• Le doyen de la presse Européenne

Un congé parental en peine de père

Si la société pouvait se changer par décret, les pères auraient recours au congé parental autant que les mères.
Un congé parental en peine de père


Si la société pouvait se changer par décret, les pères auraient recours au congé parental autant que les mères. Mais dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça. La faute aux préjugés, aux poids financier et culturel. Le chemin pour l’égalité entre les sexes reste long.



Ça ne se bouscule pas

En 2015, dans le cadre de la loi sur l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, la durée des congés parentaux est modifiée. Pour un premier enfant, il est porté à un an, à condition que les deux parents le prennent. À partir du deuxième enfant, un parent ne peut plus prendre que 24 mois au lieu de trois ans, seul le deuxième parent pouvant prendre les 12 mois restant. Malgré cette réforme, moins de 1% des pères prennent leur congé parental à taux plein (contre 14 % pour les mères au premier enfant, et 20 % pour le second), selon une étude de l’OFCE, centre de recherche en économique de Sciences Po. Pour rappel, l’objectif de cette réforme était de permettre aux femmes de revenir plus rapidement sur le marché du travail. Car prendre un congé parental signifie mettre sa carrière professionnelle entre parenthèses pendant un temps pour s'occuper de son ou ses enfants. Et dans une trajectoire professionnelle, le choix entre vie de famille et carrière ne se pose pas de la même manière pour un père que pour une mère.
Le père a tendance à privilégier sa carrière. Mettre sa carrière entre parenthèses pour s’occuper de son enfant reste mal vu par un employeur et les collègues lorsqu’il s’agit d’un homme. Les préjugés ont la vie dure, y compris pour les hommes dont on attend qu’ils s’impliquent à 100 % dans leur travail et qu’ils soient le haut salaire du foyer. Parmi le faible pourcentage de pères ayant choisi de prendre ce congé parental, il est à relever que ce sont ceux dont les revenus sont moins hauts dans le foyer.


Échec de PrePareE

Le congé parental, renommé en 2015 « prestation partagée d'éducation de l'enfant » (PrePareE), est différent du congé maternité et paternité de quelques semaines intervenant juste après la naissance de l'enfant. Une réforme du congé de paternité va d’ailleurs entrer en vigueur le 1er juillet prochain. Le congé de paternité passera de onze à vingt-cinq jours (plus trois jours d’absence autorisée). L’idée reste de permettre aux nouveaux pères de s’impliquer davantage lors de la naissance de leur enfant. Dans la pratique, la quasi-totalité des mères en emploi ou au chômage prend leur congé de maternité alors que selon une enquête de la Drees (Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques), en 2013, sept pères éligibles sur dix ont eu recours à leur congé de paternité. Un congé paternité plus populaire que le congé parental, largement boudé par les hommes. Pourtant, le congé parental est inscrit dans le droit du travail depuis 1977 en France.
Ce congé s’est toujours adressé aussi bien aux hommes qu’aux femmes. À l’origine, il était réservé aux familles qui avaient au moins trois enfants. En 1994, il a été ouvert aux familles de deux enfants. On a pu voir le succès de la modification par le nombre de mères qui ont arrêté de travailler. En 2015, « Preparee », en partageant ce congé entre les parents, pour que la dernière année soit pour l’autre parent, ciblait clairement les pères. Résultat ? Cela a simplement fait baisser le nombre de bénéficiaires de ce congé en général. On peut donc en conclure que cette réforme est un échec.


Choisir d’éduquer son enfant

Les deux principales raisons invoquées pour expliquer ce faible recours à ce congé du côté des pères sont le poids financier et culturel. Dans le couple, quand la décision de prendre ce congé d’éducation est en balance, la question du qui le prend est assez vite tranchée. Économiquement, la perte la moins importante favorise que cela soit la mère qui mette sa carrière entre parenthèses. Le poids de la rémunération est donc un facteur limitant. Le montant de la prestation pour ce congé s’élève à 398,79 euros par mois à temps plein en France. Les pays cités en exemple pour les pères qui prennent ce congé sont la Suède, la Finlande et la Norvège, où cette rémunération s’élève à 80 ou 90 % de leur salaire antérieur. L’autre frein à cette réforme est culturel et social. Traditionnellement, c’est à la mère de s’occuper de l’enfant dans ses premières années. Là encore les stéréotypes de genre ont la vie dure. Pourtant l’éducation d’un enfant est tout sauf une question de genre ou un déterminisme biologique.
Partager :