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Jacques Scaglia : une vie marquée par la musique

La musique corse et le monde du chant lyrique ont perdu une figure majeure

Jacques Scaglia : une vie marquée par la musique


La musique corse et le monde du chant lyrique ont perdu une figure majeure. Jacques Scaglia s’est éteint le 25 septembre à l’âge de 91 ans, laissant derrière lui un héritage artistique et humain qui dépasse les frontières de l’île. Sa disparition a suscité une émotion profonde, tant à Canari qu’au sein du monde musical international.


Né à Casablanca, marqué par la perte soudaine de son père, Jacques a trouvé dans la musique un refuge et un horizon. Très tôt, sa voix s’est imposée. À 18 ans, il a intégré le Conservatoire de Marseille où il a obtenu ses premiers prix, avant de rejoindre Milan et la Scala, temple de l’art lyrique, où il s’est perfectionné quatre années durant. Dans cette école d’exigence et de rigueur, il a acquis une technique et une discipline qui ont marqué toute sa carrière.

De la scène à la transmission


La vie l’a amené cependant à tracer un chemin différent. Marié à Évelyne Quilici, père de cinq enfants, il a renoncé à une carrière de soliste pour embrasser des voies plus stables, avant de retrouver la Corse et d’y transmettre sa passion. Dans son village de Canari, il a repris le chant, fondé une association culturelle et s’est consacré à l’enseignement. Mais sa vision a bientôt dépassé les frontières locales : en 2003, il a créé le Festival international de chant lyrique de Canari, installé dans le cadre unique du couvent du Cap Corse.

Le pari de Canari


Ce pari audacieux s’est transformé en réussite éclatante. Chaque été, le petit village s’est métamorphosé en scène ouverte aux voix les plus prometteuses. Jurés prestigieux, jeunes chanteurs et mélomanes de toute l’Europe ont afflué. Le concours a rapidement gagné en notoriété, devenant une référence mondiale du chant lyrique. Comme le soulignait souvent son entourage, Jacques Scaglia était « un homme de conviction qui a transformé un petit village en scène de résonance internationale ».

Un héritage familial et culturel


Au-delà des aspects artistiques, il s’est distingué par son sens du partage et son humanité. Sa fille Rita a rappelé combien son père « aimait rassembler, cuisiner, entourer ses petits-enfants et arrière-petits-enfants ». Son attachement aux valeurs familiales a résonné avec son engagement culturel et donné à son parcours une dimension profondément humaine.
Cette passion, il l’a inscrite dans une filiation prestigieuse. Son beau-père, Félix Quilici, né à Bastia en 1909, a été altiste de renom, premier prix du Conservatoire de Paris, alto solo à l’Orchestre national, et pionnier de l’ethnomusicologie corse ainsi que restaurateur d’orgues. Dès 1948, il a mené des missions de collecte qui ont permis de sauvegarder des centaines de chants traditionnels. Fondateur de la chorale A Cirnea, auteur de recueils et chercheur associé au CNRS, il a fait rayonner la polyphonie insulaire jusqu’à Paris. L’œuvre de Jacques Scaglia a ainsi prolongé cette tradition familiale de transmission et d’innovation musicales, en l’orientant vers l’opéra et la scène internationale.

Un rayonnement au-delà de l’île


Les hommages sont unanimes. En quelques années, ce qui n’était qu’un rêve ambitieux est devenu une institution reconnue dans le monde lyrique. Sous son impulsion, Canari s’est affirmé comme un rendez-vous incontournable, mariant exigence artistique et générosité humaine. La commune a souligné la dette immense qu’elle contracte à son égard.
À travers son œuvre, Jacques Scaglia a su unir deux dimensions : l’ancrage local et l’ouverture mondiale. Dans un décor unique, entre mer et montagne, il a fait résonner la voix des plus grands talents et donné aux jeunes chanteurs une chance unique de se produire sur une scène prestigieuse.

Un passeur de culture


Sa disparition a laissé un vide immense, mais son héritage demeure vivant dans les mémoires et dans la continuité du festival. En lui rendant hommage, Canari et la Corse ont salué un passeur de culture, un homme de passion et de conviction.
La rédaction du Journal de la Corse présente ses condoléances les plus sincères à sa famille, à ses proches, ainsi qu’à tous ceux qui ont partagé son chemin artistique et humain.

GXC
Photo: D.R
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