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Umani : l'énergie des victoires silencieuses

Entre résistances locales et solidarités globales, l’ONG corse AFC Umani tisse une autre manière de faire société

Umani : l’énergie des victoires silencieuses


Entre résistances locales et solidarités globales, l’ONG corse AFC Umani tisse une autre manière de faire société. Dans une époque marquée par l'accélération des crises sociales, climatiques et politiques, Jean-François Bernardini, chanteur du groupe I Muvrini, a choisi d’être la voix et le moteur de ces actions au plus près du réel. Lors de l’Assemblée Générale annuelle ce 12 juillet, au parc de Saleccia en Balagne, rassemblant près de 150 personnes, il nous a confié « Ce matin, on a senti cette énergie des victoires, ce travail de tisserand qui se fait chaque jour, passionnément »

« Passer de l’ère du dire à l’ère du faire »

Au-delà des discours, des prototypes sont créés et testés. Des bergers, des maraîchers, des éducateurs, des élèves, des citoyens sont accompagnés pour incarner le changement, avec des gestes concrets, porteurs de futur. « Ce sont ces petites victoires qui, mises bout à bout, forment une vague, des gestes simples mais décisifs, qui nourrissent, qui soignent, qui relient. Une réponse lucide et ancrée à un monde en crise ».

Umani ne prétend pas tout résoudre, mais elle agit là où c’est possible, avec les moyens du bord, et surtout une exigence de qualité, et d’éthique.

« La terre n’est pas une marchandise »

Parmi les principaux programmes de l’ONG, l’on trouve Terranea, initié en 2007, pour développer des projets de souveraineté alimentaire. En Corse, où moins de 4 % de l’alimentation est produite localement, Umani agit pour reconnecter les habitants à leur terre nourricière, et agit en soutien des bergers, des maraîchers, des éleveurs.
L’ONG participe également à des programmes structurants pour accompagner les maraîchers bio dans la montée en compétence, la transmission des savoirs, et l’installation sur des terres agricoles. Au-delà du soutien matériel, Umani milite pour une écologie de la conscience. « Ce n’est pas l’homme qui cultive le jardin, c’est le jardin qui cultive l’homme », en témoigne le projet des jardins pédagogiques, ou des jardins partagés.

Enfin, Umani mobilise et informe pour que chacun puisse faire des choix alimentaires éclairés, notamment par le biais d’analyses comparatives, menées pour quantifier les résidus chimiques, ou les pesticides.

Non-violence : l’autre urgence éducative

Le programme « Diventà Artigiani di a Non-Viulenza » est l’autre pilier fondamental de l’association. Lancé en 2011, il s’est imposé comme une réponse essentielle à la fabrique massive de dysfonctionnements psychiques dès l’enfance. L’objectif est de transmettre des outils concrets de régulation émotionnelle, de gestion de conflit, de respect mutuel. Une approche proactive pour désamorcer les violences sociales, scolaires, verbales ou numériques.

En 2024, plus de 7000 élèves et 358 enseignants ont bénéficié des conférences gratuites de sensibilisation, en Corse, sur le continent, et en Belgique. Au total, ce sont plus de 115 000 personnes qui ont été touchées par ce programme depuis sa création.

Lingua Viva : « une langue corse qui a tant à dire au monde »

Umani cherche à raviver une langue dont la transmission naturelle dans les familles est aujourd’hui inférieure à 2 %, par des initiatives concrètes et ludiques, comme la traduction collective d’ouvrages jeunesse de la littérature mondiale.

« Être Corse, c’est être à l’écoute des besoins du monde »

Bien qu’étant une ONG de territoire, Umani
pense et agit globalement. Des partenariats sont mis en place à l’international, comme à Madagascar, pour l’installation de panneaux solaires dans des établissements scolaires ; en Birmanie, en soutien aux enfants de la guerre, ou encore au Brésil, contre le travail esclave qui sévit dans l’agro-industrie.

Au fond, le fil rouge de toutes ces actions, c’est une forme de résistance, le refus de se résigner. Croire à la beauté du monde, et vouloir transmettre aux générations futures autre chose qu’un monde abîmé.

« Nous vivons dans un siècle de dérégulation. Mais nous avons les anticorps. Nous avons les vaccins », martèle Jean-François Bernardini.

ALexandre Santerian
photos : Alexandre Santerian
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