels pour mettre en place une cellule économique qui aura pour but, justement, d’aider les entreprises. Cette cellule devra soutenir le monde économique corse. Et j’espère, effectivement, qu’il y aura de nouvelles mesures qui seront données, principalement au niveau du tourisme, qui constitue l’activité la plus importante dans l’île. Il faut l’accompagner et faire en sorte que la Corse reste attractive. Le tourisme, le BTP et le commerce, dans son ensemble, sont les trois pôles les plus importants.


Parmi ces pôles, le BTP connaît une crise depuis déjà quelques années. Comment inverser la tendance ?
Ces difficultés demeurent et sont inquiétantes. On est face à un problème de demandes, les taux d’intérêts sont élevés et les permis de plus en plus difficiles à obtenir. En outre, les collectivités ont aussi beaucoup de mal et elles diminué ont diminué leur investissement. Cela débouche inéluctablement sur des entreprises qui sont dans le dur.


« Nous devons rester optimistes »
Comment travailler efficacement justement dans ce domaine ?
Nous avons les moyens d’ avancer. Ce que je propose, c’est de demander aux entrepreneurs de venir nous voir. On reste dans le cadre de la prévention qui est, je le rappelle, strictement confidentielle et gratuite, c’est important de le signaler. Il y a la possibilité de prendre des rendez-vous et de voir de quelle manière on peut accompagner les chefs d’entreprise. Mais nous devons parvenir à leur faire prendre conscience de leurs difficultés pour leur permettre de se restructurer juridiquement, économiquement et qu’ils puissent maintenir leurs emplois. Cette démarche effectuée suffisamment tôt peut sauver l’entreprise, les emplois et, étalée sur plusieurs structures, maintenir l’économie corse à flots. Une économie qui, il est utile de le souligner, n’est pas si catastrophique qui cela. Raison pour laquelle nous devons tout de même rester optimistes.


On sait que la prévention était un axe majeur de votre
prédécesseur. Ce sera aussi le cas pour vous ?
Il en sera, bien sûr, de même. Et la détection des entreprises en difficulté est liée à la prévention. La détection se caractérise, en amont, par le fait d’identifier les entreprises en difficulté. Et l’on peut, à travers ces informations, déceler ce type d’entreprise et établir des conventions avec des institutionnels. Donc effectivement, il y a une cellule de détection qui va être renforcée. Par ailleurs, il est important de dédramatiser. Le Tribunal de Commerce est là pour aider les entrepreneurs. On n’arrête aucune décision de justice et il n’y a aucune sanction de prise. D’où l’importance, pour les entrepreneurs, de venir nous voir. Il y a va de l’avenir de leur structure et des emplois qui y sont liés.


Quelle est la conjoncture actuelle ?

Elle est compliquée, tout le monde le sait. On a les chiffres de 2024 où l’on a noté effectivement une augmentation minime des transports de passagers dans l’aérien et le maritime, ce qui ne laisse rien présager de positif. Comment va être l’année 2025 ? Malheureusement, je n’ai pas de boule de cristal et je ne peux pas le savoir. Donc, il vaut mieux se protéger, se prémunir et anticiper s’il y a une quelconque difficulté.


Quel bilan tirez-vous de 2024 ?

On note, pour l’instant, un maintien des procédures collectives mais on ne sent pas une catastrophe. Les chiffres stagnent, tant au niveau des liquidations judiciaires que des redressements par rapport à 2023. L’année 2025 sera plus difficile et constituera un cap important pour l’avenir. Il convient de rappeler que l’on note, en Corse-du-Sud, 27500 inscriptions au RCS, c’est quand même assez significatif. Il nous faut ramener ce nombre d’inscriptions, qui sont essentiellement des artisans, des commerçants, des entreprises, au nombre d’ouvertures de redressement judiciaire. Sachant, en outre, que sur les cinq dernières années, il y a quand même eu 5500 inscriptions d’entreprises effectuées sur le territoire de la Corse-du-Sud, ce qui paraît assez important. Cela témoigne d’un bassin économique quand même très fort et qui est soutenu, surtout avec la période COVID à laquelle nous avons dû faire face. Les entreprises ont été soutenues par le « Quoi qu’il en coûte ». Certaines ont oublié, qu’il y avait, effectivement, des obligations légales à remplir auprès du Tribunal.


Pas d’optique économique de la part du gouvernement de François Bayrou. Cela ne va-t-il pas rendre la situation encore plus compliquée dans l’île ?
Certainement ! D’autant, que l’on est face à un gouvernement qui pourrait être de nouveau censuré. Nous n’avons pas de budget ni de feuille de route au niveau économique. On ne sait pas trop où l’on va et je comprends les inquiétudes du monde économique, et plus particulièrement, pour ce qui nous concerne, du monde économique corse, surtout du tourisme. Cette incertitude pèse beaucoup sur le moral des entrepreneurs mais tout autant sur le moral des investisseurs et des éventuels acheteurs. Tout cela rend la tâche encore plus complexe.


Plus de 70000 liquidations annuelles au niveau national, soit +28% par rapport à 2023. Est-ce que ce pourcentage se reflète au niveau de la Corse du Sud ?
En toute honnêteté, je n’ai pas encore effectué de comparatif. Il faudra attendre quelques mois pour savoir si l’on est dans les mêmes normes qu’au niveau national.

Interview réalisée par Philippe Peraut
Photo : Philippe Peraut

Tendances de l’année 2024


- Activité contentieuse : ordonnances d’injonction de payer retrouvant des seuils plus atteints depuis longtemps (près de 1.000), le délai moyen du délibéré au contentieux général passe sous les 100 jours et celui de la mise en état sous celui des 300 jours.

- Entreprises en difficulté : record du nombre de procédures collectives ouvertes (228, plus haut historique de la juridic-tion), de plus en plus d’emplois concernés par ces procé-dures (plus de 500, une première), près de 40% des procé-dures ouvertes sur demande volontaire et un retour des sanctions contre les dirigeants fautifs.

- Registre du commerce et des sociétés : record historique de créations d’entreprises (2107) et importance des micro-entrepreneurs au sein de celles-ci (616 sur 685 entrepre-neurs individuels), 2ème plus haut historique du nombre de formalités au RCS en 2024 (6260 formalités) et 27.498 entre-prises immatriculées.

- Dépôt des comptes annuels : le seuil des 50% de sociétés à jour de leur obligation de dépôt a été franchi, avec un suc-cès non démenti pour la déclaration de confidentialité(près de 83% des dépôts de comptes concernés).


- Sûretés mobilières : vitalité du crédit-bail comme instru-ment de financement et nette augmentation des publicités de nantissement sur fonds de commerce.

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