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Un été moins "festif" ?

Porto Latino et calvi on the Rocks ont décidé de se mettre en pause cette année
Un été moins « festif » ?

Alors que la saison estivale approche et que les acteurs locaux se préparent à accueillir des milliers de visiteurs, deux festivals majeurs ont annoncé une année blanche. Porto Latino et Calvi on the Rocks ont décidé de se mettre en pause cette année, en raison des baisses du budget alloué à la culture par les pouvoirs publics. De quoi jeter une ombre sur la richesse de l’offre culturelle pour la saison qui s’annonce.

Incertitude budgétaire

La Corse fait partie des neuf régions sur 13 à avoir diminué le budget à la culture, tout comme plus de 25 départements et certaines agglomérations et villes (Grand Paris, Métropole de Lyon, Rennes, Toulouse, Caen…), pour atteindre -65 millions € au total. En effet, en 2025, la Collectivité de Corse a annoncé une diminution significative de son budget culture, pouvant atteindre 20 %. Cette incertitude sur les montants alloués complique la planification des projets culturels, qui nécessitent souvent d’être organisés plusieurs mois à l’avance. Les structures culturelles insulaires peinent ainsi à se projeter, à monter des programmations ambitieuses ou à sécuriser la venue d’artistes majeurs. La programmation estivale corse s’appuie traditionnellement sur une grande variété de festivals, concerts, expositions, spectacles de rue et manifestations patrimoniales, qui font la renommée de la région. Or, la baisse des subventions publiques oblige les organisateurs à faire des choix drastiques : privilégier les événements les plus rentables ou les plus connus, au détriment de manifestations plus confidentielles, innovantes ou tournées vers des publics spécifiques (jeunes, familles, ruralité, etc.). L’annulation de deux festivals majeurs, Calvi on the Rocks et Porto Latino, illustre parfaitement cette tendance. Faute de moyens, ces rendez-vous incontournables de la scène musicale corse n’auront pas lieu cette année, privant l’île d’une vitrine internationale et d’un brassage culturel unique. Cette situation n’est pas isolée et touche d’autres manifestations, avec à la clé moins de résidences de création, une diffusion de spectacles réduite, et une offre culturelle amoindrie pour les habitants comme pour les visiteurs.

Conséquences sociales et économiques

Au-delà de la programmation, la baisse des soutiens publics fragilise l’emploi dans le secteur culturel, avec des risques de licenciements ou de réduction du temps de travail dans les structures touchées. L’économie locale, notamment l’hôtellerie, la restauration et les commerces, pâtit également de la disparition de ces rendez-vous estivaux qui attiraient des milliers de festivaliers et lançaient la haute saison touristique. Les festivals jouent aussi un rôle de cohésion sociale et participent à l’attractivité de la Corse auprès d’un public jeune et international. Pour de nombreux villages et villes corses, les festivals sont bien plus que de simples animations : ils constituent des temps forts de la vie collective, permettant aux habitants de se retrouver, de partager et de s’ouvrir à de nouvelles influences. L’annulation ou la réduction de ces événements risque d’affaiblir ce lien social, en privant les communautés d’occasions de se rassembler et de valoriser leur identité insulaire. Au-delà de la simple animation touristique, la diversité culturelle est un atout majeur pour l’attractivité de la Corse et le dynamisme de ses territoires. Elle contribue à valoriser le patrimoine insulaire, à soutenir l’économie locale et à renforcer le lien social. Sa fragilisation, sous l’effet de la baisse du budget culturel, interroge sur la capacité de l’île à continuer d’innover et de rayonner, tout en répondant aux attentes d’un public de plus en plus exigeant.

Climat incertain

Les acteurs culturels insulaires dénoncent un manque de visibilité et de dialogue avec les pouvoirs publics, ce qui alimente un climat de découragement et de colère dans le secteur associatif. Beaucoup réclament une clarification rapide sur les montants alloués et un accompagnement pour éviter une dégradation durable du tissu culturel corse. Face à ce défi, certains acteurs culturels appellent à la mobilisation des collectivités locales, du secteur privé et des habitants pour inventer de nouveaux modèles de financement et préserver la richesse de la vie culturelle corse. Car, comme le rappellent de nombreux organisateurs, « la culture n’est pas un luxe, mais une nécessité pour l’identité et l’avenir de notre île ».

Crédits photographiques
· 11474_2025-05-30_teksomolika_Vue aérienne plage_5910.jpg : © teksomolika
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